«Dans cette affaire, l'arme redoutable de la Russie, c'est l'humour»

Vladimir Krasnov et Alexeï Lexuscapture d'écran: ard

L'humour comme arme: les faux Klitschko travaillent pour une filiale de Gazprom

Les deux comiques russes qui ont appelé des politiciens européens en se faisant passer pour le maire de Kiev sont payés par une entreprise d'Etat russe. Les experts parlent de guerre de l'information.

Un article de

Le duo d'humoristes russe qui a piégé des hommes politiques – il a notamment passé de faux appels vidéo à la maire de Berlin, Franziska Giffey, par exemple – a des liens avec le groupe public russe Gazprom.

En effet, Vladimir Krasnov et Alexeï Lexus – connus sous le nom de scène Wowan et Lexus – ont déclaré au magazine allemand Kontraste qu'ils se finançaient grâce aux fonds de la plateforme vidéo Rutube, filiale de Gazprom Media. Alexeï Stoliarov l'a confirmé:

«Nous travaillons et sommes ambassadeurs de "Rutube". Nous recevons donc notre argent de leur part»

Pourquoi est-ce problématique?

Wowan et Lexus ont revendiqué une série de faux appels, dans lesquels ils se sont fait passer pour le maire de Kiev, Vitali Klitschko. Ils se sont alors entretenus avec des hommes politiques de premier plan. Selon la chancellerie du Sénat de Berlin, la conversation avec le faux Vitali Klitschko avait été interrompue prématurément. Le Landeskriminalamt Berlin (LKA), l'office national de la police criminelle, a ouvert une enquête. Les maires de Vienne et de Madrid auraient également été dupés par les comiques.

Leur méthodologie

Pour tromper leurs interlocuteurs, les deux hommes se seraient bien préparés et auraient eu recours à ce que l'on appelle «l'ingénierie sociale». Il s'agit de collecter des informations sur les personnes et sur leur environnement, et de falsifier ensuite leurs adresses e-mail par exemple, afin de convaincre les destinataires de l'authenticité de l'émetteur.

Le duo russe a l'intention de publier des enregistrements de toutes ses «blagues» sur le clone russe de YouTube, Rutube.

Guerre de l'information

Les experts voient dans cette action une tactique dans la guerre d'agression russe contre l'Ukraine. L'ancien président du Service fédéral de renseignement allemand (BND), Gerhard Schindler, a déclaré au magazine Kontraste «qu'une gigantesque guerre de l'information était menée pour décrédibiliser l'adversaire». Il ajoute:

«Pour arriver à ses fins, nous avons recours aux fake news, à la désinformation ou à la manipulation»

Gerhard Schindlerkontraste

Il précise encore:

«Mais l'arme la plus redoutable dans cette guerre de l'information est l'humour. La blague et la moquerie ridiculisent et délégitiment l'adversaire»

La maire de Berlin, Franziska Giffey, a vivement condamné les appels. Elle voit ici des intérêts du Kremlin. Fin juin, elle tweet:

«Peu importe qui revendique la manipulation, la manière exacte dont elle a été menée et les motivations qui la sous-tendent, cela reste une usurpation d'identité. Ces actions coïncident avec la narration et les objectifs du Kremlin»

source: t-online.de

Elle continue: «Les agresseurs voulaient affaiblir la confiance en l'Ukraine et en nous également. Ils n'y parviendront pas».

(dsc/t-online)