Le dépouillement de près de 99% des urnes à l'échelle nationale confirme que l'opposition turque a infligé au parti AKP (islamo-conservateur) du chef de l'Etat sa pire débâcle électorale en deux décennies.
Le principal parti de l'opposition, le CHP (social-démocrate), a revendiqué sa victoire à Istanbul et Ankara, les deux plus grandes villes de Turquie et s'apprêtait à en rafler de nombreuses autres, comme Bursa, grosse ville industrielle du nord-ouest acquise à l'AKP depuis 2004.
La proclamation des résultats définitifs par la Haute commission électorale (YSK) attendue dans la journée de lundi confirmera ces résultats, déjà intégrés par les principaux intéressés, dont le chef de l'Etat.
Depuis le siège de son parti à Ankara et devant une foule abattue, inhabituellement silencieuse, le président turc a promis de «respecter la décision de la Nation». Peu auparavant, le maire sortant d'Istanbul, Ekrem Imamoglu, quinquagénaire médiatique et fringant, avait annoncé sa réélection à la tête de la plus grande ville de Turquie sans même attendre la proclamation des résultats officiels.
A Ankara, le maire CHP Mansur Yavas, largement en tête, avait lui aussi déjà revendiqué la victoire, affirmant devant une foule en liesse que «ceux qui ont été ignorés ont envoyé un message clair à ceux qui dirigent ce pays».
«Les électeurs ont choisi de changer le visage de la Turquie», a estimé le chef du CHP, Ozgur Ozel. Outre Izmir (ouest), troisième ville du pays et fief du CHP, et Antalya (sud) où les partisans de l'opposition commençaient à célébrer la victoire dans les rues, la principale formation de l'opposition a réalisé une percée spectaculaire en Anatolie.
Elle fait la course en tête dans des chefs-lieux de provinces longtemps tenus par l'AKP, selon des résultats quasi définitifs qui ont pris de court les observateurs.
Le maire d'Istanbul n'a eu de cesse depuis de se poser en rival direct du chef de l'Etat, qui l'a pourtant dépeint en «maire à temps partiel» dévoré par ses ambitions nationales.
Pour nombre d'observateurs, le maire d'Istanbul disposera une fois élu d'un boulevard vers la présidentielle de 2028. Le chef de l'Etat, résigné, a lui évoqué les «quatre années de travail (...) à ne pas gaspiller» d'ici-là, une manière d'écarter l'éventualité d'une élection anticipée qui lui permettrait de se représenter une nouvelle fois. (ats/vz)