Il est tombé dans une embuscade russe. Un missile antichar a percuté le véhicule d'Ilia Mykhalchuk, militaire ukrainien de 36 ans. Ses blessures ont failli lui coûter la vie: ligaments de chair déchiquetée à l'endroit où se trouvait son bras droit, amas d'éclats d'obus dans son bras gauche, dents cassées.
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Ce sont des mercenaires russes de Wagner qui ont pris pour cible la colonne de chars militaires d'Ilia Mykhalchuk. Grièvement blessé, il est sorti en titubant de l'épave en feu, est tombé sur le sol encore gelé et a utilisé ses dents cassées pour appliquer un garrot à ses bras mutilés.
Ses assaillants sont tout de suite venus à sa rencontre, lui tirant dans les jambes. Mykhalchuk pensait que sa mort était imminente. «J'étais sûr qu'ils ne me captureraient pas.» C'est pourtant ce qui s'est passé.
Ilia Mykhalchuk estime que l'attaque a été si rapide qu'elle a probablement été planifiée. Un autre soldat ukrainien a été capturé en même temps que lui et des dizaines d'autres sont toujours portés disparus, probablement morts.
Le soldat ukrainien a été détenu pendant six semaines par les mercenaires de Wagner, au printemps 2023. Il a raconté au Washington Post ses 46 jours de détention brutale. Le groupe Wagner et le ministère russe de la Défense n'ont pas répondu aux questions du quotidien.
La cruelle campagne menée par les mercenaires de Wagner à Bakhmout en hiver et au printemps a coûté la vie à des milliers de personnes. Plusieurs milliers d'autres ont été grièvement blessées. Parmi elles, Ilia Mykhalchuk.
Wagner mercenaries captured Ilia Mykhalchuk outside Bakhmut.
— The Washington Post (@washingtonpost) August 15, 2023
They amputated his arms in a dark basement, he says, and subjected him to mind-bending psychological abuse. https://t.co/umiOVpdSDf
Durant sa détention, le soldat a perdu ses deux bras suite à une amputation. Il raconte que le personnel médical de Wagner a oublié de recoudre sa peau après l'intervention.
Après avoir subi plusieurs opérations de correction suite à sa libération, Mykhalchuk a été transféré dans un centre américain spécialisé dans les prothèses de bras, qui s'occupe désormais de sa rééducation; sa résistance aux blessures a suscité l'étonnement.
Après l'attaque, les mercenaires de Wagner lui ont enlevé ses bandages, raconte-t-il, les ont remplacés par des tuyaux en caoutchouc et les ont noués solidement. Le soldat a supplié ses assaillants de l'amputer du bras droit, ils ont refusé.
Après dix heures, Ilia Mykhalchuk a été emmené dans une cave sombre et mal aérée. Selon son récit, il y a passé les six semaines suivantes.
L'homme de 36 ans raconte en outre que son bras gauche aurait pu être sauvé. Mais les mercenaires ont refusé de lui fournir une assistance médicale jusqu'à la fin de l'interrogatoire, qui a duré des heures, selon ses dires.
Le prisonnier ukrainien a ensuite été mis sous sédation. Quand il s'est réveillé, il lui manquait les deux bras. Ceux-ci avaient été bandés sans être suturés. Lorsqu'il s'est évanoui pendant les interrogatoires, on lui a injecté une substance qui l'a maintenu éveillé, raconte-t-il.
Les interrogatoires ne portaient pas sur des informations tactiques, décrit Ilia Mykhalchuk. Il suppose que le seul objectif était de le torturer psychologiquement.
Pendant la captivité, d'autres ont été torturés physiquement, raconte le soldat. Il n'en a toutefois pas été témoin. Cependant, les pires sévices se produisent au moment de la capture, selon lui. Certains auraient ainsi eu les doigts coupés ou été enflammés avec de l'essence avant leur emprisonnement.
D'après l'Ukrainien, les autres prisonniers se sont bien occupés de lui. Ils le nourrissaient, lui donnaient son bain et le distrayaient de la douleur.
La nuit, les mercenaires annonçaient toujours qui serait libéré le lendemain matin. Le nom d'Ilia Mykhalchuk est apparu le 15 avril lors d'un échange de prisonniers. Il ne sait toujours pas ce qu'il était advenu des dizaines d'autres soldats qui étaient avec lui au moment de l'attaque de Wagner.
Traduit et adapté de l'allemand par Tanja Maeder