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La chute du gourou Didier Raoult, l'ex-roi de la chloroquine

French virologist Dr. Didier Raoult, who has pushed aggressively for widespread use of anti-malaria drug hydroxychloroquine for virus patients, arrives before being questioned in a parliamentary inqui ...
Didier Raoult, 24 juin 2020.Image: AP

La chute du gourou Didier Raoult, ex-roi de la chloroquine

Au temps de sa superbe, il avait prédit la disparition du Covid-19 et fait venir Emmanuel Macron dans son fief de Marseille: le professeur Didier Raoult affronte aujourd'hui la justice. Avec lui, on ne s'est vraiment pas embêté.
07.09.2022, 18:5508.09.2022, 08:51
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Didier Raoult, c’est le Saddam Hussein de la guerre du Covid. Seigneur en son IHU de Marseille comme autrefois le raïs en son palais de Bagdad. Une brute pour ses collaborateurs, un bienfaiteur pour ses adorateurs. Un danger pour l’Etat. Défié par ce puissant non-aligné, rang de professeur, blouse blanche de savant, une dégaine de biker, l’Etat, avec sa grosse majuscule, a lancé l’assaut. Le palais est tombé, bientôt celui qui fut le roi de la chloroquine, cet antipaludique qui devait terrasser le coronavirus, aura la corde au cou. C’est une question de procédure.

L’invasion de l’Irak en 2003 par les Etats-Unis avait été précédée d’accusations mensongères, selon lesquelles Saddam Hussein possédait des armes de destruction massive. Gageons que les partisans du professeur, 70 ans, ne tiendront aucun compte des pièces rassemblées contre son IHU, son Institut hospitalo-universitaire, du temps où il en était le directeur à vie.

Des «dysfonctionnements graves»

Une information judiciaire a été ouverte. La justice marseillaise va voir s’il y a lieu de poursuivre. Le rapport sur lequel se fondent ses soupçons est qualifié d’«accablant». Il est fait état de «faux» et «usage de faux», de «dysfonctionnements graves». Sont pointées des pratiques «ne respectant pas la réglementation et pouvant générer un risque sanitaire pour les patients, notamment au cours des protocoles de recherche», des «dérives dans les pratiques de management, pouvant générer harcèlement et mal-être au travail», des «dérives dans la gouvernance, qui ne respecte pas strictement les règles encadrant les fondations de coopération scientifique».

Didier Raoult – quittons Bagdad pour le Las Vegas de Martin Scorcese – se retrouve dans la position inconfortable du directeur de casino à qui des individus qui l’ont placé là viennent demander des éclaircissements:

«Qu’est-ce qui se passe, Didier? On ne comprend pas, explique-nous»

L'heure de la vengeance a sonné

Il n’y a pas pire vengeance que celle menée par ceux qui ont la conviction de s’être fait rouler dans la farine. Emmanuel Macron doit en vouloir à Didier Raoult comme à lui-même d’avoir fait le déplacement à Marseille le 9 avril 2020. Ce jour-là, ignorant comme à son habitude les mises en garde, le chef de l’Etat avait rendu visite au professeur à la coupe hippie et aux chemises à carreaux, fausse coolitude pour vraie mégalomanie, le combo des gourous. En plein confinement, les morts encombrant les morgues, les malades accaparant les respirateurs, l’hôte marseillais, dont l’étoile commençait à pâlir dans les cabinets ministériels, mais dont la cote demeurait élevée dans une bonne partie de l’opinion, savourait ce moment.

Jusque-là, Didier Raoult, microbiologiste, découvreur de bactéries, ponte des épidémies, l’expérience de l’Afrique, des dizaines d’articles dans des magazines scientifiques prestigieux, la jauge des très grands, avait pour ainsi dire tout juste: chacun voulait croire à la chloroquine, ce remède miracle qu’il proposait comme une évidence, ce qui déplaisait à ses confrères détestant être pris de court.

Quand il prédisait la disparition du coronavirus

Et puis, comme le rappelle Libération dans un portrait daté du 15 juin 2021, en référence au livre des journalistes Ariane Chemin et Marie-France Etchegoin, «Raoult, une folie française», c’est lui qui, au début de l'épidémie, à raison, pousse à dépister et dépister encore, lui qui trouve des tests, empruntés au réseau des vétérinaires, quand le ministère de le Santé lambine tel un empoté. Et il faudra un temps fou, avant que la médecine française, qui manquera le train des vaccins, n’apporte la preuve de l’inefficacité de la chloroquine pour guérir du Covid-19 – souvenons-nous: invoquant la morale, Didier Raoult refusait de tester l’antipaludique en recourant à des placebos, comme il est de rigueur dans toute étude clinique.

Les faux dons divinatoires du professeur, interrogé sur les prévisions covidaires par les chaînes info, elles à Paris, lui à Marseille, le dos calé sur son siège de bureau pivotant et se tenant la barbe tel un important, ont passablement contribué à sa décote progressive auprès des Français, excepté chez les complotistes. Au printemps 2020, qualifiant le coronavirus de saisonnier, il avait prédit la fin de l’épidémie dans les «pays tempérés», autrement dit, chez nous. Elle avait rebondi de plus belle à l’automne, plus meurtrière encore.

C'est un autre qui est dans le fauteuil

Ce sont de possibles «délits» et «manquement graves» que les ministères de la Santé et de la Recherche reprochent à l'ancien roi de la chloroquine. La justice est saisie. C'est l'un de ses anciens disciples qui occupe à présent le siège pivotant d'où Didier Raoult a longtemps joué au plus malin.

Un yacht de 40 mètres sombre en Méditerranée
Video: watson
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