«Je vous salue depuis le sol biélorusse», crie Evguéni Prigojine dans une courte vidéo diffusée mercredi 19 juillet. «Vous vous êtes bien battus, vous avez fait beaucoup pour la Russie», dit-il sur l'enregistrement face à des hommes inconnus, ses mercenaires wagnériens ou d'autres soldats.
La dernière fois que Prigojine a été vu de manière formelle, c'était il y a trois semaines et demie à Rostov-sur-le-Don, dans le sud de la Russie, non loin du Donbass et de ses fronts sanglants. Après l'interruption soudaine de sa marche sur Moscou, Prigojine est entré dans la clandestinité.
L'autocrate biélorusse Alexandre Loukachenko a affirmé peu après que son «bon collègue» Prigojine s'était brièvement rendu à Minsk, mais il n'en existe aucune preuve. Tout comme il n'existe, curieusement, aucune photo de la prétendue ne rencontre entre Vladimir Poutine et le chef des mercenaires cinq jours après sa «marche de la justice», qui n'aurait eu pour objectif que le limogeage du ministre de la Défense et de quelques généraux, et non un changement de pouvoir au Kremlin.
Prigojine n'est pas formellement identifiable dans la vidéo. Toutefois, sa voix est clairement reconnaissable et l'enregistrement a été publié sur la chaîne Telegram officielle du chef de Wagner. La mention répétée de la Biélorussie suggère que la bande sonore ne date pas d'avant la mutinerie des mercenaires. Mais il faut rappeler que le Kremlin, Loukachenko et Prigojine lui-même ont déjà fait de la propagande avec de telles vidéos.
La voix de Prigojine critique en tout cas, comme à son habitude, le commandement de l'armée russe: «Ce qui se passe sur le front est une honte». C'est pourquoi la décision a été prise de se rendre en Biélorussie «pour un certain temps» et de former son armée.
Prigojine fait ensuite l'éloge de Loukachenko qui, en ce tragique samedi de quasi-putsch, avait négocié le départ des mercenaires de Wagner vers son pays:
Puis, Prigojine se lance dans une blague sur les jeunes femmes biélorusses qui rôderaient déjà autour des baraques du camp. L'orateur est pris d'un fou rire. «Mais traitez-les comme des frères», exhorte-t-il à ses troupes. Sur la vidéo, le nombre de ses auditeurs, qui se tiennent quelque part en plein air, n'est pas estimable.
Des activistes ont recensé ces derniers jours quatre colonnes de mercenaires de Wagner en route vers un camp de tentes nouvellement construit, près d'Assipovitchy, à environ 90 kilomètres au sud-est de Minsk.
La plus grande colonne de camions y est arrivée mardi et compterait 60 véhicules. D'après eux, 500 à 700 mercenaires de Wagner se trouveraient désormais dans le camp de l'armée. Selon les médias russes, le camp pourrait accueillir jusqu'à 8000 soldats.
Selon les informations que l'on peut tirer de la vidéo en question, la mission de ses mercenaires consiste à entraîner l'armée de Loukachenko, jugée obsolète et faible, ainsi qu'à s'entraîner eux-mêmes. «Dès que nous serons prêts, nous partirons vers une nouvelle destination - l'Afrique», promet la voix de Prigojine sur la courte vidéo. Il ajoute:
Jusqu'à présent, les observateurs locaux ont plutôt exprimé leurs craintes de voir les mercenaires de Wagner stationner à la frontière entre la Biélorussie et l'Ukraine, d'où ils pourraient menacer Kiev ou le nord-ouest de l'Ukraine. Un transfert aux frontières avec la Lituanie ou la Pologne n'est pas non plus exclu.
(Traduit et adapté par Chiara Lecca)