Le tweakment, vous connaissez? C'est un terme qui, dans le monde de l'esthétique, fait référence à des procédures qui se veulent «subtiles», «peu invasives» et surtout, à «peine perceptibles» - du moins, selon le discours des instituts et cabinets de beauté.
Les tweakments renvoient en partie aux injections d’acide hyaluronique, au botox et aux peelings chimiques, lesquels sont rangés par les amateurs de l'aiguille dans la case «circulez, y a rien à voir» sur l'échelle du ravalement de façade.
Face à l'accessibilité grandissante des «tweakments», certains praticiens ont décidé de pousser un coup de gueule (entre deux injections). C'est le cas du docteur Michael Prager, aka le «Roi du Botox», comme il se fait appeler par le Tout-Londres, où il tient une clinique très courue.
«Avoir recours à la chirurgie, c'est devenu une tendance à la mode chez les moins de 30 ans», déplore-t-il dans les colonnes du média britannique The Guardian.
C'est que, désormais, retoucher un petit peu son visage par-ci par-là n'a plus rien de tabou. A cet effet, les stars du petit ou grand écran endossent un rôle majeur. Poussées par le public à se montrer de plus en plus transparentes sur les interventions qu'elles subissent, les célébrités n'hésitent plus à passer aux aveux face caméra, ou à en faire la promotion de façon ouverte.
Citer la famille Kardashian et le monde de la télé-réalité est un impondérable. Dans leur émission, les «soeurs K» n'ont eu de cesse de parler de leurs «corrections», élevant presque la chirurgie, si l'on en croit leurs mots, au stade d'oeuvre artistique: fillers pour les lèvres pour la jeune Kylie, traitement au laser ou botox pour Kim. Sans oublier Khloé qui considérait lors d'une interview que la chirurgie était «presque comme du maquillage» ou comme le fait de changer de couleur de cheveux.
Au début de l'année, le mannequin Bella Hadid avouait dans une interview, parue dans le magazine Vogue, avoir eu recours à la chirurgie esthétique pour refaire son nez, à l'âge (record) de...14 ans.
Bella Hadid reveals to Vogue that she had a nose job at 14, but now regrets it:
— Pop Crave (@PopCrave) March 15, 2022
“I wish I had kept the nose of my ancestors. I think I would have grown into it.”
🔗: https://t.co/fKjuQBddoL pic.twitter.com/oY0tAz65HD
Plus récemment, la «mean girl» de Selling Sunset sur Netflix, Christine Quinn, se faisait un malin plaisir d'organiser les portes ouvertes d'une villa de luxe sur le thème...Burger & Botox.
Et désormais, les hommes font bel et bien partie du bassin d'aficionados de la petite aiguille. Exemple parlant, l'ancienne star de Disney, Joe Jonas, qui est apparu cet été dans une vidéo promotionnelle pour la toxine botulique Xeomin.
Oui, mais voilà, entre ces superstars et nous, il n'y a qu'un écran. Et bien peu de recul pour les plus jeunes qui réprouvent ce que renvoie leur miroir une fois ces improbables standards de beauté bien imprimés.
Si, à l'époque, la population plébiscitant l'aiguille se situait entre 35 et 60 ans, les 18-24 ans sont de plus en plus représentés, explique The Guardian.
«Les jeunes s'injectent de façon excessive, et en sont - malheureusement - très fiers», regrette encore le Docteur Prager.
Particulièrement touchés par les confinements successifs pendant la pandémie, les jeunes sont très influencés par les filtres auxquels ils ont recourt sur Instagram et TikTok.
Dans cette population, une part non négligeable souffre de trouble dysmorphique corporel (TDC), également connu sous le nom de dysmorphophobie. Ce trouble mental se caractérise par «une idée obsessive qu'une partie de son corps, voire son corps au complet, est rempli de défauts.»
Selon un spécialiste cité par The Guardian, sur le nombre total de patients qui ont recours à la chirurgie esthétique, pas moins de 10% d'individus souffrent de ce trouble. Et sur cette population, 80% en ressortiront...insatisfaits du résultat.
Un vrai cercle vicieux que les cabinets ne cherchent pas suffisamment à enrayer - bien au contraire. Et le docteur Prager de citer ses propres collègues - dont certains qu'il côtoie depuis plus de dix ans - rendus «méconnaissables» à la suite d'innombrables injections, nourrissant d'autant plus les désirs de changements auprès de leurs patients.
Au compteur, ce ne sont pas moins de 900'000 procédures recensées en 2021 sur sol britannique. L'engouement est tel qu'une membre de l'Association britannique des dermatologues, le Dr Tamara Griffiths, a tiré la sonnette d'alarme. La dermatologue considère que le nombre croissant d'enfants et d'adolescents recevant des injections de type Botox et de comblement dermique est «un phénomène inquiétant», révèle encore The Guardian.
Autre problème évoqué, le fait que l'ensemble de ces procédures requiert un portefeuille bien fourni. En conséquence, de nombreux jeunes avec peu de moyens tendent à se tourner vers des instituts peu réglementés, gérés par des praticiens parfois sous-qualifiés. Et, comme cela s'est vu à plusieurs reprises, de tels choix peuvent générer de vraies catastrophes médicales.
Face à ces dérives, et pour protéger les plus jeunes, note encore The Guardian, le Royaume-Uni a jugé bon de mieux réguler l'industrie cosmétique. Depuis 2021, certaines procédures sont désormais interdites aux mineurs, tandis qu'un régime national de licences a été implémenté. Mais de nombreuses voix s'élèvent encore, réclamant plus de fermeté.