La vidéo, d'une durée d'une minute quarante secondes, circule depuis mardi sur Twitter. On y voit un homme en tenue de camouflage, le visage masqué, trancher le cou d'un autre individu en uniforme se débattant au sol en hurlant «ça fait mal».
Au bout de quelques secondes, les cris cessent et on entend un homme derrière la caméra incitant en russe le bourreau à «couper la tête» de la victime. Ce dernier finit sa décapitation au couteau, et montre la tête tranchée à la caméra. «Faut la foutre dans le sac et l'envoyer au commandant» dit une voix en russe. A la caméra, on montre également le gilet de la victime barré du trident ukrainien et d'une tête de mort.
L'identité des personnes filmées n'est pour l'heure pas connue, tout comme l'endroit où les images ont été prises. La vidéo, fortement floutée, semble avoir été prise pendant l'été, avance CNN, en raison l'abondante végétation visible sur le sol.
Selon Ryan McBeth, un youtubeur adepte du renseignement open source, plusieurs détails indiquent que le bourreau appartiendrait au groupe Wagner. L'homme porte du ruban adhésif blanc autour de son genou droit, «une tenue typiquement associée» à la milice privée, analyse-t-il.
La victime porte un brassard jaune sur le bras droit, traditionnellement porté par les forces ukrainiennes. McBeth pense également que la vidéo date de l'été.
Pour les autorités ukrainiennes, cela ne fait aucun doute: la vidéo montre la décapitation d'un prisonnier de guerre ukrainien de la part d'un soldat russe.
«Comme ces monstres tuent facilement. Cette vidéo de l'exécution d'un prisonnier de guerre ukrainien, le monde doit la voir. C'est une vidéo de la Russie comme elle est», a affirmé le président Volodymyr Zelensky dans une vidéo publiée sur Instagram. «Peines de prison aux meurtriers, tribunal à l'Etat du mal», a-t-il renchéri.
De son côté, le chef de la diplomatie ukrainienne Dmytro Kouleba a estimé que la Russie était «pire que l'Etat islamique», organisation djihadiste qui filmait les exécutions de ses otages, notamment par décapitation.
Les services secrets ukrainiens (SBU) ont ouvert une enquête sur la publication de la vidéo.
Moscou a réagi de manière prudente ce mercredi. «Il s'agit bien sûr d'images horribles», a dit à la presse le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov, avant d'ajouter:
D'ordinaire, les responsables russes se bornent à nier toute implication de soldats russes dans des crimes de guerre, et accusent l'Ukraine d'orchestrer des mises en scène.
La prudence était également de mise du côté des réactions internationales. L'ONU s'est dite «horrifiée» mercredi par les images. Elle évoque aussi une seconde vidéo montrant «les corps mutilés, apparemment de prisonniers de guerre ukrainiens», et appelle en conséquence à ce que «ces incidents fassent l'objet d'une enquête réelle et que les auteurs rendent des comptes».
De son côté, l'Union européenne demandera «des comptes à tous les auteurs et complices de crimes de guerre» en Ukraine, a déclaré mercredi une porte-parole du chef de la diplomatie européenne.
L'UE n'a «pas d'informations sur la véracité de la vidéo», mais «si elle est confirmée, il s'agit d'un nouveau rappel brutal de la nature inhumaine de l'agression russe», a affirmé Nabila Massrali, porte-parole du chef de la diplomatie européenne Josep Borrell, lors d'une conférence de presse quotidienne à Bruxelles.
Cette vidéo n'est pas un cas isolé. Depuis le début de l'invasion russe de l'Ukraine en février 2022, Kiev et Moscou s'accusent mutuellement de mauvais traitement de prisonniers constituant des crimes de guerre, souvent avec des vidéos à l'appui.
Début mars, une vidéo montrant l'exécution présumée d'un prisonnier de guerre ukrainien par des soldats russes a provoqué un choc en Ukraine.
En novembre, le Kremlin s'était indigné de deux vidéos montrant l'exécution présumée d'une dizaine de militaires russes qui venaient de se rendre aux forces ukrainiennes.
Fin mars, l'ONU a accusé les forces ukrainiennes et russes d'avoir commis des exécutions sommaires de prisonniers de guerre pendant l'invasion. (asi avec ats)