Voler en Russie est devenu plus dangereux. En effet, le nombre de dysfonctionnements documentés sur les avions russes aurait triplé l'année dernière. Des problèmes qui ont entraîné plusieurs atterrissages d'urgence, souvent en raison de l'absence de pièces de rechange ou de pièces non certifiées.
Selon les recherches du magazine américain Newsweek, il y aurait eu 60 incidents dans le trafic aérien rien qu'entre septembre 2023 et le 8 décembre 2023. Parmi eux, notamment des atterrissages forcés, des moteurs en feu et des dysfonctionnements ainsi que d'autres problèmes techniques. En septembre, il y a eu quinze incidents, en octobre 25, en novembre douze et déjà huit en décembre.
Mais les problèmes semblent exister depuis longtemps. Le journal d'opposition russe Novaya Gazeta Europe s'est procuré des chiffres publics. Il en ressort qu'au cours des huit premiers mois de cette année, plus de 120 accidents ont eu lieu avec des avions de ligne de compagnies aériennes russes.
C'est plus du double comparé aux années précédentes: entre 2018 et 2022, une moyenne de 55 accidents a été enregistrée sur la même période.
Cette hausse des accidents dans l'aviation de passagers s'accompagne paradoxalement d'une réduction du trafic aérien russe. Le ministère des Transports prévoit une baisse d'au moins 9% des vols en 2023. L'année dernière, elle avait atteint 22%. La Russie a reçu un drapeau rouge de l'OACI, l'autorité internationale de l'aviation, qui la décrit comme «dangereuse» – au même titre que le Bhoutan, la République du Congo et le Libéria.
L'une des raisons de la hausse des incidents est sans doute le manque de pièces de rechange, causé par les sanctions occidentales. Cela concerne surtout les avions de fabricants étrangers loués à des entreprises russes. Après le début de la guerre, celles-ci ont été rapidement nationalisées par décret du Kremlin et remises aux compagnies aériennes russes, qui ont également dû assurer leur maintenance.
Depuis la guerre d'agression contre l'Ukraine, l'UE a imposé des sanctions sévères à l'industrie aéronautique en Russie. Ses avions n'ont plus le droit de survoler le territoire européen, et encore moins d'atterrir ou de décoller des aéroports. Outre les pièces de rechange, ce sont également les mises à jour de logiciels qui font défaut, notamment pour les appareils construits à l'étranger.
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Boeing et Airbus aussi sanctionnent les Russes en ne livrant plus de pièces de rechange pour les machines. C'est pourquoi les compagnies aériennes russes sont obligées de démonter leurs vieux appareils ou de se procurer des pièces dans d'autres pays par des voies détournées.
«La probabilité de mourir dans un tel avion est 20 fois plus élevée que dans un avion loué», peut-on lire dans l'article de Novaya Gazeta. L'enquête révèle un autre phénomène: les accidents d'avion utilisés en Russie, mais produits à l'étranger atteignent un niveau record en 2023. Leur part dans le nombre total d'incidents, qui n'avait jamais dépassé 40% auparavant, s'élevait à environ 60% au cours des huit premiers mois de l'année.
Kirill Jankov, président de l'association russe des passagers aériens, a livré son analyse au portail d'information 74.ru., avant d'être repris par Newsweek: «Premièrement, il est devenu beaucoup plus difficile de se procurer des pièces de rechange et du matériel d'entretien pour de nombreux appareils. Et deuxièmement, ce qui est encore pire, il est possible que des pièces non certifiées par les fabricants soient déjà installées sur les avions», a déclaré Jankov. «Nous ne constatons pas d'augmentation des crashs, mais le nombre d'accidents est nettement plus élevé», a-t-il souligné.
En mai déjà, des informations mettaient en lumière un manque de rigueur dans la maintenance en Russie. Le site d'investigation Projekt affirmait, sur la base de documents de la compagnie Aeroflot, que les défauts n'étaient plus directement listés comme auparavant. Les agents de bord auraient reçu l'instruction d'inscrire «tous les commentaires sur l'équipement de la cabine dans le protocole de la cabine uniquement en accord avec le commandant de bord».
En octobre, la compagnie Aeroflot a connu trois incidents. En Thaïlande, un Boeing-777 est resté au sol parce que le fuselage avait été endommagé – soi-disant par le personnel sur le tarmac. Un autre engin, qui avait pour destination la Turquie, a dû rester à Moscou après deux tentatives de décollage ratées, rapporte le portail ukrainien Pravda. Selon ses recherches, de tels problèmes sont fréquents – la plupart du temps, ce sont les moteurs et le fuselage qui présentent des dommages.
Traduit de l'allemand par Valentine Zenker