Il a été expulsé par les autorités du Népal après y avoir passé 20 ans en prison pour le meurtre de deux touristes nord-américains.
Soupçonné d'une vingtaine de meurtres dans les années 1970 en Asie, celui qui a inspiré une série diffusée sur Netflix est arrivé à Paris à bord d'un avion en provenance de Doha (Qatar). Il a été aussitôt pris en charge par la police, a constaté un journaliste de l'Agence France-presse (AFP) qui voyageait avec lui.
Après «vérifications d'identité», Charles Sobhraj a quitté discrètement l'aéroport, a-t-on appris de source aéroportuaire, en faisant faux bond aux nombreux journalistes qui l'attendaient.
Dans l'avion qui le conduisait à Doha, où il est arrivé en transit vendredi soir, le septuagénaire a assuré au journaliste de l'AFP qu'il était «innocent» des crimes qui lui sont reprochés.
«Je suis innocent dans tous ces dossiers, OK ? (...) Tout a été bâti sur de faux documents», a-t-il affirmé. «J'ai beaucoup de choses à faire. Je dois poursuivre de nombreuses personnes en justice, y compris l'Etat du Népal.»
«Le juge, sans interroger le moindre témoin (...) et sans permettre à l'accusé de présenter le moindre argument, a écrit le verdict», a-t-il ajouté.
«Il aura fallu plus de 19 ans pour qu'il retrouve sa liberté et j'en suis très heureuse et très choquée», a commenté devant la presse son avocate française, Isabelle Coutant-Peyre, qui est venue le chercher à l'aéroport. «Il a été condamné injustement sur un dossier fabriqué avec des pièces falsifiées par la police népalaise. C'est un scandale, on le présente comme un tueur en série, ce qui est complètement faux.»
La Cour suprême du Népal, qui a décidé sa remise en liberté mercredi, a affirmé que Charles Sobhraj avait besoin d'une opération à cœur ouvert et que cette décision était conforme à une loi népalaise autorisant la libération des prisonniers alités ayant déjà purgé les trois quarts de leur peine.
Elle a ordonné qu'il soit expulsé dans les quinze jours vers la France. Avant l'annonce de son transfèrement, le ministère français des Affaires étrangères avait de son côté fait savoir que la France l'accueillerait si une demande d'extradition lui était «notifiée».
Citoyen français de mère vietnamienne et de père indien, Charles Sobhraj a commencé à parcourir le monde au début des années 1970 et s'est retrouvé dans la capitale thaïlandaise, Bangkok.
Se faisant passer pour un négociant en pierres précieuses, il se liait d'amitié avec ses victimes, souvent des routards occidentaux sur la piste des hippies des années 1970, avant de les droguer, voler et assassiner.
Surnommé le «tueur au bikini» en 1975 après la découverte du corps vêtu d'un seul bikini d'une Américaine sur une plage en Thaïlande, cet homme a été lié à plus de 20 meurtres.
L'autre surnom de Charles Sobhraj, «Le Serpent», lui vient de sa capacité à prendre d'autres identités pour échapper à la justice. Il est devenu le titre d'une série à succès réalisée par la BBC et Netflix, qui s'inspire de sa vie.
Arrêté en Inde en 1976, il a passé 21 ans en prison, période marquée par une brève évasion en 1986 après avoir drogué les gardiens. Il avait finalement été arrêté dans l'Etat indien de Goa.
Libéré en 1997, il s'est retiré à Paris mais a refait surface en 2003 au Népal, où il a été repéré à Katmandou et arrêté. L'année suivante, un tribunal l'a condamné à la prison à vie pour l'assassinat en 1975 de la touriste américaine Connie Jo Bronzich. Dix ans plus tard, il a aussi été reconnu coupable du meurtre du compagnon canadien de Bronzich.
Nadine Gires, une Française qui vivait dans le même immeuble que Charles Sobhraj à Bangkok, a raconté l'an dernier qu'elle l'avait trouvé au départ «cultivé» et impressionnant. Mais en fin de compte, «il n'était pas seulement un escroc, un séducteur, un voleur de touristes, mais un meurtrier diabolique». (chl/ats)