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Les vignobles bordelais sombrent dans la crise

Le vignoble bordelais sombre dans la crise

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Chute des ventes et climat défavorable sont en partie responsables de la chute économique des vignobles de la région.Image: sda
Ambiance gueule de bois dans la région viticole la plus connue du monde: la consommation de vin rouge étant généralement en baisse, les viticulteurs doivent arracher des vignes et distiller leur récolte.
05.03.2023, 11:5805.03.2023, 18:26
Stefan Brändle, Paris / ch media
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«Vignerons en faillite», telle était la plus grande banderole déployée lors d'une récente manifestation à Bordeaux, en France. Plusieurs centaines de viticulteurs avaient convergé vers la métropole régionale – et ce pour la deuxième fois depuis l'année dernière – afin d'attirer l'attention sur leur situation précaire. Sur les 4000 viticulteurs de leur région, le Bordelais, plus de 1300 sont en grande difficulté financière selon une enquête sectorielle. Soit un tiers.

La situation est paradoxale. D'un côté, les célèbres grands crus comme Margaux, Pauillac ou Saint-Emilion génèrent des bénéfices élevés. En effet, un vignoble de Pomerol est récemment parti au prix record de 8,5 millions d'euros par hectare.

De l'autre se trouvent tous ces viticulteurs, plus petits et indépendants, qui constituent la majorité des 50 000 employés de la filière viticole bordelaise. Ils produisaient, autrefois, un vin de table plus ou moins correct pour les clients français et les supermarchés, mais au fil des décennies et des générations, ont souvent réussi à décrocher des labels de qualité et de qualité supérieurs.

La consommation a diminué de moitié

Aujourd'hui, le temps joue contre ces petits viticulteurs, qui souffrent de cette concurrence. Sur leur marché principal, la France, la consommation de vin rouge a tout simplement diminué de moitié au cours des cinq dernières décennies. Dans une nouvelle étude, l'interprofession bordelaise CIVB, constate:

«On boit moins de vin de table, mais plus de blanc, de rosé et de vin mousseux»

Les barrières douanières et la pandémie de Covid-19 auraient également fait chuter les exportations vers les Etats-Unis ou la Chine.

Workers prepare the large vats to fill with wine during the early harvest of white grapes in the Grand Cru Classe de Graves of the Ch?�teau Carbonnieux, at Pessac Leognan, south of Bordeaux, southwest ...
Les ouvriers préparent les cuves.Image: sda

Les exportations de vin rouge en direction de l'Amérique et de l'Asie reprennent lentement. Mais ce sont surtout les vins haut de gamme du Bordelais qui en profitent. De nombreux viticulteurs restent assis sur 12% de leurs vins rouges. Selon le CIVB, 300 000 hectolitres de jus de raisin sont actuellement stockés dans les caves du Bordelais. 200 000 hectolitres ont été vendus à perte.

Cette surproduction remonte à la fin du siècle dernier, lorsque la corporation bordelaise a développé massivement les vignobles dans l'euphorie générale des prix et le début des exportations vers la Chine: entre 1982 et 2000, leur surface dans le Bordelais est passée de 75 000 à 120 000 hectares.

Cheval Blanc, l'un des meilleurs vins de Bordeaux.
Cheval Blanc, l'un des meilleurs vins de Bordeaux.Image: keystone

La ruine plutôt que la tradition familiale

Désormais, les viticulteurs ne parviennent plus à écouler leur vin. A ceci s'ajoute l'augmentation des coûts de production en raison de l'inflation, obligeant ainsi de nombreux producteurs de vin à déposer le bilan. C'est le cas de Daniel Mercier, qui exploite 65 hectares de vignes à Camiran. Ce viticulteur en âge de prendre sa retraite a ému la nation en racontant à une caméra de France 3 comment il se rendait parfois sur la tombe de son père, décédé depuis longtemps, pour lui dire que le domaine familial, dont il était autrefois si fier, était au bord de la ruine. «Ça me rend bilieux», a-t-il grondé, avant d'éclater en sanglots.

Son fils Bastien a montré la cave à vin qui a servi à plusieurs générations depuis 1837. La famille cherche des acheteurs pour une partie des terres, en vain jusqu'à présent, malgré un prix préférentiel à seulement 5000 euros l'hectare.

Dans les vignobles environnants, au sud-est de Bordeaux, les viticulteurs veulent également arracher leurs vignes. Certains se décident à planter des kiwis ou des oliviers dans un climat toujours plus chaud. Ou à se «diversifier», un terme devenu tristement commun à Bordeaux. Mettre fin à leur production de vin et arracher leur vigne n'est certainement pas le rêve d'un vigneron, d'autant plus que ce processus coûte cher.

Vigne arrachée à Bordeaux. Les kiwis vont-ils bientôt germer ici?
Vigne arrachée à Bordeaux. Les kiwis vont-ils bientôt germer ici?Image: Stefan Brandle

Le ministre veut mettre la main à la pâte

Lors des récentes manifestations à Bordeaux, les viticulteurs ont exigé des primes d'abandon de la part des autorités. En réaction, le ministre français de l'Agriculture Marc Fesneau a annoncé, le 6 février, que son pays, ainsi qu'un fonds agricole de l'UE, aiderait les agriculteurs bordelais à arracher leurs vignes.

Parallèlement, Paris met à disposition 160 millions d'euros qui doivent permettre de réduire les stocks de vin: dès la prochaine récolte en octobre, les excédents seront distillés. Aussi triste que cela puisse paraître, les vignes bordelaises deviennent ainsi de l'alcool industriel, des parfums ou du bioéthanol. Les noms prestigieux de la filière de la région veillent tout de même à ce que ce programme de distillation ne soit pas mis sur le devant de la scène. Personne ne doit se demander si un premier grand cru et un gel de désinfection ont la même origine.

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