Jusqu'à présent, les statistiques sur la violence domestique étaient surtout orientées vers la victime. L'étude la plus récente sur la question a demandé aux participants s'ils avaient eux-mêmes déjà fait subir des violences à leur partenaire.
15% des personnes interrogées ont répondu par l'affirmative. La violence est à considérer au sens large. Vous découvrirez ci-dessous ce que la majorité des personnes interrogées considère comme le seuil de tolérance.
Un cinquième des 26-45 ans a déclaré avoir eu recours à la violence au moins une fois. Ce chiffre est nettement inférieur chez les jeunes et les personnes âgées. Les statistiques liées au revenu du ménage sont similaires: 18% des personnes gagnant moins de 4000 francs par mois ont déclaré avoir été violentes. Parmi ceux qui gagnent plus de 10 000 francs par mois, ils sont 11%.
Cette étude a été commanditée par la Fédération Solidarité femmes de Suisse et du Liechtenstein. Les résultats montrent qu'un tiers de la population suisse a déjà subi des violences domestiques.
Ce sont les femmes qui sont le plus exposées à la violence dans leur vie amoureuse. Parmi celles qui ont participé à l'étude, 42% ont déclaré avoir subi des violences. Pour les hommes, ce chiffre se monte à 24%.
Les différences entre les genres sont les plus marquées. Mais les auteurs de l'étude ont également constaté des différences significatives entre les classes d'âge et entre les revenus. Les jeunes de moins de 25 ans sont nettement moins touchés par la violence. Les personnes âgées de 26 à 45 ans y sont le plus exposées. Près de la moitié des femmes de cette tranche d'âge ont déclaré avoir déjà subi au moins une fois des violences dans leur couple.
Les personnes dont le revenu est inférieur à 4000 francs ont également déclaré qu'elles avaient plus fréquemment subi des violences.
Les participants ont également été interrogés sur les raisons qui les pousseraient à mettre fin à une relation. Pour trois quarts des répondants, la violence est la première raison d'une séparation. Le contrôle et la méfiance suivent en deuxième position avec 55%. L'infidélité occupe la troisième place (48 %). En bas de la liste se trouve le désir non réalisé d'avoir des enfants (8%).
En plus des raisons de mettre un terme à une relation, les auteurs de l'étude ont également demandé quelles étaient les clés d'une relation heureuse.
Selon 80% des personnes interrogées, le respect mutuel est indispensable. La confiance en son partenaire également (57%), ainsi que l'espace et le temps pour soi (26%).
Il est tout à fait normal de vivre des disputes et d'avoir des différends lorsque l'on est en couple. Mais les avis divergent lorsqu'il est question d'aborder les désaccords. Tout le monde n'a pas le même seuil de tolérance. Dans l'étude, les personnes interrogées ont dû indiquer les comportements qu'elles trouvent encore acceptables en cas de conflit et ceux qu'elles condamnent.
Le fait d'élever la voix de temps en temps n'est pas considéré comme un problème par 43% des personnes interrogées. 34% d'entre elles pensent que les portes qui claquent ne sont pas un problème. Enfin, 31% des participants trouve normal de critiquer son conjoint.
Au-delà de cela, la tolérance diminue rapidement. Seuls 8% des participants pensent qu'il va de soi de casser une assiette. En ce qui concerne la menace de frapper ou d'utiliser une arme, ils sont 4% à l'accepter.
Les hommes et les femmes ont respectivement évalué ces comportements de manière pratiquement identique. Il convient cependant de noter que plus de la moitié des participants à l'étude condamne les comportements énumérés ci-dessus.
L'enquête demandait également aux participants si les auteurs d'actes de violence présentent certaines caractéristiques.
La majorité des personnes questionnées est d'avis que les hommes deviennent violents à cause de l'alcool (80%). En deuxième position, 68% pense que les hommes sont plus susceptibles de commettre des actes de violence s'ils en ont eux-mêmes subi durant l'enfance. Toutefois, en y regardant de plus près, les auteurs de l'étude ont constaté que les femmes sont nettement plus nombreuses que les hommes à avoir cette opinion (voir le deuxième graphique du diaporama).
