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Ukraine: Comment l'hiver va impacter la guerre

Kharkiv, Ukraine - January, 31, 2022: A soldier in white camouflage with a machine gun stands near armored personnel carriers. The Ukrainian army is preparing to repel the attack of Russia
Avec le retour du froid et de la neige, les combats en Ukraine vont prendre une autre dimension.Shutterstock

L'hiver va-t-il changer la guerre en Ukraine? 5 points pour comprendre

L'hiver approche. Sur le front ukrainien, le retour du froid, du mauvais temps et de la nuit vont-ils influencer le cours de la guerre? On fait le point avec Alexandre Vautravers, expert en stratégie.
03.09.2022, 07:5603.09.2022, 11:47
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«L'été est la saison de la guerre», nous rappelle d'emblée au téléphone Alexandre Vautravers, rédacteur en chef de la Revue militaire suisse, stratège et historien, contacté pour évoquer l'hiver qui approche dans le conflit ukrainien.

Car d'ici à quelques semaines, le mercure pourrait déjà passer en dessous de zéro l'hiver. La fin de la belle saison imposera aux deux armées des enjeux supplémentaires.

Les choses vont-elles devenir difficiles pour les belligérants ukrainiens et russes? Cinq points pour comprendre:

Aucune armée n'a l'avantage

On est tenté de briser le suspense tout de suite: aucune des armées ne disposera d'un avantage décisif lors de l'hiver à venir.

Face au froid et à la neige, Russes comme Ukrainiens vont devoir adapter leurs manœuvres et tactiques en fonction des véhicules, troupes et matériel à disposition.

«Les deux armées sont équipées d’engins chenillés, très bien adaptés aux conditions et au terrain», explique Alexandre Vautravers. Les unités de combat pourront progresser sur les sols froids ou boueux sans trop de problèmes.

Kharkiv, Ukraine - January, 31, 2022: A column of armored personnel carriers of the Ukrainian army is driving along a snow-covered road. Preparations for the Russian invasion of Ukraine
Véhicules blindés ukrainiens en exercice à Kharkiv, fin janvier 2022, un mois avant le début de l'invasion russe.Shutterstock

Les armées essaient toutefois d'avancer au maximum avant le début de l'hiver, à l'image de la récente contre-offensive ukrainienne sur Kherson:

«On comprend les raisons qui poussent chacun des deux camps à pousser leurs offensives afin de gagner le plus de terrain possible avant la pause hivernale»
Alexandre Vautravers

«Les conditions topographiques et météorologiques sont très différentes d’un endroit à l’autre du front, qui s’étend sur près de 900 kilomètres», rappelle Alexandre Vautravers. Il poursuit:

«La situation ou les conditions météorologiques n’avantagent pas une partie ou l’autre»

Le gros problème? Le ravitaillement

Le talon d'Achille que les camps pourront exploiter se situe ailleurs: la logistique. Un aspect stratégique dont les Russes avaient déjà souffert dans les premiers mois de la guerre.

«Le nombre de camions de ravitaillement est insuffisant et les routes en mauvaise condition sont déjà un problème par beau temps», estime l'expert.

«Les états-majors des deux camps s’attendent à pouvoir poursuivre les combats au cours des 2-4 prochaines semaines. Par la suite, les pluies et le gel pourraient gravement nuire aux transports routiers, empêchant les unités d’être ravitaillées efficacement.»
Alexandre Vautravers
Kharkiv, Ukraine - January, 31, 2022: The tanker looks out of the hatch of the tank. The Ukrainian army is preparing for the invasion of Russian troops
Faire rouler un tank, ça consomme un max. Même l'hiver.shutterstock

Car les munitions et l'essence doivent continuer à arriver, hiver comme été. «Il faut 30 tonnes de fuel et 10 tonnes de munitions par bataillon mécanisé pour un jour de combat», indique Alexandre Vautravers. La Russie, par exemple, en compte environ 60 actifs au front. Faites le calcul.

Le Dniepr gelé, une fausse bonne idée

Quid du fleuve Dniepr, qui forme une barrière naturelle de démarcation sur certaines parties de la ligne de front et a l'habitude de geler en hiver: une opportunité pour l'une ou l'autre armée d'y faire passer des véhicules blindés?

L'expert est sceptique, car pour faire traverser les véhicules, il faut aménager les berges du fleuve et effectuer d'importants travaux de terrassement. «Cela peut prendre des heures, le tout à découvert», explique-t-il, sous le feu ennemi.

«Paradoxalement, ce n'est pas la rivière elle-même qui pose problème, c'est le franchissement des berges»
Alexandre Vautravers
Aerial drone view. Pedestrian bridge over the frozen Dnieper River in Kiev. Cloudy frosty winter morning, frosty pattern on ice.
Le Dniepr (ici à Kiev) a l'habitude de geler en hiver. Mais les berges sont difficiles à franchir et laissent les troupes à découvert.Shutterstock
«Le matériel de franchissement utilisé pour ces opérations est coûteux et rare, il ne peut donc pratiquement pas être remplacé s’il est endommagé ou détruit.»
Alexandre Vautravers

Le Dniepr est donc destiné à rester une ligne de démarcation naturelle pour les deux armées dans les prochains mois.

La population civile également touchée

En marge des zones de guerre, c'est aussi la population civile présente autour des zones de guerre qui va souffrir du froid. Des problèmes en approvisionnement, en chauffage et en combustible sont à prévoir.

Pour Alexandre Vautravers, qui fait ici parler son expérience dans l'humanitaire, «la différence est nette entre les milieux ruraux et urbains».

«En ville, l'hiver, tout devient compliqué»
Alexandre Vautravers

En raison de la densité de la population en zone urbaine, «la situation devient très rapidement critique». «Dans les campagnes, il est toujours possible d'aller couper du bois pour se chauffer et trouver des solutions, compléter son assiette par l’élevage ou la culture.»

Une reprise au printemps?

Si aucune trêve n'est en vue et la paix encore moins, l'intensité des combats pourrait diminuer pendant l'hiver... pour mieux repartir au printemps prochain:

«On sait que les états-majors des deux camps travaillent aujourd’hui aux opérations du printemps et de l’été prochains»
Alexandre Vautravers

«Les uns et les autres sont en train de réparer, remettre en état, mobiliser des engins de réserve afin de compléter les unités», explique le rédacteur en chef de la Revue militaire suisse.

Car les pertes matérielles ont été lourdes. Du côté russe, on a perdu entre 30 et 40% des véhicules de combat (chars, artillerie, etc.). Chez les Ukrainiens, le chiffre montre même de 50 à 60%, explique Alexandre Vautravers.

Old T-64 tanks covered by snow stands at the depot site at the Tank Repair Plant in Kharkiv, Ukraine, Monday, Jan. 31, 2022. Kharkiv is just 40 kilometers (25 miles) from some of the tens of thousands ...
Un dépôt de tanks T-64 à Kharkiv, avant l'invasion russe. keystone
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Video: watson
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