Ce mercredi, l'action de Credit Suisse s'enfonce, encore et encore, laissant planer le risque de gros troubles économiques en Suisse, en Europe, et peut-être dans le monde.
Mais pourquoi la chute d'une banque suisse pose-t-elle problème au-delà de nos frontières? Vivant dans un monde globalisé, interconnecté et où les créances (en milliards) des uns sont les débits des autres, Credit Suisse fait partie des institutions Too big to fail.
Car Credit Suisse est classé «d'importance systémique» par le régulateur suisse. Comprendre: son portefeuille, ses actionnaires, les entreprises qui y ont investi et les tenants et aboutissants de ses investissements ont pénétré tellement de secteurs et de zones géographiques que sa faillite serait une catastrophe commune, que tout le monde veut éviter.
Le principal actionnaire de CS, la banque nationale saoudienne (SNB), a d'ores et déjà déclaré qu'elle ne volerait pas à la rescousse de Credit Suisse. La banque pourrait-elle être sauvée? Et donc, la question qui se pose est: par qui?
Alors: la Confédération (et donc nos impôts) va-t-elle devoir voler à la rescousse de CS? Dans une interview à Bloomberg, le président du Conseil d'administration de CS l'a toutefois exclu.
Samuel Bendahan, conseiller national (PS/VD), mais également docteur en sciences économiques et maitre d’enseignement et de recherche à la HEC Lausanne et à l'EPFL, répond à nos questions. Alors, le too big to fail, c'est quoi les enjeux?
Car il rappelle que le risque reste inhérent à toute entreprise, même les plus grosses. Mais pour celles-ci, le risque devient, alors, systémique. En Suisse, relève l'économiste, cela peut aussi fragiliser la confiance dans les institutions bancaires et financières du pays.
Car si l'Etat devait intervenir, à un moment ou à un autre, c'est dans un cas de figure précis: celui où la chute de l'établissement provoque un danger pour la population:
Et les «petits clients» de la grande banque, risquent-ils quelque chose?
La situation risque-t-elle de ricocher ailleurs en Europe et aux Etats-Unis? En France, la première ministre Elisabeth Borne demande déjà à la Suisse de régler le problème et la Banque centrale européenne (BCE) doit se saisir du dossier demain.
L'économiste tient également à relativiser quelque peu la chute de la banque: «Il y a plusieurs choses qui arrivent en même temps. L'inflation, la hausse des taux d'intérêts et des incertitudes liées aux investisseurs, ainsi que les difficultés de Credit Suisse sont difficile à identifier précisément. La banque avait déjà été affaiblie avant par de nombreuses affaires et plusieurs problèmes». Il précise:
Pour l'économiste, le vrai problème est ailleurs, et plus profond: une «crise» de confiance dans les institutions financières, ou en tous cas certaines d’entre elles.
Le politicien prend alors le pas sur l'économiste: «La Banque nationale suisse (BNS) et la Confédération doivent être prêts et suivre la situation avec attention. Ils sont à même de prendre des décisions qui peuvent influencer positivement la confiance dans le système bancaire suisse».
Samuel Bendahan avertit qu'il est «important que la BNS ne prenne, notamment, pas de décision hâtive en matière de taux directeurs qui pourrait avoir des conséquences néfastes au niveau suisse, comme l'explosion des loyers». Il appelle les autorités à rester prêtes, garder la tête froide et à agir consciencieusement.
(acu)