Le nouveau secrétaire américain à la Défense Pete Hegseth a jugé mercredi au siège de l'Otan «irréaliste» d'envisager un retour de l'Ukraine à ses frontières d'avant 2014, qui incluaient la Crimée, et a écarté l'envoi de troupes par les Etats-Unis dans ce pays dans le cadre d'un éventuel accord de paix.
De la même manière, il a déclaré qu'il n'était «pas réaliste» de songer à une adhésion de l'Ukraine à l'Alliance atlantique si un tel accord était conclu.
Insistant sur la répartition des rôles, Pete Hegseth a estimé que l'Europe devrait fournir l'«écrasante» part de la future aide à l'Ukraine, et, plus largement, rappelé la volonté de la Maison Blanche de voir les Européens augmenter de manière significative leurs dépenses pour la défense. Il a martelé:
Avant même le début de cette réunion, le nouveau chef du Pentagone avait donné le ton: «l'Otan doit être plus forte (...) pas un club de diplomates», avait-t-il lancé sur X. Les pays européens membres de l'alliance espéraient des indications sur l'engagement américain en Europe et aux côtés de l'Ukraine, et sur les conditions d'une paix durable. Ils ont obtenu en partie gain de cause. «Secrétaire Hegseth, nous vous entendons», a déclaré le ministre britannique de la Défense, John Healey, qui présidait mercredi cette réunion du groupe de contact sur l'Ukraine.
Européens et Américains ont eu l'occasion de se jauger au cours de ce premier contact à l'Otan, qui sera suivi par le déplacement du vice-président américain J.D Vance à Munich, en Allemagne, où il rencontrera vendredi le président ukrainien Volodymyr Zelensky en marge de la conférence sur la sécurité.
Le nouveau chef du Pentagone a également mis la pression sur les Européens pour qu'ils partagent davantage le «fardeau» des dépenses militaires au sein de l'Alliance atlantique. Donald Trump a fixé la barre très haut en réclamant des Alliés européens qu'ils doublent, au minimum, leurs dépenses militaires.
Pour le nouveau président américain, les pays de l'Otan doivent consacrer 5% de leur Produit intérieur brut (PIB) à ces dépenses, quand ils ne sont encore que 23 à dépenser 2% de leur PIB en armements. «Et je pense qu'il a raison», a dit Hegseth devant ses collègues de l'Otan.
Mais pour la plupart des Alliés européens, à l'exception de la Pologne, la «marche» est trop haute, selon un diplomate de l'Otan, même si la plupart d'entre eux ne contestent pas la nécessité de dépenser plus. Mark Rutte, le secrétaire général de l'Otan, l'a maintes fois rappelé: il faut dépenser plus, probablement «au-dessus de 3%», a-t-il dit mercredi, sans toutefois fixer un chiffre définitif.
Les Européens redoutent aussi qu'un éventuel accord de paix entre l'Ukraine et la Russie, que Donald Trump a promis d'obtenir au plus vite, ne se fasse sans eux et au détriment de Kiev. «Il y a une convergence de vues sur le fait que nous devons être sûrs, tout d'abord que l'Ukraine arrive en position de force pour démarrer des négociations» de paix, a assuré mercredi Mark Rutte, après de premiers contacts avec la nouvelle administration Trump, dont Hegseth.
Concernant l'engagement accru des Européens en Ukraine, certains y sont prêts, comme la France et le Royaume-Uni, y compris avec l'envoi de troupes pour garantir un éventuel accord de paix, selon un diplomate de l'Otan.
(jah/afp)