«Quel enthousiasme!» Cette exclamation a toujours laissé un peu de chocolat autour de la bouche. Quand on est haut comme trois pommes, on trépigne à l'idée d'à peu près tout et rien: un saut à Disneyland, un bonbon acidulé, un cours de danse hip-hop, un gros paquet cadeau. Une fois enthousiaste, on «ressent et exprime une joie sincère et spontanée à la pensée ou à l'idée d'accomplir quelque chose», nous promet le Robert.
C'est bon? Vous la visualisez cette flamme contagieuse?
Valérie Pécresse n'a jamais vraiment eu envie de devenir présidente de la République. Blasée, fatiguée, rance, elle a aligné prestations fantomatiques et propositions flasques avec une aigreur aussi puérile qu'anémiante. Macron lui aurait «volé» son programme? Ses militants cherchent encore le petit malin qui a piqué son entrain.
Résultat, de toute sa campagne, on retiendra surtout une hernie discale, une infection au Covid-19 et un Zénith funeste. S'il est rare de lâcher un bulletin dans l'urne pour un programme, personne ne vote pour les petits tracas d'une candidate grisâtre. Mais elle n'est pas toute seule à avoir fait campagne la tête dans un sac. Du naufrage de la gauche, au fiasco de la droite, aucun candidat n'a su donner envie. De plébisciter, de s'investir ou simplement d'y croire.
«Ce qui m'effraie, ce ne sont pas les candidats, mais les personnes derrière.» Quand l'écrivain Régis Jauffret a évoqué cette campagne, lundi sur les ondes de France Inter, il n'applaudissait évidemment pas le succès des extrêmes, mais notait rigoureusement leur «enthousiasme délirant». On ne peut pas lui donner tort. Pendant deux mois, qu'importe le programme ou les idées, les groupies de Zemmour, comme ceux de Mélenchon, ont dépensé toute leur énergie et leurs arguments à défendre et soutenir leur héros.
Des héros qui, eux, ont postillonné un enthousiasme emportant les foules sur son passage. Du Trocadéro de Zemmour aux larmes insoumises à la mince défaite de Mélenchon, force est de constater que la ferveur n'a circulé que dans les marges.
Quand même la journaliste de #BFMTV présente sur place ne peut contenir son enthousiasme à l'antenne, c'est que le meeting est vraiment réussi...#MélenchonHologramme#Mélenchon #France#Présidentielle2022pic.twitter.com/95CQQHz1jN
— 🌿🐝 Реми φ🍒🐢 (@Callystor) April 5, 2022
Bien sûr, il a toujours été plus commode de faire monter la sauce quand les idées font bouillir de craintes une partie de l'opinion publique. Mais, même Macron, après cinq petites années de règne, a planqué son enthousiasme entre les lignes d'un agenda de la guerre.
S'ils veulent un jour réapparaître dans le radar des politiques qui rassemblent, les partis historiques doivent bien sûr se poser de grandes questions stratégiques. Mais un programme, aussi parfait et sérieux soit-il, ne remplacera jamais une nuée de chairs de poule à quelques enjambées d'une élection. Les frissons et l'envie d'y croire, c'est avec enthousiasme que ça se cultive.
On ne brandit pas «les valeurs de la République», si chères à ceux qui ont échoué, avec une main dans la poche. La main gauche... comme la droite, d'ailleurs.