Les premières notes plaisent, il y a comme un ton vertigineux dès l'entame, une mélodie furieuse et entêtante. Boom! Pas le temps, la série appuie sur le champignon et décoche une bonne droite. Liaison nous ouvre les yeux comme des soucoupes et le nid d'espions tourne au bon filon - sériel, bien sûr.
Liaison démarre sur les chapeaux de roues: des hackers syriens sont recherchés pour leurs renseignements (top secret) de cyberattaques en Europe et spécialement au Royaume-Uni. Les deux Syriens demandent l'asile politique en France et Gabriel Delage (Vincent Cassel) doit les ramener à Paris. Pourquoi la France? L'un d'eux a étudié en France. Et vous voici happé (dans ces premiers épisodes, du moins) dans une intrigue bien musclée d'espionnage, au récit tortueux qui s'infiltre dans les arcanes de l'univers de la cybersécurité européenne.
Pour incarner ce thriller d'espionnage, un duo de choc. Vincent Cassel se glisse dans la peau de Gabriel Delage, un mercenaire talentueux qui opère pour un sous-traitant privé qui travaille (vous suivez toujours?) pour la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE); Eva Green, elle, campe Alison Rowdy, un agent basé à Londres et travaillant pour le gouvernement britannique. Un tandem séparé et projeté au milieu de différents scénarios, où des cyberattaques se greffent au Brexit et aux autres ficelles bureaucratiques bien lourdes pour complexifier ce mano à mano dans les coulisses.
De l'action pur sucre et des manigances politiques, des va-et-vient entre les Britanniques et les Français. Outre les conflits bureaucratiques, la relation amoureuse entre Alison et Gabriel flaire bon la nostalgie et l'inachevé; des paroles ponctuelles, une réunion avec une tension sexuelle perceptible, ces deux-là ont vécu plus qu'une amourette.
Mais cette romance, comme consumée dans le passé, n'a pas vraiment sa place dans le présent - celui qui nous intéresse. Pire, elle alourdit le procédé narratif, se détournant du rythme dopé à l'action digne d'une production labellisée Homeland ou Bodyguard, voire Bureau des légendes.
La créatrice Virginie Brac (auteure d'une saison d'Engrenages sur Canal+) torche un script qui s'étend sur six épisodes d'une heure, nouant un suspense convenable et s'aventurant (à tort) sur le terrain de la romance sacrifiée. Liaison intéresse spécialement quand elle évoque cette menace informatique qui nous fait prendre conscience de la dangerosité et de l'importance de la sécurité virtuelle. Les conséquences peuvent être dévastatrices si les hautes autorités perdent le contrôle. Apple et Virginie Brac soulignent ces peurs modernes qui entourent notre époque.
Malgré son bel emballage visuel à plus de 5 à 10 millions d’euros par épisode, Liaison est un spectacle convenable, mais qui peine à passer la seconde. La faute à une relation entre Green et Cassel qui fera... un gros plouf.
Brac aurait dû donner le coup de reins nécessaire pour densifier son thriller d'espionnage sans ramener une idylle par-dessus le marché. N'empêche, Liaison vous fera passer un chouette samedi soir, sans pour autant que cette série s'imprègne à jamais dans votre mémoire.
«Liaison» est disponible sur Apple Tv+