«C'est une nouvelle page de l'histoire de la Syrie, où nous remplaçons l'injustice par la justice et la souffrance par la miséricorde», a déclaré jeudi Ahmad al-Chareh après la lecture de la déclaration constitutionnelle par un porte-parole du comité. Cette charte garantit notamment la liberté d'expression et les droits des femmes.
La prise du pouvoir par une coalition radicale islamiste dirigée par Ahmad al-Chareh le 8 décembre dernier a mis fin à la dictature du clan Assad après un règne sans partage sur la Syrie pendant plus d'un demi-siècle. Les nouvelles autorités ont aboli la Constitution et dissous le Parlement, qui était une chambre d'exécution des décisions du pouvoir. Nommé en janvier président par intérim, il a affirmé qu'il faudrait quatre à cinq ans pour organiser des élections dans le pays assoiffé de liberté.
L'annonce de la déclaration constitutionnelle intervient peu après des massacres commis dans l'ouest de la Syrie, les pires violences depuis l'arrivée au pouvoir le 8 décembre de la coalition menée par le groupe islamiste radical sunnite Hayat Tahrir al-Cham (HTS).
Ces massacres perpétrés à la suite d'attaques de fidèles du président déchu, Bachar al-Assad, ont fait 1476 morts, pour la plupart des membres de la minorité alaouites dont il est issu, selon un bilan actualisé de l'Observatoire syrien des droits de l'homme.
La nouvelle déclaration constitutionnelle, annoncée lors d'une conférence de presse au palais présidentiel à Damas, établit une séparation stricte des pouvoirs en Syrie. Elle garantit la liberté d'expression et les droits «politiques et économiques» des femmes.
Le porte-parole du comité de rédaction, Abdel Hamid al-Awak, a déclaré qu'une commission électorale supérieure serait formée pour superviser les élections du Parlement. Selon la déclaration constitutionnelle, il appartient au président intérimaire de «nommer le tiers» des membres de la future assemblée, «seule responsable du processus législatif».
Le président de la République exerce le pouvoir exécutif, assisté des ministres dans l'exercice de ses fonctions, d'après le texte. La déclaration constitutionnelle a donné au président un seul pouvoir exceptionnel, celui de déclarer l'état d'urgence.
La déclaration garantit «un large éventail de droits et de libertés, notamment la liberté d'opinion, d'expression, de la presse», tout en garantissant aux femmes «leurs droits sociaux, économiques et politiques», selon Abdel Hamid al-Awak.
La jurisprudence islamique reste toutefois «la source principale» de la législation et l'islam la religion du président, comme auparavant.
La déclaration constitutionnelle prévoit par ailleurs la formation d'une «commission de justice transitionnelle», visant notamment à rendre justice aux «victimes et survivants» de la dictature.
Elle souligne sur un autre plan «l'indépendance» de la justice et prohibe «la mise en place de tribunaux d'exception» dont les Syriens ont gravement souffert par le passé. Elle mentionne enfin «la nécessité de former un comité pour rédiger une constitution définitive».
L'administration dirigée par les Kurdes dans le nord-est de la Syrie a critiqué la déclaration constitutionnelle. La déclaration «contredit la réalité de la Syrie et sa diversité», a jugé l'administration, ajoutant qu'elle «ne reflète pas l'esprit du peuple syrien et de ses différentes composantes, des Kurdes aux Arabes, en passant par les Syriaques, les Assyriens et les autres composantes nationales syriennes».
(sda/ats/afp)