«Ils viennent dans nos lits!» Des serpents terrorisent le Bangladesh
Cachés au pied des plantations, ondoyant dans les rues ou enroulés sur les lits, ils sont partout. Avec la mousson estivale, les serpents sont de retour en nombre dans les villages du Bangladesh, avec leur cortège de morsures... et de peurs.
Dans le village de Rajshani (nord), baigné par le fleuve Padma, Sree Ananda Mondol, 35 ans, ne leur a pas échappé. Et il en tremble encore. Il raconte:
Une morsure qui aurait pu être fatale
Rapidement admis à l'hôpital du district, il a passé trois jours en soins intensifs avant de rentrer chez lui. Il se souvient:
Ces dernières semaines, ces incidents parfois mortels sont devenus monnaie courante dans la région, à plus d'une centaine de kilomètres au nord-ouest de la capitale Dacca.
La hausse des morsures est attribuée pêle-mêle par les experts aux fortes pluies de cette saison de mousson, au changement des pratiques agricoles et à l'urbanisation.
De nombreux témoignages
Rezina Begum, habitante d'un village voisin, témoigne en lavant son linge dans le fleuve:
Mohammad Bablu, 56 ans, renchérit:
Les brûlis des rizières servent de refuge à de nombreuses espèces de serpents, surtout lorsque les pluies de la mousson gonflent le cours des fleuves.
A l'hôpital universitaire de Rajshahi, le Professeur Abu Shahin Mohammed Mahbubur Rahman a compté 25 morts par morsures depuis le début de l'année. Il explique:
Des écosystèmes bouleversés
En 2024, les autorités sanitaires avaient recensé 118 morts par morsure de serpent sur l'ensemble du territoire, un record. Cette année, on dénombre déjà 84 décès.
La résurgence de la vipère dite de Russell est particulièrement redoutée. Un temps considérée comme disparue, cette espèce est réapparue en 2013 et cause de plus en plus de victimes. Le zoologue Farid Ahsan, de l'université de Chittagong, décrit:
Leur multiplication cette année est d'abord liée aux précipitations abondantes, diagnostiquent les experts. La région de Rajshahi a reçu de mai à septembre 1.409 mm de pluies, bien plus que les 1.175 mm d'une saison normale.
Le bouleversement des écosystèmes favorise également la prolifération des reptiles. L'expert Gowhar Naim Wara prend note:
La hausse de la production agricole, avec désormais trois récoltes de riz annuelles au Bangladesh, a en outre causé la prolifération des rongeurs qui s'en nourrissent et de leurs prédateurs, donc des serpents, souligne Farid Ahsan.
Un anti-venin, mais pas avant trois ans
La hausse des morsures a d'ores et déjà contraint les hôpitaux du pays à renforcer en urgence leurs stocks de sérums anti-venin, comme l'affirme un responsable du ministère de la Santé et de la Famille, Md Sayedur Rahman:
Les autorités ont aussi lancé la mise au point d'un sérum adapté au venin des vipères de Russell. Mais il ne sera pas disponible avant trois ans. En attendant, les habitants des villages tentent de limiter les risques de morsures par la seule prévention: ils ne se déplacent plus qu'avec des bâtons, en pantalons et en bottes. Pas de quoi les rassurer, comme le répète Mohammad Bablu: