Chaos en Géorgie après les élections législatives: le parti au pouvoir, le Rêve géorgien, de plus en plus autocratique et pro-russe, revendique la victoire avec près de 54% des voix. L'opposition pro-européenne accuse le parti au pouvoir de fraude et d'avoir «volé» les législatives. La commission électorale a annoncé un recomptage des votes mardi dans 14% des bureaux.
A leur côté se trouve la présidente pro-occidentale Salomé Zourabichvili, qui accuse la Russie d'avoir massivement interféré dans les élections et faussé le résultat. Avec les partis d'opposition, elle a appelé à des manifestations de masse et a exhorté les pays occidentaux à lui apporter leur soutien.
En effet, les observateurs internationaux des élections de l'Organisation pour la sécurité et la coopération (OSCE) et du Conseil de l'Europe parlent de nombreuses irrégularités. Il y aurait eu des intimidations, des achats de voix et d'autres formes d'influence.
La Suissesse Sibel Arslan, conseillère nationale (Verts/BS), était l'une des 500 observatrices et observateurs des élections.
Avec un collègue britannique, elle s'est rendue dans le quartier d'Isani de la capitale Tbilissi le dimanche des élections, de 7 heures du matin à bien après minuit. Au téléphone, elle nous explique qu'elle a notamment remarqué les nombreux jeunes électeurs et électrices qui se sont engagés pour un rapprochement de leur pays avec l'UE.
En revanche, elle ne peut pas dire si les résultats des élections sont valables ou s'ils ont été «falsifiés» comme le prétend la présidente Zourabichvili. Le rapport final de la mission d'observation n'est attendu que dans quelques jours. Selon Arslan, qui se trouve en Géorgie jusqu'à mardi, tout s'est déroulé de manière ordonnée dans les bureaux de vote qu'elle a inspectés elle-même. Elle a pu accéder partout et n'a jamais été empêchée d'exercer sa mission.
Mais ce qui l'a frappée, c'est la présence de nombreuses caméras dans les bureaux de vote. Les électeurs se sentaient épiés. Etrangement, il n'était pas toujours possible de déterminer qui avait installé les caméras, même en posant la question. L'emplacement des appareils a constitué un obstacle au respect du secret du vote.
De plus, elle a remarqué la présence de groupes d’hommes vêtus de noir, qu’elle a rencontrés à plusieurs reprises à proximité immédiate des bureaux de vote. D’autres observateurs électoraux présents sur place lui ont rapporté que ces hommes tentaient d’influencer les électeurs, bien qu’elle-même n’ait pas pu l’observer directement.
L'objectif était d'inciter les gens à glisser un scrutin en faveur du parti de leur choix. C'est surtout vers la fin des élections que ces actes se sont multipliés. Arslan estime: «Selon ces observations, il s'agissait clairement d'exercer un contrôle social». La conseillère nationale bâloise n'a pas pu dire qui étaient ces hommes et s'ils étaient payés par quelqu'un.
A Moscou, le Kremlin a démenti toute ingérence dans les affaires de son voisin du sud. Au contraire, il accuse l'Occident d'avoir exercé des pressions et tenté d'influencer le résultat.
Le premier ministre hongrois pro-russe, Viktor Orbán, joue à nouveau un rôle particulier dans cette affaire. Il a, en effet, félicité, dimanche, le gouvernement géorgien pour sa victoire, avant même la fermeture des bureaux de vote. Peu après, il a annoncé à grands bruits, un voyage à Tbilissi pour apporter son soutien au gouvernement
De son côté, la Commission européenne, à Bruxelles, a précisé qu’Orbán agissait en son nom propre en tant que chef du gouvernement hongrois et non au nom de l'UE dans son ensemble. Elle a demandé une enquête indépendante et rapide sur les irrégularités électorales.
Traduit et adapté par Noëline Flippe