«On a fait tout ça en une prise.» Le résultat est bluffant. Un arrangement de piano-bar, une voix de velours, une déco des années 1950 réunissant drapeaux russe et ukrainien: la chanson Le Déserteur, l’hymne antimilitariste de Boris Vian, composé en 1954, à la veille de la bataille de Diên Biên Phu en Indochine, où la France coloniale sera défaite, est à présent un manifeste pacifiste en russe destiné aux Russes. Adapté par le musicien et journaliste à l’hebdomadaire français Franc-Tireur Benjamin Sire, la chanson est superbement interprétée par une jeune artiste-photographe ukrainienne vivant en France, Daria Nelson, un air de Dita von Teese, en tout à fait sage.
«Il y a une intention de montrer la chanson, d'essayer de faire qu'elle arrive jusqu'en Russie. Je sais bien qu'une chanson ne va pas changer la face du monde. Mais c'est un message qui est fort», a expliqué Benjamin Sire à BFMTV.
Joint par watson, le compositeur français retrace le parcours de cette adaptation:
«Postée sur Twitter lundi dernier à 17 heures, la vidéo de la chanson, d’une durée de 2 minutes et 19 secondes, la durée quasi maximale autorisée par le réseau social a été vue 200 000 fois et 21 000 fois sur YouTube», précise Benjamin Sire.
Cet hymne invitant les Russes, les agresseurs dans la guerre en Ukraine, à mettre fin aux combats, est «spécifiquement ciblé pour les pays de l’Est», poursuit le musicien français. «Pour l’heure (réd: mercredi en fin d’après-midi), 5% des vues sur YouTube viennent de France, 3,5% d’Ukraine, de Pologne et de Biélorussie et un peu plus de 1%, ce qui est en soi un exploit, de Russie. On espère plus à l’avenir.»
Le 7 mai 1954, le jour même de la chute du camp de Diên Biên Phu, le chanteur Mouloudji interprétait le titre de Boris Vian lors d'un récital, rappelle Le Figaro.
L'adaptation de Benjamin Sire est d'abord peut-être un salut fraternel au peuple russe, un appel à sa sensibilité.