64% des femmes interrogées pensent que les hommes qui ne contrôlent pas leurs fantasmes de violence sont plus susceptibles d'être violents. Chez les hommes, seuls 57% partagent cette perception.
Les femmes sont plus nombreuses que les hommes à penser qu'une faible estime de soi peut mener à la violence (57% contre 44%). En revanche, les hommes sont beaucoup plus nombreux que les femmes à penser qu'une religion non chrétienne peut entraîner un comportement plus violent (29% contre 13%).
Il n'en va pas tout à fait de même lorsqu'il s'agit de savoir ce qui pousse les femmes à devenir violentes. Comme pour les hommes, l'alcool occupe la première place avec 74%. Cependant, ce facteur est suivi par celui de la jalousie. Plus d'un participant à l'étude sur six est d'avis que les agresseuses le deviennent par jalousie.
Comme pour la maltraitance exercée par l'homme, les différences de perception sont visibles en fonction du sexe. Par exemple, sept femmes interrogées sur dix pensent que les auteurs de violences féminines ont dû subir des violences dans leur enfance, alors que seulement la moitié des homme sont de cet avis (voir le deuxième graphique du diaporama).
Les répondants devaient également se prononcer sur les stéréotypes de genre et les modèles de rôle. Près de 60% des participants à l'étude sont plutôt d'accord avec l'affirmation selon laquelle les femmes sont plus solidaires et empathiques que les hommes.
Un tiers des participants pense également que les hommes sont plus carriéristes que les femmes. Ils sont également d'avis que les femmes sont plus aptes à gérer le ménage et à s'occuper des enfants.
Si l'on examine les réponses en fonction de l'âge, une tendance se dégage clairement: en général, les participants plus âgés sont davantage d'accord avec les déclarations que les plus jeunes (voir le deuxième graphique du diaporama). Par exemple, 55% des personnes âgées de plus de 65 ans pensent que les femmes sont meilleures que les hommes pour tenir la maison et élever les enfants.
Les hommes sont également sujets à des stéréotypes. Un homme sur deux et une femme sur cinq pensent qu'un homme doit être prêt à défendre sa famille en utilisant la violence.
Les personnes plus âgées sont également beaucoup plus convaincues que les enfants souffrent lorsque leur mère travaille beaucoup. 39% des hommes interrogés pensent aussi qu'un homme doit parfois faire preuve de fermeté. Parmi les femmes interrogées, seules 16% étaient de cet avis.
Les résultats de l'étude et le nombre élevé de féminicides commis ces dernières semaines dressent un tableau grave, selon un communiqué de presse de l'organisation faîtière des foyers pour femmes. Compte tenu des nombreuses femmes qui ont déjà subi des violences de la part de leur partenaire, les féminicides ne sont apparemment que la partie émergée de l'iceberg, en conclut l'étude.
Pour de nombreuses femmes victimes de violence et leurs enfants, les foyers d'accueil pour femmes représentent un lieu important où se rendre. Il s'agit d'une opportunité de quitter la spirale de la violence. Selon l'étude, se réfugier dans un espace dédié est une étape courageuse dans la vie d'une femme.
Dans cette étude, plus de 90% des personnes interrogées ont déclaré qu'il serait judicieux que le secteur public consacre davantage de fonds aux campagnes de lutte contre la violence domestique. Dans sa propre campagne, la Fédération Solidarité femmes de Suisse et du Liechtenstein utilise les véritables effets personnels de quatre femmes pour montrer ce qu'elles avaient avec elles lorsqu'elles ont trouvé refuge dans la maison d'accueil.
A savoir qu'en signant la Convention d'Istanbul en 2018, la Suisse s'est engagée à prendre des mesures globales contre la violence sexiste et domestique.
Traduit de l'allemand par Anaïs Rey