Imaginez: vous faites l'amour avec Donald Trump, au terme d'une soirée bien arrosée sur un terrain de golf au bord du lac Tahoe. Et quinze ans plus tard, vos ébats se trouvent toujours au cœur de l'actualité.
C'est ainsi que l'on pourrait résumer les prémices de l'interminable feuilleton judiciaire qui noue le milliardaire et la reine du porno américaine, Stormy Daniels. Une affaire vieille de vingt ans et qui vaut aujourd'hui à Trump son tout premier procès pénal.
En 2006, Stormy Daniels rencontre celui qui n'est encore qu'un magnat de l'immobilier milliardaire, et pas encore le président des Etats-Unis, à l'occasion d'un tournoi de golf en Californie. Le soir même, Donald Trump convie la blonde à dîner. Vous connaissez la suite. Eux, en revanche, s'accordent moins sur le déroulé de la soirée. Si Stormy Daniels évoque la «relation sexuelle la moins impressionnante de sa vie» dans son autobiographie, l'intéressé nie toujours en bloc avoir échangé le plus insignifiant rapport sexuel.
Dix ans plus tard, à quelques semaines de l'élection présidentielle de 2016, l'affaire menace d'être révélée dans la presse et d'éclabousser le candidat. L'avocat de Donald Trump, Michael Cohen, met alors tout en œuvre pour protéger son client. Pour faire taire Stormy Daniels, il admettra avoir posé 130 000 dollars sur la table - une somme que Donald Trump lui aurait remboursée en détournant des comptes de son entreprise, la Trump Organization.
En 2018, le Wall Street Journal révèle l'affaire du «paiement silencieux». Au-delà de la liaison elle-même, c'est surtout la somme déboursée qui soulève des discussions. Doit-elle être considérée comme une dépense de campagne, au même titre qu'une banderole rouge ou que les petits fours servis pendant les meetings? De mensonges en révélations, l'affaire s'emballe et prend une tournure judiciaire. Accusé d'avoir violé la loi sur le financement des campagnes présidentielles, Donald Trump encourt jusqu'à 4 ans de prison.
Un temps abandonnée, l'enquête a été relancée en novembre 2022 par le procureur général de New York, Alvin Bragg. Le juge, décrit comme un «audacieux», espère être celui qui trouvera la faille capable de coincer, enfin, le turbulent et inarrêtable ex-président des Etats-Unis.
Depuis, plusieurs témoins privilégiés du «paiement silencieux» ont défilé devant le procureur Bragg et le grand jury, précise le New York Times. Parmi eux: David Pecker, ancien rédacteur en chef du National Enquirer, tabloïd qui aurait aidé Michael Cohen à négocier le paiement, ainsi que d'anciens membres du personnel de la Trump Organization et de l'équipe de campagne de 2016.
Donald Trump, pour sa part, aura mis en oeuvre toutes les manoeuvres possibles et imaginables pour retarder le lancement du procès. Cette semaine, il n'y coupera pas. La première audience se tiendra le 15 avril à Manhattan, avec la sélection du jury.
Pour l'ancien président, qui fait face à quelque 34 chefs d'accusation pour falsifications de documents commerciaux, rien n'est moins sûr qu'une condamnation. Pour sa part, il continue de nier en bloc tout acte répréhensible - de sa connaissance du paiement, à sa liaison d'un soir avec une star du porno.