C'est une annonce qui a du punch: Washington va fournir à l'Ukraine des munitions à l'uranium appauvri pour ses chars de combat Abram. Ces projectiles controversés devraient donner à l'armée ukrainienne un avantage sur le champ de bataille.
Ces obus à l'uranium appartiennent à la famille des projectiles à effet de souffle, dont l'efficacité ne dépend pas de l'utilisation d'explosifs, mais uniquement de l'énergie cinétique. A l'intérieur d'une telle munition se trouve un projectile en forme de flèche, appelé pénétrateur. La densité extrême de l'uranium appauvri confère à l'obus une grande force de pénétration.
L'uranium appauvri est un déchet issu de la fabrication de combustible radioactif pour les centrales nucléaires. D'autres métaux particulièrement denses, comme le carbure de tungstène, conviennent également à la fabrication du pénétrateur, mais ils coûtent plus cher.
Même le blindage moderne des véhicules de combat occidentaux ne peut résister à l'impact d'un projectile aussi dur. Lors du contact avec la cible, l'énergie cinétique du projectile se transforme en chaleur et en pression, concentrée sur une très petite surface. Contrairement aux projectiles explosifs, le blindage ne peut pas absorber l'énergie par déformation.
Au lieu de cela, le pénétrateur perce le matériau, créant ce que l'on appelle une pluie d'éclats qui se répand à l'intérieur du véhicule. Les éclats extrêmement rapides et chauds tuent l'équipage et peuvent faire exploser les munitions entreposées à bord.
Grâce à ces caractéristiques spéciales, les projectiles à effet de souffle sont particulièrement adaptés au combat contre les chars et les véhicules blindés de transport de troupes, mais aussi contre les bunkers et les positions fortifiées. En revanche, contre les véhicules non blindés ou les simples bâtiments, les projectiles à effet de souffle manquent souvent leur cible, car ils la traversent simplement sans causer de gros dégâts.
Les munitions à l'uranium appauvri sont utilisées par l'armée américaine depuis le milieu des années 1980. Le gouvernement américain n'a pas précisé quel type d'obus l'Ukraine recevra, mais il est probable qu'il s'agisse de la munition M829A4, qui est la norme dans l'armée américaine depuis 2016.
Cette munition a été développée pour pouvoir détruire les chars équipés de la dernière génération de blindages réactifs. Les blindages réactifs, comme le système «Contact-5» développé à la fin de l'Union soviétique, contiennent des paquets d'explosifs qui explosent à l'impact d'un projectile et le détruisent avant qu'il ne perce le blindage. «Contact-5» a été spécialement conçu pour réduire l'impact des projectiles à effet de souffle et est utilisé sur les chars russes plus modernes comme le T-90.
Pour l'Ukraine, les munitions de type M829A4 auraient un avantage important: les chars Leopard 2 livrés par l'Occident peuvent également tirer ces projectiles, car ils sont équipés du même canon de 120 millimètres de Rheinmetall. Depuis février, l'Ukraine a reçu plus de 60 Leopard 2. Les Etats-Unis avaient initialement promis à l'Ukraine 31 chars Abrams, dont les dix premiers devraient arriver ce mois-ci.
Le Royaume-Uni avait été le premier pays à annoncer dès le mois de mars qu'elle fournirait à l'Ukraine des munitions à l'uranium appauvri pour les chars de type Challenger 2 livrés par Londres. En raison de leur légère radioactivité, les munitions à l'uranium sont surtout controversées par les écologistes. Elles ne sont toutefois pas interdites ou proscrites.
Le Comité scientifique des Nations unies pour l'étude des effets des rayonnements nucléaires n'a trouvé aucune preuve que l'utilisation de munitions à l'uranium entraîne des dommages environnementaux. L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) signale cependant que l'utilisation de ces obus peut présenter un risque pour la santé des soldats qui les manipulent.
(Traduit et adapté par Chiara Lecca)