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Elizabeth II

70 ans de règne d'Elizabeth II: Churchill faisait sauter la Reine

Retour sur les premières années de règne de la reine Elizabeth II.
Retour sur les premières années de règne de la reine Elizabeth II.image: flickr
Elizabeth II

«Ils riaient aux éclats»: quand Churchill faisait sauter la Reine sur ses genoux

Dans ce deuxième épisode de notre série à l'occasion du jubilé de la reine Elizabeth II, nous revenons désormais sur les premières années de règne de la jeune monarque. Elles sont marquées par un personnage légendaire: Winston Churchill.
31.05.2022, 18:5501.06.2022, 08:48
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Ce jour de juin 1953, Elizabeth II se ronge les sangs. Trois semaines plus tôt à peine, la jeune femme de 26 ans a été sacrée reine d'Angleterre. Ce n'est cependant pas tant cette perspective (assez vertigineuse) qui l'inquiète, que l'absence de son premier ministre, Winston Churchill.

Churchill lui a fait savoir qu'il est malade. La semaine précédente, il a prétexté un rhume pour manquer leur rendez-vous hebdomadaire. Cette semaine, c'est une grippe.

Il n'est pas dans l'habitude du «Vieux Lion» de manquer leur rendez-vous sacré du mardi, qu'il attend d'habitude avec impatience. Un moment d'une grande solennité, mais aussi source de plaisir, voire d'hilarité. Derrière la porte close, le personnel de Buckingam Palace perçoit souvent les rires des deux comparses, comme le raconte le secrétaire privé de la reine, Tommy Lascelles:

«Je n’entendais pas ce dont ils parlaient, mais ces réunions étaient systématiquement ponctuées de grands éclats de rire, et Winston en sortait régulièrement en s’essuyant les yeux»

«Je crois qu’il a ressenti un grand sens du devoir à son encontre et je sais qu'il attendait ses rendez-vous du mardi après-midi», abonde la fille de l'ancien premier ministre. Censé durer une demi-heure, le rendez-vous hebdomadaire se prolonge parfois pendant plus de deux heures.

Churchill veille sur elle depuis ses deux ans

Dès la mort prématurée de son père, le roi Georges VI, l'année précédente, Winston Churchill, 78 ans, s'est quasiment imposé comme une figure paternelle de substitution pour «Lilibeth».

Qui d'autre que l'une des figures politiques les plus marquantes du 20e siècle pour servir de conseiller à la jeune reine? Silhouette légendaire, bedaine replète, chapeau melon et cigare au bec, cinquante ans de politique dans les pattes, une expérience de chef de guerre, une aura de héros, des talents d'orateur, de peintre, d'écrivain et un prix Nobel de la littérature à son actif. Bref, le mentor tout désigné.

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Et il faut dire que tous deux se connaissent depuis toujours, ou presque. La première fois que Churchill a posé les yeux sur Elizabeth, c'est une enfant de deux ans et demi qui grimpe sur ses genoux. Cette petite fille brune, espiègle et charismatique, le charme d'emblée:

«C’est un vrai personnage. Elle a un air d’autorité et de sagacité étonnant chez un tout-petit»
Winston Churchill dans une lettre à son épouse Clementine

Des passions communes

Un lien très profond se noue entre les deux comparses. «Il l’aime, il l’adore, il voit en elle de très grandes qualités», confirme un témoin. Une admiration partagée par la jeune femme, malgré les défauts d’aristocrate indomptable et fantasque de Churchill. Avant même de collaborer politiquement, ce duo improbable partage plusieurs passions communes. A commencer par... le cheval.

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Une passion commune à l'origine de quelques taquineries. En 1950, Colonist II (le cheval de Churchill) bat Above board (celui du roi), il écrit à Elizabeth:

«J’aurais évidemment aimé que nous gagnions tous deux, mais cela ôterait toute la palpitation excitante du turf»

Parmi leurs autres points communs, tous deux ont goûté à l'exercice du pouvoir très tôt, à l'âge de 25 ans. Ils partagent aussi cette propension à la longévité: Elizabeth détient le record du règne le plus long de l'histoire du Royaume-Uni et Churchill celui du premier ministre britannique ayant enchaîné le plus de mandats.

Un soutien de taille

Le 11 février 1952, quelques jours après le décès abrupt de son ami, le roi Georges VI, Winston Churchill clame à la chambre des Communes:

«A l’orée de ce nouveau règne, nous ne pouvons tous que prendre conscience de notre contact avec l’avenir. Une figure jeune et charmante – princesse, épouse et reine – est l’héritière de toutes nos traditions et de toutes nos gloires […]. Elle est également l’héritière de toutes nos capacités d’unité et de fidélité.»

De ce fait, l'ancien héros de la Seconde Guerre mondiale joue un rôle fondamental dans la transmission du pouvoir d’un monarque à l’autre. Entre la mort du père d'Elizabeth et son couronnement quinze mois plus tard, il endosse la casquette de professeur et de guide.

D’emblée, le vieux monsieur cherche à intégrer sa pupille dans l’histoire du royaume. Car derrière des manières et un physique assez rustres, Churchill cultive savamment sa passion pour l'aristocratie et la monarchie. La perspective de marquer de sa paluche l'ouverture d'une nouvelle ère, un «âge d'or élisabéthain», n'est pas pour lui déplaire.

Le politicien chevronné initie la jeune femme aux subtilités du système britannique, à ses particularités. Une règle, une seule, doit être absolument respectée: Elizabeth II doit faire preuve d'une neutralité totale.

Ainsi, les élus s'abstiennent de poser la moindre question politique à la reine:

«Car si elle répond et que sa réponse est impopulaire, toute la magie de notre système est détruite»
Sir Andrew Turnbull, membre de la chambre des lords

Trois ans après sa montée sur le trône, Winston Churchill prend sa retraite, le 4 avril 1955, à l'âge honorable de 80 ans. Un coup pour Elizabeth. Pourtant plutôt du genre réservée, elle lui adressera une missive débordante d’émotion:

«Aucun autre jamais ne pourra prendre la place qu’a occupé mon premier Premier ministre, déclare la reine Elizabeth. Mon mari et moi-même lui devons énormément et je suis serai éternellement reconnaissante pour son aide durant mes jeunes années de reine»

Dix ans plus tard, le 24 janvier 1965, Winston Churchill décède des suites d'un accident vasculaire cérébral. Très affectée par sa disparition, Elizabeth II demande à son nouveau premier ministre, le travailliste Harold Wilson, des funérailles nationales.

Depuis lors, la reine a collaboré avec pas moins de quatorze Premiers ministres. Si elle développe avec eux des relations plus ou moins proches, il ne fait aucun doute que le premier l'aura marqué plus que les autres et forgé pour toujours sa conception de la monarchie.

Rendez-vous demain pour notre troisième épisode!

Sans filtre, extrait du film de Ruben Östlund
Video: watson
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