Il y a cinq kilomètres à vol d'oiseau entre Värtsilä, en Russie, et Niirala, en Finlande. Mais si les habitants des deux localités souhaitent se rendre visite, cela prend désormais plus de 24 heures en voiture. Pour cause, ils doivent parcourir 2000 kilomètres.
Quatre postes de douane sur neuf, dont celui de Niirala, sont fermés depuis une semaine. Ce vendredi, il y a eu trois autres fermetures. Cela signifie qu'un seul poste-frontière finlandais est encore ouvert, et c'est le plus au nord: Raja-Jooseppi, en Laponie.
Une Russe qui vit en Finlande a récemment déclaré à la chaîne de télévision allemande ARD qu'elle devait désormais faire un énorme détour pour rejoindre sa mère malade dans son pays d'origine. Plusieurs cartes circulant sur Internet illustrent la situation et il faut bien reconnaître que le tracé est plutôt cocasse:
After Finland 🇫🇮 closed the border checkpoints with russia, the shortest route from St. Petersburg to Helsinki has extended to approximately 1400 km.
— Maria Drutska 🇺🇦 (@maria_drutska) November 24, 2023
Here's what it looks like now. pic.twitter.com/nJN3pNAHDa
La fermeture des postes-frontière a été décidée par mesure de prévention. Face à l'immigration clandestine croissante, la Finlande voit sa sécurité intérieure menacée. D'ailleurs le dernier poste-frontière encore ouvert va fermer dans la nuit de mercredi à jeudi. Le pays nordique accuse Moscou d'orchestrer une crise migratoire.
Au cours des dernières semaines, des centaines de réfugiés sont entrés illégalement en Finlande et y ont demandé l'asile. Les migrants viennent principalement du Moyen-Orient, d'Afrique, d'Irak et du Yémen. Ils ont traversé les frontières russes à vélo, car la réglementation russe interdit de franchir la frontière à pied.
Aux yeux du Premier ministre finlandais Petteri Orpo, la Russie est responsable de cette situation. En conférence de presse la semaine dernière, il s'est montré critique envers la politique migratoire russe. Orpo a affirmé que Moscou transporte en bus des personnes sans documents de voyage valides jusqu'à la frontière finlandaise. Le chef du gouvernement accuse la Russie de maltraiter les réfugiés afin de déstabiliser la Finlande. Il parle de «guerre hybride».
Helsinki a rejoint cette année l’Otan en raison de la guerre en Ukraine. La frontière extérieure de l’alliance avec la Russie a donc plus que doublé. En raison de la situation géographique du pays scandinave et de ses forces armées bien équipées, l'Otan estime qu'elle sera à l'avenir en mesure de mieux défendre les Etats membres que sont l'Estonie, la Lituanie et la Lettonie en cas d'attaque russe.
La réaction russe ne s'est pas fait attendre. Moscou a mis en garde la Finlande contre des «contre-mesures». Le gouvernement finlandais estime donc que les flux organisés de réfugiés font partie de ces «contre-mesures». Une vendetta russe dans laquelle les migrants sont bousculés comme des pièces d’échecs sur un plateau de jeu.
La Russie rejette cependant cette accusation comme étant «infondée». La Finlande diffuse de «fausses informations» et favorise des «sentiments russophobes», a affirmé le ministre russe des Affaires étrangères.
En fin de compte, ceux qui souffrent de ce conflit ne sont pas seulement les habitants des zones frontalières qui doivent régulièrement passer de l'autre côté, mais surtout les réfugiés.
Le week-end dernier, des scènes de désolation se sont produites devant les douanes fermées. Comme le montrent les vidéos, les réfugiés tentaient toujours de traverser les frontières fermées à vélo. Des échauffourées ont eu lieu entre migrants et soldats finlandais.
Swarms of third world illegal migrants have mysteriously appeared at the Russia/Finland border on stolen bicycles attempting to enter Finland without permission. The Finn's aren't having it. pic.twitter.com/bKFDphAn0r
— Dane (@UltraDane) November 18, 2023
Pendant ce temps, de nombreux autres tentent de traverser le seul poste-frontière ouvert de Finlande: Raja-Jooseppi. Ce qui n'est pas sans danger.
La douane est située au-dessus du cercle polaire arctique en Laponie. Par moins 20°C et dans des vêtements beaucoup trop fins, les migrants - y compris des enfants - enfourchent leurs vélos sur les routes enneigées des étendues sauvages de la Russie jusqu'en Finlande.