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Interview

Poutine et Kim: «C'est une rencontre entre deux mafieux»

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«Il ne faut pas comparer la Russie à la Corée du Nord»

Le dictateur nord-coréen et le chef du Kremlin se sont rencontrés le 12 septembre en Russie. Décryptage de cette entrevue avec Fyodor Tertitsky, expert militaire.
13.09.2023, 16:5314.09.2023, 11:05
Ivan Ruslyannikov / ch media
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Le dirigeant nord-coréen Kim Jong un est arrivé le 12 septembre dans la ville russe de Vladivostok, à bord de son célèbre train blindé, pour une entrevue avec Vladimir Poutine au cosmodrome Vostotchny, autour de «sujets sensibles».

Quelles peuvent bien être les conséquences de cette rencontre qui inquiète autant qu'elle fascine l'Occident? Fyodor Tertitsky, chercheur à l'université de Kunming à Séoul, la capitale de la Corée du Sud, et expert en histoire nord-coréenne et en affaires militaires, a répondu à nos questions.

Qu'attendent Poutine et Kim Jong-un de cette rencontre?
Fyodor Tertitsky: Le simple fait que la rencontre ait lieu attire l'attention internationale. Les parties renforcent leur poids diplomatique. Même s'ils ne faisaient que se rencontrer, se serrer la main, manger quelque chose de bon et prendre congé l'un de l'autre, la manœuvre fonctionnerait. Mais je ne dirais pas qu'il s'agit d'une rencontre entre deux personnes ayant des idéologies similaires.

«Poutine est autoritaire, Kim Jong un est super-autoritaire»

Dans les journaux nord-coréens, on ne trouve par exemple pas un seul mot sur la guerre en Ukraine. Cela ressemble donc plutôt à une rencontre entre deux chefs de la mafia dans Le Parrain.

De nombreuses personnes comparent volontiers le régime autoritaire de Poutine à la Corée du Nord. Que pensez-vous de ces comparaisons?
La Corée du Nord est un pays avec un tout autre niveau de contrôle. Si l'on imagine une carte de l'indice de démocratie, de nombreux pays autoritaires sont colorés en rouge, la Corée du Nord est en noir. Là-bas, il n'y a pas Internet. Les frontières sont fermées, on ne peut pas quitter le pays. Alors qu'il est possible de quitter la Russie. En Corée du Nord, des réunions obligatoires ont lieu plusieurs fois par semaine, au cours desquelles les participants expriment leur loyauté envers le dirigeant.

«En Corée du Nord, des portraits du leader sont accrochés dans chaque maison. La détérioration d'un tel portrait est passible d'une peine de prison»

Quiconque écoute des stations de radio étrangères risque la prison. C'est pourquoi il ne faut pas comparer un pays autoritaire comme la Russie à la Corée du Nord. C'est bien pire là-bas.

Comment Kim Jong un peut-il aider Vladimir Poutine dans sa guerre en Ukraine?
De nombreux pays craignent qu'un commerce à grande échelle de munitions ne débute. Il s'agirait d'une nouvelle ère sans précédent. La Corée du Nord dispose d'une grande quantité de munitions d'artillerie. La Russie a besoin de ces munitions parce qu'elle bombarde constamment les villes ukrainiennes. En contrepartie, la Corée du Nord a besoin de nourriture et d'argent après les sanctions, l'isolement et la pandémie.

«Du côté américain, on suppose que Poutine pourrait fournir des technologies à la Corée du Nord en échange de munitions»

Je pense qu'il est peu probable que Poutine cède à Kim Jong un une technologie de missiles nucléaires, car il se heurterait automatiquement à la vive opposition de la Chine. Poutine ne peut pas se permettre d'entrer en conflit avec la Chine en ce moment.

Poutine va-t-il demander à Kim Jong-un de fournir des soldats nord-coréens pour la guerre en Ukraine?
Non, la Corée du Nord n'aime pas que ses citoyens quittent le pays. Imaginez que ses soldats reviennent du front et disent à tout le monde qu'il y a la guerre en Ukraine, alors que personne ne parle de cette guerre dans les journaux. Pour Kim Jong-un, cela n'a absolument aucun sens de s'engager dans la guerre en Ukraine.

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