Son nom est célèbre dans le monde entier: le parfumeur Jean-Paul Guerlain, l'ancien «nez» de la maison Guerlain, atteint de la maladie d'Alzheimer, a été victime de violences de la part de sa compagne, Kirsten Kragh Michelsen, une Franco-Danoise de 64 ans.
Comme le relaye Le figaro, la Cour d'appel de Versailles l'a reconnue coupable jeudi 12 janvier de harcèlement moral envers une employée de maison et de violence volontaire sur personne vulnérable, dans ce cas précis, Jean-Paul Guerlain, âgé de 83 ans. Kirsten Kragh Michelsen a été condamnée à quatre mois de prison avec sursis et 3000 euros de dommages et intérêts. Elle devra également verser 2000 euros d'amende à l'employée de la maison.
Selon un rapport publié en 2021 par le Bureau de l'égalité du canton de Vaud, en Suisse en 2019, on comptait 1140 femmes victimes des infractions enregistrées par la police dans le cadre des relations de couple pour 409 hommes. En 2021, les hommes représentaient environ 30% des victimes lésées par leur partenaire, selon l'Office fédéral de la statistique (OFS).
Si le verdict prononcé par la Cour d'appel de Versailles ne le mentionne pas en tant que tel, on peut tout de même parler de violences conjugales, dès le moment où celles-ci ont lieu au sein d'un couple vivant en ménage commun. En Suisse, certains de ces actes sont poursuivis d'office, mais on ne verra jamais de condamnation pour «violences conjugales», car il n'existe pas d'infraction pour un tel motif.
Mathilde Boyer, doctorante en droit à l'Université de Lausanne (Unil) – qui travaille sur la question de l'appréhension des violences conjugales par la justice suisse –, explique:
C'est en effet pour ces motifs que les hommes viennent consulter au Centre Lavi (aide aux victimes d'infractions) du canton de Vaud. Alain Noble, intervenant à Lausanne, raconte:
Les violences subies sont multiples: coups, blessures, menaces ou injures. Alain et ses collègues accompagnent ces hommes dans les démarches, font valoir leurs droits et peuvent les orienter vers des avocats. Ils peuvent également les placer dans des hébergements, si besoin. «En Suisse, il y a peu de centres d'accueil pour les hommes», précise-t-il. «Les victimes sont donc, par exemple, envoyées dans des hôtels, et le Centre Lavi prend en charge les frais.»
Outre les violences physiques, les hommes subissent, plus généralement, des violences psychologiques, comme le souligne Mathilde Boyer. Le problème, c'est qu'elles doivent être graves pour que l'on puisse porter plainte. Des intimidations ou humiliations, même répétées, ne peuvent souvent pas suffire.
Comment se sentent les victimes lorsqu'elles viennent demander de l'aide? Y a-t-il un tabou autour des violences conjugales subies par les hommes? Alain Noble explique que certes, c'est encore difficile pour un homme d'accepter ces situations, notamment parce que, dans l'imaginaire commun, c'est à lui «d'être fort».