Entre les excréments des rats et les toiles d'araignées, la minuscule caméra, pas plus large qu'un ongle, se glisse dans l'interstice. Le faisceau de la lampe torche balaie la pièce. Les murs sont rugueux. Le plafond, en forme de chevron, étonnamment lisse, est composé de solides blocs de calcaire. A l'intérieur de la chambre, nulle momie, nul trésor enfoui. Juste un couloir de neuf mètres de long, deux mètres de large. Totalement vide.
Un couloir qui ne mène nulle part.
Pas de de sarcophage doré, de hiéroglyphes par milliers, ou de meubles majestueux, certes, mais la simplicité brute de ce passage ne fait qu'approfondir son mystère. A quoi peut donc bien servir ce corridor laborieusement construit vers nulle part?
C'est la question sur les lèvres des archéologues ce jeudi, au moment d'annoncer leur découverte au monde. Ils sont les premiers hommes, en 4500 ans, à poser les yeux sur ce lieu jusqu'alors inconnu, situé juste juste sous la surface de la pyramide de Gizeh. L'une des septièmes merveilles du monde, la dernière encore debout.
«Pourquoi, en tant qu'ancien Egyptien, construiriez-vous une pièce comme celle-ci? Généralement, quand ils construisaient ces chevrons, c'est parce qu'ils voulaient protéger quelque chose», explique le chercheur Christian Grosse, ce jeudi, devant un parterre de curieux et de journalistes, réunis au pied de la pyramide.
Selon les scientifiques, l'étrange couloir pourrait servir d'élément architectural pour redistribuer le poids autour de l'entrée du monument... ou de passage vers une autre chambre, cachée plus profondément dans la pyramide, encore à découvrir.
«Nous allons continuer notre analyse afin de voir ce que nous pouvons faire… pour comprendre ce que nous pouvons découvrir en dessous, ou juste au bout de ce couloir», promet Mostafa Waziri.
La grande pyramide de Gisey est l'un des monuments les plus anciens et les plus hauts de la planète. Son âge extrêmement avancé (elle a été bâtie sur sous le pharaon Khéops, qui a régné d'environ 2609 à 2584 avant Jésus Christ), et son importance historique, rendent tout creusement ou forage impossible.
Pour les archéologues désireux de percer ses mystères, il fallait trouver une parade. Leur idée? L'imagerie infrarouge, une technologie non invasive qui permet de sonder les entrailles et les sections inexplorées de la structure, tout la laissant intacte. Leur but? Découvrir d’éventuels vides ou structures internes méconnues.
Scannée régulièrement depuis 2015, la grande pyramide révèle un premier espace vide à environ sept mètres au-dessus de l'entrée principale. En 2017, une immense cavité de la taille d’un avion de ligne est détectée au cœur de la pyramide. La découverte du siècle, selon un égyptologue indépendant au Times.
Sept ans et des dizaines de tests radars et ultrasons plus tard, un membre de l'équipe trouve, enfin, la solution pour s'immiscer sous la surface de la pyramide sans l'endommager. Un endoscope à la pointe de la technologie de cinq millimètres de diamètre, glissé dans un minuscule joint entre les pierres qui composent les chevrons. «Nous avons été surpris que cela fonctionne. C'est très excitant quand on le voit», se réjouit le Docteur Christian Grosse.
La première étape d'une odyssée au cœur des entrailles de la grande pyramide, qui est loin d'avoir dévoilé tous ses mystères. (mbr)