Donald Trump ne se laisse pas abattre, même lorsqu'il a des problèmes juridiques. Ainsi, l'ex-président ne s'est pas contenté de rendre publique jeudi son inculpation devant un tribunal fédéral qui, notons-le, est déjà la deuxième procédure pénale ouverte cette année contre le républicain.
En effet, Trump a également émis un appel aux dons. Il s'y plaint amèrement de la «chasse aux sorcières» que le ministère de la Justice a lancée contre lui. Selon l'ex-président, celui-ci est contrôlé par son adversaire politique Joe Biden. Et Trump demande maintenant à ses partisans de protester contre son inculpation en lui donnant de l'argent.
Cette stratégie pourrait trouver un écho auprès de la base du parti républicain, du moins à court terme. Lorsque Trump a été inculpé, au printemps, à New York, pour avoir payé le silence d'une actrice pornographique, il a encaissé des millions de dollars et a progressé dans les sondages d'opinion. Ses fans continuent de croire l'ex-président lorsqu'il affirme que le «Deep State» – une conspiration de puissants démocrates et républicains à Washington – s'en prend à lui.
Mais les procédures judiciaires ne se gagnent pas à l'aide de campagne d'emails. Selon des milieux bien informés, certaines des accusations contre Trump sont lourdes et ne peuvent pas être effacées par une jolie phrase ou un slogan désinvolte.
Voici, en bref, les accusations du procureur spécial Jack Smith: après son départ de Washington, Trump se serait emparé de documents gouvernementaux alors qu'il n'en avait pas l'autorisation. Parmi ceux-ci se trouvaient, selon le FBI, des documents top-secret – il était question dernièrement d'un plan d'attaque du Pentagone contre l'Iran, dont Trump a cité des passages.
Pire encore: Trump aurait menti à des services gouvernementaux au sujet de ces documents. Il aurait ainsi fait savoir au service national des archives qu'il avait restitué toutes les pièces du dossier. Mais une perquisition de la police fédérale, à l'été 2022, a montré que c'était clairement un mensonge.
Bien entendu, les avocats de Trump présenteront des arguments à sa décharge. Ainsi, il y a effectivement des questions sur la marge de manœuvre dont dispose le service des archives qui ne sont pas résolues – peut-il vraiment traîner un président en justice si celui-ci ne veut pas restituer certains dossiers? Et est-il permis d'accuser Trump d'obstruction à la justice dès qu'il se défend contre les accusations des autorités d'enquête?
Comme le procès doit se dérouler à Miami (Floride), loin de la capitale, Washington, il n'est pas exclu que certains jurés prêtent foi à l'ex-président.
D'autre part, comme c'est souvent le cas avec Trump, toute cette histoire est largement sans précédent. Et c'est là que le bât blesse. Aucun autre ex-président dans la longue histoire des Etats-Unis n'a encore été mis en accusation. Aucun candidat à la présidence d'un grand parti américain n'a dû se défendre, dans une salle d'audience, contre l'accusation d'avoir enfreint une loi anti-espionnage et d'avoir fait preuve d'une négligence grossière dans la conservation de dossiers gouvernementaux top-secret.
Malgré sa complaisance dans son rôle du combattant solitaire contre l'autorité de l'Etat, cette nouvelle inculpation ne doit pas réjouir Trump. Elle met en lumière son point faible: son imprévisibilité. Il était parfois rafraîchissant que Trump remette en question les compromis boiteux des démocrates et des républicains, mais il est inquiétant qu'il mette en danger la sécurité du pays parce qu'il ne veut juste pas respecter des règles élémentaires.
Le fait est que si Trump veut revenir à la Maison-Blanche après les élections de l'année prochaine, il devra séduire des électeurs qu'il avait laissés de côté en 2020. Un procès à Miami portant sur des mensonges et des plans d'attaque secrets contre l'Iran ne l'y aidera pas.
Traduit et adapté de l'allemand par Léa Krejci