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Loyers: les Suisses ont payé 100 milliards de trop depuis 2006

Mehrfamilienhaeuser in der Stadt Zuerich, aufgenommen am Montag, 6. Maerz 2023. Die Wohnungen in Züuerich sind knapp, die Leerstandsquote in der Stadt betraegt 0,07 Prozent. (KEYSTONE/Ennio Leanza)
Les logements à louer se font rare en Suisse - et toujours plus chers.Image: KEYSTONE

Les Suisses auraient payé plus de 10 milliards de loyer en trop en 2023

Les loyers sont en constante augmentation depuis des années. Comment des calculs de rendement complexes et des situations juridiques floues permettent d'accumuler beaucoup d'argent avec les loyers.
31.01.2024, 14:55
Carlo Natter
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Dans le canton de Vaud, de nouveaux locataires portent plainte en 2019 contre le loyer initial de leur appartement de 4,5 pièces. Celui-ci serait abusif, car il permettrait d'obtenir un rendement trop élevé. Un loyer est considéré comme abusif dès que ce rendement est supérieur à plus 0,5% du taux d'intérêt de référence.

Le tribunal des baux donne raison au plaignant et réduira le loyer de 2190 à 900 francs. Le tribunal cantonal vaudois confirme cette décision. Mais le bailleur, une caisse de pension, fait appel du jugement auprès du Tribunal fédéral.

Taux de référence
L'Office fédéral du logement (OFL) publie chaque trimestre le taux d'intérêt de référence hypothécaire. Celui-ci se compose de l'intérêt moyen sur toutes les hypothèques accordées en Suisse et est arrondi au quart de pour cent. Si le taux d'intérêt de référence augmente, les loyers augmentent également et inversement.

Le 26 octobre 2022, un juge fédéral de l'UDC, deux du PLR et du Centre statuent sur le cas et donnent partiellement raison au locataire. Le loyer est fixé à 1390 francs au lieu de 900. La décision du Tribunal fédéral s'appuie sur une intervention encore en suspens au Parlement du conseiller national PLR Olivier Feller. Avec cet arrêt, le TF modifie sa jurisprudence actuelle sur le calcul du rendement net autorisé sur les loyers - sans attendre une décision du Parlement.

Au final, l'arrêt du Tribunal fédéral relève le rendement autorisé sur les loyers, de 0,5 à 2% au-dessus du taux d'intérêt de référence, tant que ce dernier est inférieur à 2%.

Les loyers devraient être plus bas

Une étude du bureau d'études de politique du travail et de politique sociale (BASS), sur l'évolution et les rendements du marché du logement locatif, confirme que les loyers en Suisse sont généralement beaucoup trop élevés. L'étude conclut qu'en 2021, le loyer moyen était surévalué de près de 370 francs par mois.

Mais quelle est la situation aujourd'hui? Il s'est passé beaucoup de choses depuis. Le plus marquant est sans doute le doublement du taux d'intérêt de référence, qui n'a fait que baisser depuis son introduction en 2008. Au début des calculs BASS 2005, qui ont été mis à jour en exclusivité pour watson, les loyers évoluaient à peu près comme prévu et étaient même plus bas que le prix attendu en 2008.

Mais depuis 2009, l'indice des loyers prévu ne cesse de baisser, alors que les loyers réels augmentent constamment. En 2023, le loyer était donc de 124,8 au lieu de 94,7. La comparaison avec l'indice des prix à la consommation montre que les loyers ont augmenté bien plus que les autres biens et services au cours de la même période.

Indice des loyers
L'indice des loyers se base sur les loyers nets après déduction de tous les frais accessoires. L'échantillon utilisé par l'Office fédéral de la statistique pour calculer les loyers moyens comprend les loyers des contrats de longue durée ainsi que les nouveaux loyers. Chaque année, une partie de l'échantillon est remplacée. L'échantillon comprend environ 10'000 logements locatifs répartis dans toute la Suisse.
Le calcul du loyer attendu est visible dans l'étude du bureau BASS.

L'examen de la redistribution montre comment cet écart entre l'indice réel et l'indice escompté se répercute sur les loyers. En d'autres termes, combien de locataires ont trop payé aux bailleurs. En chiffres absolus, la redistribution s'élève à plus de 100 milliards de francs depuis 2006, soit 5,8 milliards par an.

Concrètement, cela signifie qu'en 2023, les locataires ont payé environ 10,6 milliards de francs de loyer en trop, soit 34%. La redistribution entre locataires et bailleurs s'élève en moyenne à 4350 francs par logement en 2023, soit 360 francs par mois, un léger recul de 10 francs par mois depuis 2021. Toutefois, cette situation est principalement due au taux d'intérêt de référence plus élevé, car les loyers continuent d'augmenter.

Paradoxe du rendement

Début décembre 2023, le taux d'intérêt de référence est passé à 1,75%, ce qui signifie que les bailleurs peuvent désormais obtenir un rendement net de 3,75%. Mais si le taux de référence continue à augmenter, ce qui implique théoriquement une hausse des loyers, le rendement net autorisé retombe à la valeur d'avant l'arrêt du Tribunal fédéral d'octobre 2022, soit 0,5%.

Si le taux de référence continue à évoluer à la hausse, nous nous retrouverons potentiellement dans une situation où les rendements autorisés baisseront de plus de 1%, rendant sans doute une grande partie des loyers abusifs, s'ils ne le sont pas déjà.

Quand un loyer est-il abusif?

Mais quand un loyer est-il réellement abusif? «C'est très compliqué, dit Fabian Gloor, juriste et conseiller juridique à l'association des locataires. Mais en principe, un loyer est abusif lorsqu'il permet d'obtenir un rendement trop élevé.» Actuellement, un rendement maximal de 3,75% est autorisé pour les loyers.

Mais pour comprendre comment se compose un loyer, il est important de comprendre comment les loyers sont calculés. Fabian Gloor explique:

«Pour les biens immobiliers de moins de dix ans, c'est le rendement brut qui s'applique. Ici, les loyers bruts sont comparés aux fonds propres. Pour les biens immobiliers construits il y a 10 à 30 ans, c'est le rendement net qui compte. Les loyers nets et les fonds propres sont alors opposés. Autrement dit, les charges ne sont pas prises en compte dans le calcul. Enfin, il reste les bâtiments de plus de 30 ans. Dans ce cas, c'est l'usage local et de quartier qui s'applique - les loyers sont donc adaptés selon le principe des loyers du marché à des objets loués similaires dans le voisinage».
Fabian Gloor, juriste à l'association des locataires

C'est donc compliqué. Mais c'est précisément là que les locataires peuvent intervenir, car ces variantes ne doivent pas être mélangées. «Si une augmentation de loyer a lieu sur la base du taux de référence et qu'elle est conforme aux usages locaux et de quartier, elle est par exemple abusive», relève Fabian Gloor.

David contre Goliath

Mais le fait est que le contrôle du rendement repose uniquement sur les locataires, il n'y a pas d'instance de contrôle étatique. De plus, les logements vides sont rares. Dans toute la Suisse, et plus particulièrement dans les villes, les locataires doivent presque s'estimer heureux de trouver un logement. «C'est pourquoi de nombreux locataires hésitent à contester le loyer initial», estime Fabian Gloor.

Le problème des loyers est très complexe et les locataires doivent avoir une connaissance approfondie du droit de la location pour pouvoir identifier les loyers abusifs et s'y opposer.

«En ce qui concerne le rendement net en particulier, l'obstacle est très élevé, car la charge de la preuve incombe aux locataires. Il faut donc présenter des factures basées sur des documents tels que le capital propre ou les frais annexes, que les propriétaires refusent souvent de fournir, explique Fabian Gloor. A cela s'ajoutent des frais de justice potentiellement élevés, que tous ne peuvent pas se permettre de payer facilement.»
Fabian Gloor, juriste à l'association des locataires.

Conclusion: les loyers ont augmenté de près de 32% de plus qu'attendu, en tenant compte des facteurs de coûts pertinents et du droit du bail en vigueur. En 2023, les locataires en fin de bail ont payé en moyenne 360 francs de loyer en trop - par mois. La pénurie de logements et la complexité de la situation juridique font que la contestation de loyers abusifs par les locataires est un obstacle majeur. Il manque toujours un contrôle des loyers par l'Etat.

Ce quoi ce trend de riches qui dansent dans leur manoir?
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