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Guerre contre l'Ukraine

Ukraine: la raspoutitsa va-t-elle stopper Kiev?

«La pluie et la boue n'ont aucune influence sur les véhicules chenillés», explique Alexandre Vautravers.
«La pluie et la boue n'ont aucune influence sur les véhicules chenillés», explique Alexandre Vautravers.getty images

«L'Ukraine n'a plus que 30 jours»: la boue va-t-elle stopper Kiev?

Selon le chef de l'armée américaine, l'Ukraine n'a qu'une trentaine de jours avant que les pluies et la boue rendent les manœuvres «très compliquées». Mais si les conditions peuvent devenir plus difficiles, les combats ne devraient pas s'arrêter.
15.09.2023, 06:0115.09.2023, 12:39
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C'est désormais bien connu, la contre-offensive ukrainienne n'avance pas suffisamment rapidement, du moins selon les responsables militaires occidentaux. Lancée il y a plus de trois mois, cette vaste opération n'a, pour l'heure, connu que des succès limités et ponctuels. Le général américain Mark Milley l'a répété une fois de plus ce dimanche, aux micros de la BBC, tout en ajoutant que «les combats sont toujours intenses».

Le chef de l'armée américaine a ajouté une autre chose: les Ukrainiens disposent encore d'une «trentaine de jours de combat», a-t-il affirmé, avant que les conditions météorologiques se dégradent.

«Les pluies vont arriver. Le terrain deviendra très boueux et il sera alors très difficile de manœuvrer. Ensuite, il y aura l'hiver profond»
Mark Milley, chef d'Etat-Major des armées des Etats-Unis

Milley fait ici référence à un phénomène météorologique appelé «bezdorizhzhia» en ukrainien et «raspoutitsa» en russe. Ces termes désignent les périodes de l'année durant lesquelles une grande partie des terrains plats se transforment en mers de boue sous l'action de l'eau. La raspoutitsa se produit deux fois par année: au printemps, à cause de la fonte des neiges, et en automne, à cause des pluies.

Les véhicules chenillés ne souffrent pas

«Pluies, boue, hiver»... Est-ce que cela signifie que l'Ukraine n'a qu'une trentaine de jours pour réussir sa contre-offensive? Les opérations vont-elles s'arrêter dès que les conditions météo se dégraderont? C'est ce que les déclarations du général semblent suggérer, mais les avis divergent à ce sujet.

Selon le centre de réflexion «Institute for the Study of War» (ISW), le froid et l'humidité affecteront les combats, sans toutefois les arrêter. L'ISW fait valoir que cela a déjà été le cas au cours des 18 premiers mois de la guerre.

Un blindé ukrainien bloqué dans la boue dans la région de Donetsk.
Un blindé ukrainien bloqué dans la boue dans la région de Donetsk.Getty Images

«En automne, le terrain peut effectivement être humide dans certaines parties du front, dans le Donbass et au nord de la Crimée», réagit Alexandre Vautravers, rédacteur en chef de la Revue militaire suisse. Le spécialiste rappelle toutefois que «l'Ukraine est un immense pays, dont les dimensions avoisinent celles de l'Europe occidentale».

«La situation dans le nord ou dans le sud n'est pas du tout la même et des écarts de température de 30 degrés ne sont pas impossibles. On ne peut pas généraliser»
Alexandre Vautravers, rédacteur en chef de la Revue militaire suisse

Autre élément important: «La pluie et la boue n'ont aucune influence sur les véhicules chenillés. Or, l'armée russe est presque entièrement chenillée», ajoute-t-il. «Ces conditions posent problème aux véhicules à pneus, notamment les véhicules logistiques». C'est ce que montrent les vidéos documentant l'arrivée de la raspoutitsa l'automne dernier, où l'on voit des blindés sur roues lutter contre la boue.

«Si des centaines de camions empruntent les mêmes itinéraires, cela finit effectivement par dégrader sensiblement les routes», commente Alexandre Vautravers.

«Ralentir les mouvements»

Selon l'ISW, les pluies automnales «ralentiront les mouvements de terrain des deux côtés», tandis que «les basses températures poseront toute une série de problèmes logistiques». Alexandre Vautravers rappelle que, dans ces conditions météo, «les attaques peuvent demander davantage de préparation, et l'approvisionnement logistique devient plus compliqué». Mais l'essentiel ne devrait pas changer, estime-t-il:

«Atteindre les mêmes objectifs peut devenir plus difficile, mais les missions restent essentiellement les mêmes. La vraie question est de savoir qui saura s’adapter et prendre l'avantage dans des conditions données»
Alexandre Vautravers, rédacteur en chef de la Revue militaire suisse

Surtout parce que, selon lui, l'arrivée de la saison froide n'a pas que des conséquences négatives sur la guerre. «La météo ne concerne pas uniquement la situation au sol, mais implique également les conditions atmosphériques», précise-t-il. «Or, celles-ci peuvent, parfois, offrir des conditions avantageuses».

«Le brouillard, la pluie, ainsi qu'une visibilité réduite, sont historiquement favorables à l'attaquant», poursuit le rédacteur en chef de la Revue militaire suisse. Et d'ajouter: «Les forces disposant de dispositifs de vision thermique, comme ceux que l'Ukraine a reçus des Occidentaux, peuvent également être avantagées par ces conditions».

Une chose est sûre, Kiev a déjà annoncé que les opérations vont se poursuivre jusqu'à la fin de l'année. «Dans le froid, l'humidité et la boue, il est plus difficile de se battre», a déclaré le chef des services de renseignement, Kyrylo Boudanov, à Reuters. Avant de préciser:

«Les actions de combat se poursuivront d'une manière ou d'une autre. La contre-offensive se poursuivra»
Kyrylo Boudanov, chef des services de renseignement ukrainiens
Un premier char britannique détruit lors de la contre-offensive
Video: watson
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