Plus de 2000 citoyens russes figurent désormais sur la liste des sanctions de l'Union européenne. Leurs avoirs restent gelés et l'UE a prononcé des interdictions de voyager de grande ampleur. Seulement, ces sanctions doivent être renouvelées tous les six mois, sous peine que les mesures deviennent caduques d'un jour à l'autre. C'est ce que veut le droit européen. Et le nouveau délai de renouvellement était fixé à ce samedi.
Les 27 Etats membres ont tardé à se mettre d'accord sur un renouvellement. Le problème se situait en Hongrie. Encore ce jeudi, le gouvernement pro-russe du Premier ministre Viktor Orbán bloquait le renouvellement des sanctions. Malgré des négociations frénétiques à Bruxelles, aucune percée n'a pu être réalisée jeudi.
L'UE a finalement trouvé un accord ce vendredi, peu avant midi.
Budapest exigeait que huit personnes soient exemptées des sanctions. Notamment le milliardaire Alicher Ousmanov, proche de Poutine, qui était copropriétaire d'Arsenal FC jusqu'en 2018. La Hongrie voulait également exempter Piotr Aven, un milliardaire qui a longtemps siégé à la tête de la banque Alfa, l'une des plus grandes banques privées de Russie.
Mais tout en haut de la liste d'Orbán se trouvait l'oligarque Mikhail Fridman, comme l'indique le Financial Times. Le milliardaire est le partenaire commercial le plus proche d'Aven et a fondé la banque Alfa au début des années 1990.
Comme de nombreux oligarques russes, Mikhail Fridman s'est enrichi durant les années turbulentes du président Boris Eltsine après la fin de l'Union soviétique. Mais contrairement à d'autres, lui et son ami Aven ont réussi à passer sans encombre du régime Eltsine au règne de Poutine. Mieux encore: ils font désormais partie des hommes d'affaires les plus puissants du pays.
Selon la journaliste britannique Catherine Belton, autrice de l'ouvrage de référence Les hommes de Poutine, la banque Alfa a joué un rôle central dans le renforcement de la structure du pouvoir de Poutine. Belton a dû faire face à une plainte en diffamation des deux oligarques après la parution du livre. Début février, Mikhail Fridman comme Aven ont vendu leurs parts dans la banque Alfa dans le but de sortir du collimateur des sanctions de l'UE.
Il y a des chances que cette stratégie porte ses fruits. L'année dernière, un tribunal de l'UE a jugé qu'au moins une partie des sanctions n'étaient pas justifiées. Il a estimé qu'il n'y avait pas suffisamment de preuves que Mikhail Fridman était directement impliqué dans l'atteinte à l'intégrité territoriale de l'Ukraine.
Mikhail Fridman a ensuite porté plainte contre l'Etat luxembourgeois et réclame désormais des dommages et intérêts à hauteur de seize milliards d'euros. Cette somme correspond à la moitié du budget de l'Etat luxembourgeois.
Ce vendredi, l'UE a décidé de maintenir les sanctions à l'encontre de Mikhail Fridman. Les diplomates ont toutefois accepté de retirer quatre autres personnes figurant sur la liste de Viktor Orbán. En contrepartie, celui-ci a levé son veto.
Traduit et adapté de l'allemand par Léa Krejci