La durée de son règne est inversement proportionnelle à la polémique entourant Miss Japon. Elue le 22 janvier, Carolina Shiino a annoncé le 5 février rendre sa couronne. Le pays a décidé de ne pas la remplacer par l'une de ses dauphines, et n'aura ainsi aucune représentante pour 2024.
L'histoire commençait bien pourtant. La jeune femme de 26 ans, d'origine ukrainienne, gagne le concours et écrit l'histoire: elle est la première candidate à devenir Miss Japon sans y être née. En effet, Carolina Shiino, mannequin depuis ses 15 ans, quitte l'Ukraine à l'âge de 5 ans après le divorce de ses parents. Sa mère épouse un Japonais, la petite famille recomposée fait ses cartons et déménage. La future Miss Japon obtient le passeport japonais en 2023 et décide de prendre le nom de son beau-père.
Mais les paillettes retombent rapidement. Bien qu'elle assure en larmes durant la cérémonie être reconnaissante d'être enfin acceptée en tant que Japonaise, tous ne l'entendent pas de cette oreille. Peu après sa victoire, une première polémique aux accents xénophobes enfle: certains considèrent que la jeune femme ne représente pas réellement la population nippone, n'ayant pas les caractéristiques physiques des Japonais, relançant ainsi un débat de longue date autour de la définition de l'identité des 124 millions de citoyens du pays.
Des critiques qui émanent d'anonymes sur les réseaux sociaux, mais aussi de personnalités japonaises, comme la dessinatrice de mangas Mayumi Kurata, qui s'est exprimée sur X:
ミス日本に選ばれたこの方、とても美しいと思う。
— 倉田真由美 (@kuratamagohan) January 24, 2024
しかし私は「ミス日本」とは、「日本人を代表する美しさを持つ人」と解釈していた。その定義には当てはまっていない。彼女の美しさは、「日本的美しさ」とは違うものだ。
「ミス日本」とはどのような定義のものなのか。 https://t.co/U9uhXKzdFE
Ce n'est pas la première fois que les origines d'une Miss Japon sont scrutées et commentées: en 2015, Ariana Miyamoto, née d'un père afro-américain et d'une mère japonaise, a elle aussi eu droit aux mêmes remises en question de sa légitimité à représenter le Japon, étant une hāfu (mot utilisé en japonais pour désigner quelqu'un qui est métis, au sens qu'il a une moitié d'ancêtres japonais et une seconde moitié étrangère).
Malgré la polémique entourant ses origines ukrainiennes, la nouvelle Miss Japon ne lâche pas sa couronne. Elle affirme dans une interview au journal The Japan Times avoir adopté les valeurs et la mentalité du pays:
Un autre scandale, particulièrement mal vu au Japon, vient ensuite éclabousser la jeune femme. Le 31 janvier, le Shukan Bunshun, un magazine bien connu au Japon pour avoir fait tomber de nombreuses personnalités, révèle que la mannequin fréquente un médecin, un homme marié. Quand bien même ce n'est pas elle qui commet l'adultère, Carolina Shiino est harcelée de toutes parts.
Dans un premier temps, l'association Miss Japon défend sa protégée, déclarant que l'homme en question avait affirmé à la jeune femme être célibataire.
Mais quelques jours plus tard, l'organisateur du concours revient sur sa déclaration et affirme que Miss Japon était sortie avec ce médecin en sachant qu'il était marié, ce qu'elle a confirmé, et qu'elle présentait ses excuses pour avoir menti à ce sujet. Carolina Shiino a ainsi décidé de démissionner et rendu sa couronne dans la foulée, ce que les organisateurs ont accepté, tout en précisant qu'elle ne serait pas remplacée.
Les ennuis de la jeune femme ne se sont pas arrêtés là pour autant. Son agence de mannequins, Free Wave, s'est aussi fendue d'un communiqué, déclarant que le médecin avait d'abord dit à la Japonaise qu'il était célibataire, mais que cette dernière avait poursuivi la relation même après avoir appris qu'il était finalement marié. L'agence a accepté la proposition de sa mannequin de mettre fin à son contrat avec elle.
Dans un dernier communiqué, Carolina Shiino a présenté ses excuses auprès de ses fans et du public, confiant avoir cédé à la peur face à la tempête.
Le Japon n'aura donc pas de reine de beauté cette année pour aller défendre ses couleurs, notamment pour le prestigieux concours de Miss Univers. L'organisation de Miss Japon n'a pas souhaité alimenter la polémique xénophobe en couronnant une dauphine aux traits plus japonais.