Vladimir Poutine prend des mesures de plus en plus rigoureuses contre son commandement militaire. Les blogueurs militaires russes émettent des spéculations en ce sens depuis quelques jours.
Le think tank américain Institute for the Study of War (ISW) indique que l'armée russe a retiré du commandement certains de ses meilleurs généraux. Les commandants de la 58e armée, de la 106e et de la 7e division aéroportée ont été relevés de leurs fonctions début juillet. Ces généraux disposaient d'une grande expérience du combat et ont mené leurs unités avec succès dans la guerre en Ukraine.
L'ISW souligne que d'autres hauts responsables militaires russes pourraient être limogés ou remplacés dans les prochains jours. Les autorités ont déjà arrêté le commandant de la 90e division blindée, le major-général Ramil Ibatullin. Sergueï Karasev, le commandant de la 31e brigade d'attaque aérienne, et Mikhaïl Teplinski, le commandant des troupes aéroportées, pourraient subir le même sort.
Les spéculations sur la possibilité que Mikhaïl Teplinski prenne la place du ministre de la Défense Sergueï Choïgou ont récemment circulé. Cependant, celui qui est considéré comme l'un des proches de Poutine est resté en fonction.
Depuis le début de la guerre, Sergueï Choïgou, ingénieur civil de formation, s'est régulièrement attiré les critiques des blogueurs de guerre ultranationalistes, qui l'ont accusé d'incompétence. Choïgou n'a pas fait carrière dans l'armée, ses critiques lui reprochent donc son manque d'expérience dans les questions de stratégie militaire.
Ces informations n'ont pas été confirmées jusqu'à présent, souligne l'ISW. Toutefois, ces conclusions suivent un modèle de décisions qui s'est souvent révélé exact par le passé. Au vu de l'ampleur des révocations, on peut parler d'une véritable vague d'épuration.
On ne peut que spéculer sur l'impact des licenciements et arrestations présumées sur le moral des troupes russes en Ukraine. Selon les experts militaires, cela risque d'empirer la situation. Certains de ses généraux ont récemment résisté avec succès à la contre-offensive ukrainienne. Leurs soldats auraient notamment fait leurs preuves dans les régions très disputées de Zaporijia et de Bakhmout.
Pour expliquer la démarche du haut commandement russe, les experts militaires ont évoqué les tentatives des généraux évincés de contourner la chaîne de commandement. Ainsi, Popov, Seliverstov, Kornev et d'autres se seraient adressés directement à Poutine, et non à Valeri Guerassimov, le chef d'état-major des forces armées russes, pour l'informer de leurs préoccupations face à l'action militaire en Ukraine. Cela constitue une grave violation des usages militaires.
Un enregistrement audio partagé par des blogueurs militaires russes sur les réseaux sociaux montre que l'armée russe est en ébullition. On y entend des membres de la 7e division d'assaut aérien de la Garde, une unité d'élite de l'armée russe stationnée dans la région de Kherson, menacer de désobéir aux ordres et de se retirer de leurs postes si le commandement de l'armée arrête ou même tue le général Teplinski.
Depuis le coup d'État du groupe Wagner en juin, les spéculations vont bon train sur le fait de savoir si Evgueni Prigojine avait des alliés au sein de l'armée et, si oui, qui. Alors que Prigojine et son armée de mercenaires n'ont pas été inquiétés, dans les jours qui ont suivi, des militaires de haut rang ont été retirés de leurs fonctions ou ont disparu de la scène publique. Parmi eux se trouve le général Sergueï Sourovikine, qui avait apparemment été informé des plans d'Evgueni Prigojine.
Prigojine lui-même se trouve dans un lieu inconnu. Une partie de ses mercenaires a été transférée en Biélorussie ces derniers jours, comme l'ont montré des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux. Là-bas, ils sont sous la protection du dictateur biélorusse Alexandre Loukachenko.
Vladimir Poutine a rencontré Evgueni Prigojine et une partie des commandants du groupe Wagner le 29 juin. Un événement tout à fait inhabituel. Si Poutine se mettait maintenant l'armée à dos en éliminant des généraux de haut rang, les conséquences pourraient être terribles pour lui. Les experts militaires y voient le germe d'éventuelles nouvelles tentatives de renversement. Celles-ci pourraient sérieusement menacer la dictature du maître du Kremlin.
Traduit et adapté de l'allemand par Tanja Maeder