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L'affaire Alex Schwazer: notre avis sur la captivante série Netflix

Alex Schwazer en plein entraînement.
Netflix panse les plaies d'un athlète italien, Alex Schwazer.Image: Netflix

L'affaire Alex Schwazer, un champion olympique poussé vers la sortie

Une mini-série documentaire sur le marcheur renié (et dopé) Alex Schwazer démontre que l'athlète n'est pas le seul responsable dans sa descente aux enfers. Une fascinante plongée dans un scandale retentissant et poignant.
14.04.2023, 18:4405.05.2023, 11:50
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Le titre rappelle un mince rai de lumière paradoxal trouant l'épaisseur d'une nuit de mensonges. Une vérité en marche: l'affaire Alex Schwazer est une expression des dérives du sport professionnel, des institutions, de la folie d'une grande victoire, d'une consécration avant de perdre les pédales; un regard sur la chute d'un champion jusque dans les entrailles de l'enfer judiciaire.

Netflix panse les plaies d'un athlète italien, de celui qui «a humilié le sport italien» comme le soulignait la presse transalpine après avoir remporté le 50 km des Jeux olympiques. «J'ai gâché ma vie, toutes ces années d'entraînement...», lâche Schwazer devant un parterre de journalistes et de photographes mitraillant son visage amaigri et ses yeux mouillés.

Bande-annonce

L'histoire du sportif italien est une course vers les sommets et une dégringolade dans les abysses. Par deux fois, il se retrouve pincé pour dopage: la première faute est avérée, que l'Italien lui-même conte avec beaucoup de sang froid, et l'autre est pour le moins intrigante...

Retour d'un acharné après avoir fauté

Une fois ses péchés lavés et sa suspension levée, il reprend la compétition et retrouve une forme olympique aux côtés de Sandro Donati, un entraîneur connu pour traquer les athlètes dopés, pour briller et courir après son rêve: défendre ses chances lors des JO de 2016 à Rio. Il prend une revanche éclatante et s'impose dans une coupe du monde de marche à Rome. Giovanni Malago, le président du Comité olympique italien (Coni), explique en ces mots:

«C'est une belle histoire, unique, tourmentée, difficile. Je crois en sa vengeance. Bref, vive le sport»

Mais voilà que la machine se grippe et le second test positif vient tout dérégler; un gros souffle sur le château de cartes que le valeureux marcheur construisait étape par étape. Le Tribunal arbitral du sport (TAS) bloque sa participation et Schwazer est suspendu pendant huit ans, jusqu'en 2024. La poisse, la grosse casse (morale).

S'engage un vrai bras de fer, tant physique (des séances d'entraînement effrénées pour rester au top) que psychique, car le natif de Vipiteno est au centre d'une rare histoire. Un scénario que David Fincher n'aurait pas renié, que Marco Bellocchio aimerait sûrement adapté, tant ce documentaire révèle des faces ombragées, des idées complotistes aux relents mafieux, des vengeances crasses autour d'un bonhomme.

Le documentaire en quatre parties s'applique à revenir sur les moindres faits, ravivant le démiurge du dopage: le docteur Michele Ferrari. Telle une figure christique, il renaît dans chacune des affaires de dopage, cette fois-ci venu donner un petit coup de main à Schwazer pour relancer la machine après son sacre olympique. Les visages de Lance Armstrong, Tyler Hamilton et autres sportifs refont surface, tout comme le sulfureux record de Francesco Moser à Mexico, entaché par les soupçons et expliqué par le transfert d'une poche de sang lors d'un vol en Concorde.

Derrière ces noms, comme Ferrari ou Francesco Conconi, un autre scientifique italien du sport, ce sont les années sombres de l'EPO, des transfusions sanguines et des athlètes utilisés comme des cobayes. Un marché de la performance conté à travers les (futurs) démêlés de Schwazer.

L'or pour désintégration

Le champion olympique de Pékin rappelle le traitement des athlètes il y a une dizaine d'années, les médias et les instances sont intraitables: «Ils ignorent les sacrifices d'un athlète», murmure-t-il. Chose qui a bien changé depuis quelques années.

