Un micmac électoral qui tombe très mal. Jeudi 19 janvier, la gauche semblait unie comme jamais pour s'opposer avec poigne à la réforme des retraites, enfantée par le gouvernement Macron. Dans les rues, des élus bras dessus, bras dessous, une mobilisation record et en colère, des syndicats étonnamment au diapason et un message clair.
Pourtant, quelques heures plus tard à peine, réuni en congrès, le Parti socialiste (PS) reprenait les armes pour se disputer violemment la tête du parti. Deux camps, deux ennemis et surtout deux visions d'avenir. Olivier Faure, premier secrétaire sortant, croit toujours à cette nouvelle gauche élargie et bigarrée. De l'autre, Nicolas Mayer-Rossignol, maire de Rouen, peu excité par l'existence de la Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes).
Les 41 000 adhérents clivés du PS devaient donc choisir leur nouveau capitaine, mais aussi le sens du vent. Raté: au beau milieu de la nuit, les deux candidats ont revendiqué publiquement la victoire. Vendredi à l'aube, dans la peau d'un arbitre chargé d'afficher une paix retrouvée, le service de presse du PS annonçait Olivier Faure élu à 50,83%.
Y a-t-il eu quelques anicroches dans le scrutin? Peut-être. Mais l'important est ailleurs et malheureusement pas où le Parti socialiste devrait avoir le courage de mettre enfin les doigts: son image et ses fondations.
Cette élection, comme le crêpage de chignon juridique qui lui a emboîté le pas, démontre une énième fois qu'il y a deux philosophies méchamment irréconciliables au cœur du parti.
Les deux camps s'accusent mutuellement d’irrégularités, proférant des menaces stériles d'annulation de vote dans certaines sections du clan - avec, pour seul résultat, d'endommager encore un peu plus la crédibilité du PS. Dans le pays et, plus grave encore, auprès des militants. Une ambiance qui n'a rien à envier aux gesticulations malsaines d'un Donald Trump outre-Atlantique.
Depuis la raclée historique subie par Anne Hidalgo à la dernière présidentielle (1,7%), le PS devait s'imposer un grand ménage de printemps s'il voulait prendre une grande bouffée d'avenir. Quitte à faire semblant de fricoter de manière consentante avec une extrême gauche mélenchoniste instable et gueularde.
Dans ces conditions tempétueuses et les semaines à venir, Olivier Faure a tout intérêt à confirmer sa casquette de capitaine. La Nupes serait certes en péril en cas d'élection surprise de Nicolas Mayer-Rossignol. Mais sans cette «tutelle», le Parti socialiste est, pour l'instant, incapable de naviguer sans s'enfoncer dans un naufrage malheureux.
Alors que ça fait un bail que les Français, angoissés par le futur et en rogne contre le pouvoir, n'avaient pas eu autant besoin d'une gauche historique forte et rassembleuse.