L’intelligence artificielle (IA) est présentée comme un remède contre pour la lutte contre le dérèglement climatique. Mais, ironie du sort, l’IA n’est pas gratuite en énergie et pompe beaucoup d'électricité dans le réseau mondial.
La montée en flèche de l'industrie de l'IA exerce, par exemple, une forte pression sur le réseau électrique vieillissant des Etats-Unis. En conséquence, un article de Bloomberg souligne que les centrales à charbon (ultra polluantes) restent d'actualité. Le média américain avance l'exemple de la région de Kansas City, où le groupe Meta (Facebook, WhatsApp, Instagram) est en train d'injecter de grosses sommes d'argent dans l'IA.
Le média américain pointe un détail intéressant: la société de production énergétique qui dessert la région, Evergy, a annoncé en juin qu'elle retardait de cinq ans, soit 2028, la fermeture d'une centrale à charbon.
Comme le détaille Bloomberg, les centres de données IA sont différents des centres de données traditionnels, qui sont déjà de redoutables consommateurs d'énergie. La différence est liée aux unités de traitement graphique spécialisées qui effectuent des tâches plus exigeantes que les puces informatiques classiques. L'intelligence artificielle générative, du type ChatGPT, est très énergivore. Nous parlons là de machine learning, un processus très gourmand en énergie.
Le boss d'OpenAI, Sam Altman a expliqué que sa société devait trouver des solutions pour dénicher de nouvelles sources d'énergie. Il a par ailleurs investi plusieurs centaines de millions dans une start-up nommée Helion Energy, en 2021, active dans la fission nucléaire. Une source d'énergie qui est sujet à de nombreux débats.
Interrogé par Yahoo Finance, le professeur d'ingénierie électrique et informatique Sajjad Moazeni détaillait:
Des propos qui remettent une pièce dans la machine et exposent l'impact carbone de l'intelligence artificielle. Arijit Sengupta, CEO et fondateur d'Aible, parlait même «d'une très grave crise énergétique à cause de l'IA si des problèmes concernant les sources d'énergie n'étaient pas résolus».
Pour Thomas Jacobsen, porte-parole d'Infomaniak, le problème n'est pas le data center en tant que tel, mais la manière dont ces infrastructures sont bâties:
Face aux défis actuels, l'entreprise suisse cherche des solutions. Ses centres de données en production ne sont pas climatisés et utilisent exclusivement de l'air naturel. Le nouveau data center d’Infomaniak revalorisera même la chaleur émise par les serveurs pour chauffer des ménages. «Le numérique consomme de l’électricité qui est transformée en énergie thermique. Cette énergie peut être intégralement réutilisée», explique Thomas Jacobsen. Pour résumer la manœuvre:
Ainsi, aux yeux de la société suisse, il est primordial de rapprocher ces centres de données des zones urbaines afin que l'énergie puisse être réutilisée au mieux.
La Big Tech, elle, préfère mettre la gomme et s'empresse à générer du profit alors que les questions environnementales sont au centre des préoccupations de notre époque:
Johan Rochel, chercheur à l'EPFL et philosophe valaisan, co-fondateur du laboratoire sur l'innovation Ethix, ne cache pas la forte demande en électricité de ces armées de data centers. D'après lui, «les outils de l'intelligence artificielle vont fournir des arguments pour améliorer l’efficience écologique». Il l'affirme:
Selon la société Infomaniak, si le numérique n’est plus un problème d'un point de vue de sa consommation énergétique, «ça ne veut pas dire que les IA ne consomment pas des matières premières qui ont un lourd impact sur la planète». Or, «plus le temps avance, plus il devient urgent de revaloriser au moins l’énergie thermique des data centers», renseigne Thomas Jacobsen.
En effet, rien qu'aux Etats-Unis, la consommation électrique de ces seuls centres de données devrait tripler par rapport aux niveaux de 2022 d'ici la fin de la décennie. L'information provient d'une analyse du Boston Consulting Group.
Problème: les énergies renouvelables (solaire, éolien et gaz) ne suffiront pas à couvrir ces nouveaux besoins, selon des experts interrogés par Bloomberg.
Pour Thomas Jacobsen, ce sont les décideurs politiques qui doivent prendre en main ces changements: