
Image: AP
punchlines
En Afghanistan, passer d'une vie de combattant du djihad à celui d'administrateur d'un pays n'est pas de tout repos. Les talibans regrettent leur vie dans les montagnes et s'emmerdent ferme à Kaboul, que ce soit au bureau, dans les bouchons ou au parc. La preuve en punchlines.
18.02.2023, 16:3018.02.2023, 17:35
Les talibans ont repris le pouvoir en Afghanistan en août 2021, après 20 ans de présence américaine durement combattue. Pour ces hommes qui ont mené toute leur vie une existence de rebelles, le passage à la gouvernance semble un peu compliqué. Se cacher dans les montagnes et tirer sur les Américains avec une kalash rouillée was only the beginning...
Le média Afghanistan analysts network a interviewé cinq d'entre eux (également évoqué par Vice). Et ça balance: entre celui qui découvre les bouchons à Kaboul, l'autre qui se perd sur Twitter au boulot et les sorties au parc d'attraction.
Petit tour d'horizon en punchlines bien senties et parfois ahurissantes.
Huzaifa, 24 ans
Au bon vieux temps du djihad...
«Du temps du djihad, la vie était simple. J'étais un sniper. Nous menions des attaques contre l'ennemi avant de nous replier»
Et maintenant?
«Désormais, on s'asseoit derrière un ordinateur 24h sur 24, 7j sur 7. La vie est devenue tellement ennuyeuse. Tu fais la même chose toute la journée»
Mais il s'amuse de temps à autres:
«Avec mes amis, on va se divertir à Qargha ou Sarobi. On va aussi au zoo...»
Note: à Qargha et à Sarobi, il y a un petit lac ❤️

Des talibans font du bateau et des selfies à Qargha, en septembre 2021.Image: AP
Ah oui, ça change des montagnes et des embuscades...
«Mais à chaque fois, mes amis me mettent la pression pour écouter de la musique dans la voiture»
Pas cool, les potes.
«Au début, je résistais. Mais j'ai fini par céder. On se contente de couper le son quand on passe un checkpoint, parce que c'est mal vu pour un taliban d'écouter de la musique»
C'est un peu hypocrite, mais bon.
«D'autres talibans sont devenus amis avec des jeunes qui les poussent à mal se comporter, comme en allant dans des bars à shisha»
Omar, 32 ans
Voici son histoire:
«J'avais 11 ans quand les Américains nous ont envahis. J'ai fait le djihad dans cinq provinces différentes et j'ai fini par devenir commandant»
Un bonhomme. Et maintenant?
«Je travaille au gouvernement. Je vais au bureau de 8h à 16h»
The Office, quoi.
«Il y a un truc que je déteste à Kaboul: les bouchons»
Big city life.
«Ma famille n'est pas encore à Kaboul. Le loyer est trop haut. Si Dieu le veut, quand j'aurai un bon salaire, j'amènerai ma famille»
Et moi qui pensais que Genève, c'était cher. Et sinon, pour se détendre?
«Le vendredi, on va à Qargha, Paghman ou à Zazai Park»
Plutôt sympa, Zazai Park...

Les talibans semblent s'y amuser:

Image: AP
Bon, cet article c'est un peu la suite de cette vidéo 👇
Kamran, 27 ans
Lui aussi, ce n'est pas un rigolo:
«On attaquait les convois américains avec des lance-roquettes, des mitrailleuses lourdes et des bombes planquées le long de la route. Après, ils envoyaient les drones contre nous»
Le bon vieux temps.

Image d'illustration. Je crois.Image: keystone
Et maintenant?
«Je travaille au Ministère de l'Intérieur. Le djihad me manque. On vivait parmi le peuple, désormais, on s'enferme dans nos bureaux et nos palaces»
Dur, dur...
«Je me fais du souci pour nos moudjahidines. Le vrai test, le vrai challenge, ce n'était durant le djihad: c'est maintenant»
Le confort, c'est la mort.
«Nous sommes mis au test pour tout. Les voitures, les postes, la richesse, les femmes»
Bienvenue en Occident.
Adul Nafi, 25 ans
L'homme du désert:
«Durant le djihad, un commandant et un simple soldat se battaient côte à côte. Nous pleurions ensemble pour nos martyrs. Nous étions dans le sacrifice, nous nous battions avec moral et détermination»
Et en 2023?
«Mon chef m'a demandé de prendre des cours d'anglais et d'informatique»
Après avoir chassé les Américains, c'est moche...
«On est connecté à internet, maintenant. Je suis devenu accro, comme de nombreux autres moudjahidines»
Et ça bosse dur?
«Je passe la plupart de mon temps sur Twitter...»
C'est son chef qui doit être content...
«Pire: un des membres de ma classe d'informatique... est une femme»
😱
«Et je ne peux pas sauter les cours juste parce qu'elle est là. Je n'aurais jamais cru avoir affaire à une situation pareille dans ma vie de taliban»
Abdul Salam, 26 ans
Lui aussi bosse au gouvernement, désormais:
«Dès qu'on fait la moindre erreur, les médias nous tombent dessus...»
Ah, la liberté de la presse. Ça change, hein?
Et pour se reposer:
«Le vendredi, on va pic-niquer à Qargha ou Paghman»
Les jardins de Paghman, c'est joli.

Image: wikimedia commons
So peaceful. Et la capitale, c'est comment?
«Je n'étais jamais venu à Kaboul avant. Je pensais que tout y était malfaisant. En fait, c'est pas si mal. Je ne sais pas si les mauvaises choses ont été éliminées par les moudjahidines ou si on s'était trompés depuis le début»
On a notre petite idée.
«Ici, si on ne vient pas au travail, on nous coupe le salaire. Et l'Emirat peut trouver tout plein de monde pour nous remplacer et être payé à notre place»
Mais que fait le syndicat des moudjahidines?
Fin. Bonus: une dernière image de Zazai Park.

Image: AP
Voici la première supercar développée en Afghanistan
Video: watson
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