Une rumeur se veut persistante à propos d'Alexeï Mordachov. On raconte que cet homme, considéré comme le troisième plus riche citoyen de Russie, a rencontré Vladimir Poutine pour la dernière fois le jour de l'invasion de l'Ukraine, le 24 février dernier. Depuis, pour cet allié de longue date du despote, comme pour ses nombreux confrères bien lotis, c'est un peu la foire à l'oligarque.
Sa fortune? 29 milliards de dollars, selon le dernier coup de sonde de Forbes. De quoi s'offrir une relative quiétude et quelques jolis yachts, dans un empire russe qui a de plus en plus le mal de mer.
Mercredi, l'un des joujoux aquatiques du PDG de la société russe Severstal, géant de la métallurgie aux reins d’acier, a été aperçu dans le célèbre port Victoria de Hong Kong. Baptisé Nord, le palace flottant, officiellement sanctionné par la communauté internationale, continue de faire des vagues. Sans bouger.
Le yacht d'Alexeï Mordachov est arrivé le 5 octobre, après sept jours de voyage depuis Vladivostok. (D'ailleurs, si l'itinéraire complet de ce monstre de luxe vous intéresse, il est à suivre ici.)
Si Vice US confirme que son arrivée dans les eaux chinoises a été approuvée par le service maritime, Reuters se demandait, il y a encore quelques jours, si les autorités étaient bien au courant que cette beauté imposante n'est désormais qu'un vulgaire fugitif. Selon le média chinois Morning post, «la ville n'a aucune obligation d'appliquer les sanctions américaines, européennes et britanniques».
«Si Nord a accosté à Hong Hong juste pour faire le plein et réapprovisionner les stocks, c'est peu probable que les autorités soient sanctionnées», explique Stephenson Chow Pok-yin, professeur à la faculté de droit de CityU. Sans oublier qu'une loi locale stipule qu'un yacht en visite, sauf autorisation spécifique des autorités, dispose de 182 jours pour lever l'ancre, avant d'être inquiété. En d'autres termes, Hong Kong est donc un paradis fluvial pour les oligarques. A l'image de la Turquie ou des Caraïbes.
Problème, en plein séisme géopolitique, la loi ne fait pas toujours la loi. En refusant d'y mettre du sien, Hong Kong pourrait s'attirer un énième coup de foudre de la communauté internationale. Et c'est plus lourd qu'une tracasserie diplomatique ordinaire, puisque le climat est tendu comme un slip avec les Etats-Unis. Malgré tout, les pays qui ont sanctionné le milliardaire, et qui sont actuellement à la poursuite du Nord, ne se risqueront pas à tenter quoique ce soit avant son départ. Totem d'immunité pour ce paradis à peine plus long qu'un terrain de football américain.
L'industriel proche de Poutine n'en est pas à son premier tracas. En mars dernier, un premier yacht lui appartenant avait été saisi par la justice italienne. Son petit nom? Lady M. Moins massif et moins cher que son grand frère: 55 millions de dollars.
Italy’s police has just seized “Lady M Yacht” - a €65m yacht belonging to Alexey Alexandrovits Mordaschov located in Imperia (Liguria) - in compliance with the recent EU sanctions. pic.twitter.com/8NzqkXH7lE
— Ferdinando Giugliano (@FerdiGiugliano) March 4, 2022
Ainsi, pour éviter que son (plus) gros bébé subisse le même sort, Alexeï aurait dépensé 465 000 dollars, en grande vitesse et en carburant, pour l'envoyer à Vladivostok. Selon Luxury launches, le milliardaire aurait également désactivé ses répondeurs de localisation (obligatoires) et parcouru plus de 12 000 km sans escale. On appelle ça une évasion.