Les grandes plaines de l'Ouest de l'Amérique, le Far West avec son lot de barbaries et de personnages peints au vitriol. Dans The English, une mère, une aristocrate anglaise nommée Cornelia Lock (Emily Blunt), pose ses valises loin de tout. Elle croise le chemin d'Eli Whipp (Chaske Spencer), un Amérindien Pawnee et ancien éclaireur de cavalerie, taiseux, dont chaque mot ressemble à un timide grognement.
Le grand Far West est le carrefour d'une revanche silencieuse dans The English, une fiction de six épisodes d'un excellent calibre. Dans un ballet de gueules (et d'âmes) écorchées, la série rassemble des thèmes très contemporains (l'émancipation, la liberté, l'obsession de la justice) qui s'entrelacent dans cette quête de vengeance unissant deux individus. Lock est une mère endeuillée, prête à se frotter à la sauvagerie pour retrouver la trace de l'homme qu'elle tient pour responsable de la mort de son enfant. Whipp, lui, n'a plus de famille et souhaite rejoindre le Wyoming pour réclamer du terrain qui lui appartient. Les deux vont faire équipe pour étancher une soif de revanche et surtout réclamer justice.
The English ravive les délices du film Power of the Dog de Jane Campion, la radicalité de Hostiles de Scott Cooper, ou plus récemment la série Django aussi diffusée sur Canal+. Son créateur, Hugo Blick (Shadow Line, The Honorable Woman), pond un scénario dans les mêmes tonalités, dans un élan de néowestern sublimé par une photographie affolante. L'une des réussites réside dans ce dispositif narratif pour dessiner ce long périple: une action admirablement tenue, sans artifice, et cette tendresse qui se glisse dans les recoins d'une quête vengeresse.
L'aridité des sentiments et des paysages fait écho à la brutalité de l'époque. Tout est démultiplié, de l'expropriation des terres des populations autochtones aux meurtres du Wyoming; les balles, les flèches, les coups, tout y passe dans ces contrées violentes du Far West - et le sang et les larmes couleront.
Une folie meurtrière qu'Emily Blunt, en maîtresse, porte à bras le corps. A la baguette de cette symphonie violente, elle forme un duo percutant avec son acolyte Chaske Spencer.
Hugo Blick offre une déconstruction des codes du western. A travers ces deux êtres endeuillés, ces deux destins vont s'aider à surmonter le spectre de la mort. Pas de phrases rose bonbon, pas une histoire à la guimauve. The English, incarné par une femme revancharde, un brin naïve, révèle les différentes strates d'une histoire où le combat pour la liberté et la justice démarquent une écriture poignante où la chute rappelle que la course à la vengeance ne se termine jamais dans la joie.
«The English» est à découvrir sur Canal+.