Une prestigieuse université indienne a interdit la projection prévue mardi d'un documentaire de la BBC sur le rôle du premier ministre Narendra Modi dans les émeutes communautaires meurtrières de 2002. Son gouvernement avait déjà tenté d'empêcher sa diffusion en ligne il y a quelques jours.
Le film affirme que le premier ministre, alors ministre en chef de l'Etat du Gujarat, a ordonné à la police de fermer les yeux sur les graves violences qui ont fait au moins mille morts, la plupart parmi la minorité musulmane.
Des étudiants de l'université Jawaharlal Nehru de New Delhi avaient prévu de projeter le documentaire mardi, bravant les autorités qui tentent de restreindre sa diffusion. L'université a cependant ordonné lundi soir aux étudiants d'annuler l'événement, les avertissant qu'elle engagerait de «strictes mesures disciplinaires» s'ils désobéissaient:
Des étudiants ont tout de même tenté d'organiser la projection mardi soir, mais l'électricité a été coupée sur le campus avant que la diffusion ne puisse commencer. Des centaines de personnes se sont donc serrées les unes contre les autres, dans l'obscurité, pour regarder le documentaire sur les écrans de leurs téléphones ou de leurs ordinateurs portables.
Samedi, son gouvernement avait annoncé avoir bloqué le partage du documentaire sur les réseaux sociaux, un conseiller le qualifiant de «propagande hostile». Les émeutes de 2002 avaient démarré au Gujarat après la mort de 59 pèlerins hindous dans un incendie, à bord d'un train. Par la suite, 31 musulmans ont été condamnés pour association de malfaiteurs et meurtre.
Le documentaire de la BBC reprend notamment un rapport déclassifié du ministère britannique des affaires étrangères, citant des sources anonymes selon lesquelles Narendra Modi aurait rencontré des officiers de police pour leur «ordonner de ne pas intervenir» lors des violences anti-musulmans qui ont suivi la mort des pèlerins.
Ces violences, commises par des groupes hindous d'extrême droite, étaient «politiquement motivées» avec l'objectif de «purger les musulmans des zones hindoues», ajoute le rapport. Ces émeutes étaient impossibles «sans le climat d'impunité créé par le gouvernement de l'Etat [...] Narendra Modi est directement responsable», conclut le texte. (ats/jch)