Si on peut bien reprocher à Netflix d'être trop cher et de proposer un peu trop de productions à la qualité parfois douteuse, il y a bien une chose où la plateforme excelle, c'est d'apporter de la visibilité à des œuvres du monde entier.
Cette fois, c'est vers la Thaïlande que le géant du streaming nous oriente, dans un domaine qui fait la fierté de ce pays: la gastronomie. Bien que cette thématique au cinéma fasse plutôt dans le registre «feel-good» comme Chef ou la récente série The bear, les films sur la cuisine gastronomique ont pris dernièrement une orientation qui lorgne du côté du film horrifique et politique, comme Le Menu sorti l'année derrière ou encore, sous certains aspects, la Palme d'or du Festival de Cannes 2022, Sans filtre.
Disponible en exclusivité sur la plateforme depuis le 8 avril, HUNGER est un brûlot politique, esthétique et angoissant qui a des allures d'épreuves de Top chef, mais risquant malgré tout de vous couper l’appétit en dépit de la beauté du dressage.
Aoy (Chutimon Chuengcharoensukying) est une jeune femme issue d'un milieu modeste destinée malgré elle à reprendre le boui-boui familial, dont le menu se compose principalement de nouilles sautées. Repérée par le sous-chef d'une légende de la cuisine, cette dernière se voit offrir l'opportunité d'intégrer la brigade du prestigieux restaurant HUNGER dirigée par la main de fer du Chef Paul (Jayanama Nopachai).
C'est ainsi que démarre ce thriller dans le milieu impitoyable de la haute gastronomie. Mais avant d'être un film sur la toxicité de ce milieu d'excellence, HUNGER est avant tout une dénonciation de la lutte des classes thaïlandaise qui fait inévitablement écho à la nôtre. Le cinéma asiatique ne faisant généralement pas dans la subtilité, le film n'hésite pas à donner une vision grotesque des élites rongées par l'avidité afin d'exposer le monstrueux fossé séparant les bourgeois des plus modestes.
Mais au-delà de l'ambition de livrer sur assiette une critique sociale, le film excelle surtout dans la tension qu'il distille dans ses scènes de cuisine. A la manière d'une épreuve de la dernière chance, le suspense est à son comble, amplifié par de simples effets, comme une bouilloire sifflante sur le feu en guise de montée en puissance. Un sens du rythme maîtrisé comme un soufflé au Grand Marnier.
Le film est porté par les solides interprétations de son duo principal. La jeune Chutimon Chuengcharoensukying tient une bonne partie du film à bout de bras, volant la vedette au Chef Paul qui, tel un Philippe Etchebest sociopathe, est incarné par le glaçant Jayanama Nopachai.
Bien que la mise en scène soit aux petits oignons, le film souffre d'une certaine lourdeur, notamment dans le portrait caricatural de l'élite thaïlandaise. Néanmoins, par sa tension et sa maîtrise des codes thriller, HUNGER est un film à la hauteur d'un grand restaurant et un plat digne de Top chef: malin, gourmand et surtout sanglant.
«HUNGER» est disponible sur Netflix depuis le 8 avril.