Le vertige d'un titre olympique lui a valu une bonne dose de solitude et d'isolement, comme désintégré après avoir atteint le sommet.

Mais c'est surtout sa médaille d'argent (qu'il jettera de rage dans les ordures pour ne pas avoir raflé le titre) à Berlin qui va lancer un chapitre, celui d'une espèce de course contre la montre infernale qu'on sait promise à l'échec. Les Russes brillent et Schwazer est curieux. Il explique faire une fixation sur les athlètes russes, vouloir comprendre leur recette gagnante. L'un d'eux lui dit sans détour:

«Entraînement, manger, vitamines, dopage»

Le pacte faustien est scellé. Motivé par cette pratique, l'Italien est embarqué (indirectement) dans les manigances du dopage étatique russe, ce scandale qui a été décortiqué dans un excellent documentaire également visible sur Netflix: Icare.

Après cette révélation, Schwazer n'avait qu'une chose en tête: se droguer. Le début de la fin, en étreignant les démons de la performance à tout prix. Un cocktail d'EPO et de testostérone obtenu sur Internet, en Turquie, et Schwazer entre dans une généalogie sportive suspecte que de nombreux sportifs ont embrassée.

Etranglé par cette quête de métal doré, quitte à sombrer dans la honte et entraîner son entourage dans une réalité enlaidie par le mensonge.

Et ensuite, un second test positif aux allures de complot

Tout le monde en prend pour son grade dans ce documentaire captivant. Outre une mère désemparée, pétrifiée à l'idée que son rejeton n'en finisse avec la vie, il y a la patineuse Carolina Kostner, elle-même encore marquée, usant souvent du silence comme réponse. Petite amie de Schwazer au moment du premier test positif, la star du patinage artistique est reconnue coupable de complicité dans le système de dopage de son ancien compagnon - elle écopera de seize mois de suspension et une amende de 1000 euros.

Carolina Kostner.
Carolina Kostner Image: Netflix

Pour Schwazer, il purge sa peine, retrouve les bancs de l'université, devient serveur à Innsbruck, et revient aux affaires en 2016, avec pour mentor et entraîneur Sandro Donati. Ce dernier sera, figure du sport italien, est cible par des ennemis. Et cette association gênera et déclenchera surtout une affaire internationale qui va bouleverser leur vie et ébranler le système antidopage.

Car derrière ce retour, persévère le spectre du scandale du sport russe, alimenté par les silences de la World athletics (IAAF) et de l'Agence mondiale antidopage (AMA). Et Schwazer va polariser tout ça, le catalyseur de ces différents scandales regroupés dans ce documentaire savamment torché. Derrière le cas Schwazer, il y a plus, il y a un jeu de miroirs entre l'IAAF et l'AMA, des voix puissantes telles que Sebastian Coe, qui s'offusque du jugement rendu par le tribunal de Bolzano, menaçant la justice italienne après qu'elle ait donné raison au plaignant que son deuxième contrôle positif aurait été bel et bien manipulé.

Un journaliste spécialisé dans les affaires mafieuses contacté par Donati, Attilio Bolzoni, parle d'une corruption liée à des histoires entre différentes personnes bien placées et Donati. Le journaliste a d'ailleurs cette phrase:

«L'IAAF ne suivait pas ses propres règles»

Si Schwazer a été réhabilité par les instances italiennes, il ne l'a pas été par le système sportif. C'est parole contre parole, une empoignade compliquée et terriblement émouvante qui démontre la hargne d'un athlète, d'organisations qui ne disent pas tout pour sauver leur sport, ou plutôt l'intégrité de leur sport, quitte à jeter le discrédit sur un seul homme. C'est un tout, une course folle derrière une vérité, des lectures différentes de l'affaire qui s'affrontent dans un scandale politico-sportif où tient en équilibre Alex Schwazer.

A découvrir sur Netflix depuis le 13 avril.

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