Les algorithmes sont devenus un facteur central de notre époque, portés par les réseaux sociaux. Leur impact est tel, comme l'a été la télévision, qu'ils ont créé une branche des sciences économiques: l'économie de l'attention. Aujourd'hui, cette attention est devenue une valeur précieuse. Gérald Bronner, professeur en sociologie et auteur de L'Apocalypse cognitive, expliquait sur les ondes de France Inter en 2021:
Tout est dit, la brèche est ouverte pour les géants de la tech (les GAFAM en tête de liste), pour les publicitaires. Fixer l'attention du consommateur est devenu une ressource rare pour faire grimper les enchères et faire avaler un maximum de publicités à l'utilisateur.
Depuis le début du 20e siècle, l'économie de l'attention est un terme qui a son poids dans notre ère. Herbert Simon, en 1971, économiste, prix Nobel en 1978 et considéré comme une référence à ce sujet, parlait d'une abondance de l'information, créant une rareté de l'attention.
Arthur Grimonpont, auteur d'un livre intitulé L'Algocratie, prenait la parole dans le magazine Marianne, sur un bien particulièrement délicat, bien qu'immatériel: notre temps d’attention. Voilà ce qu'on appelle l'économie de l'attention.
Les réseaux sociaux (Snapchat, Facebook, Instagram, TikTok) se battent pour nous arracher du temps de cerveau. Ce qu'Arthur Grimonpont nous indique grâce à une formule assez savoureuse:
L'intelligence artificielle de recommandation se cache derrière ce flux continu d'informations. En clair: les informations sont pêchées pour vous coller à votre écran de téléphone et retenir votre attention le maximum de temps possible.
Arthur Grimonpont traduit l’IA de recommandation comme «une machine à extraire l’attention». Avec les médias sociaux, l'objectif est de détourner l'attention, de créer une dynamique sociale et culturelle pour vendre de la marchandise ciblée.
Arthur Grimonpont rappelle que le phénomène n'est pas neuf, mais l'arrivée des réseaux sociaux a tout simplement été extraordinaire en termes de capacité «à capter notre attention». Comme le souligne l'essayiste, les réseaux sociaux ont réussi avec une réelle fulgurance à s'imposer comme premier usage du Web, «majoritairement grâce à l'algorithme de recommandation», confirme M. Grimonpont.
Il profite pour articuler des chiffres qui donnent le tournis:
«Sur ce total, 70% sont le fruit d’une recommandation algorithmique», précise-t-il dans les colonnes de Marianne. Et de conclure: «les algorithmes construisent notre représentation du monde».