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On a mangé dans le meilleur resto du monde à Lima: le Central

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On a mangé dans le meilleur resto du monde

Le Central de Lima a été élu meilleur restaurant du monde. On a entrepris le voyage culinaire du Pacifique aux Andes mis en scène par le célèbre chef péruvien Virgilio Martínez.
20.05.2024, 11:5520.05.2024, 11:55
Susanna Petrin / ch media
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4200 MASL. C'est ce qui est écrit sur le menu à côté d'un plat de maïs, de kiwicha et de feuilles de patate douce. Est-ce le prix d'un plat au «Central»? Non, car la monnaie péruvienne est le soles, abrégé en SOL; 4200 soles correspondraient à environ 985 francs. Ce serait cher pour l'un des quatorze plats d'un menu de dégustation, même dans le meilleur restaurant du monde – et c'est justement le Central à Lima qui porte ce titre. Cela fait plusieurs années que les critiques gastronomiques le classent en tête des 50 meilleurs restaurants du monde.

4200 MASL signifie 4200 mètres au-dessus du niveau de la mer (meters above sea level). En 2012, le chef du Central, Virgilio Martínez, a eu l'idée de décliner sa cuisine péruvienne en fonction des différents degrés d'altitude et donc des écosystèmes. Son raisonnement: à la même altitude, plantes et animaux devraient également donner une symbiose intéressante au niveau du goût. «Du fond de la mer jusqu'au sommet des montagnes, nous voulons présenter le Pérou de manière verticale», dit-il dans la série Netflix primée Chef's Table.

Dégustation à différentes altitudes

En Suisse, un cuisinier aurait de la peine à trouver des ingrédients utilisables à 4200 mètres d'altitude. Mais Virgilio Martínez a la chance de vivre dans l'un des pays les plus riches et diversifiés du monde. Au Pérou, toutes sortes de plantes, d'animaux – et même des hommes – prospèrent encore à plus de 5000 mètres d'altitude. Depuis des millénaires, des paysans font paître leurs alpagas jusqu'aux plus hautes altitudes des Andes. Ils y cultivent du maïs, du quinoa, de l'amarante, des tomates, des pommes de terre et toutes sortes d'autres tubercules. On dit qu'il existe au Pérou 3500 variétés de pommes de terre comestibles et 600 variétés de maïs. Mais le Pérou n'a pas que des montagnes, il a aussi l'océan Pacifique, la côte, le désert, la forêt tropicale et la forêt de nuages. Le pays abrite 28 des 32 zones climatiques du monde.

Au Central, il s'agit donc de dépasser littéralement les frontières culinaires. Le menu de dégustation fluctue entre quinze mètres sous le niveau de la mer et 4200 mètres d'altitude – un voyage gustatif plein de hauts et de bas. La plupart des goûts et des consistances sont nouveaux, certains nécessitent vraiment une période d'adaptation.

Virgilio Martínez avec le chef Yusuke Takada.
Virgilio Martínez avec le chef Yusuke Takada.Image: instagram virgiliocentral

Le meilleur cuisinier du monde en fait voir de toutes les couleurs à ses clients. Il veut leur faire goûter le vrai Pérou, les tubercules terreux des Andes, les courants marins chauds du Pacifique, les rochers noirs dans le ressac, le goût fruité et humide de l'Amazonie. Les algues aux reflets émeraude que Martínez a trouvées dans les ruisseaux de montagne andins ressemblent à des billes. La couche supérieure d'un plat de crevettes est colorée de noir par de la peau de calamar carbonisée et pulvérisée. Des algues spirulines ornent un plat de bleu éclatant. L'oursin a un goût de mer âpre, le sirop de tubercule de yacon est sucré. Le chef en personne vient à table pour servir ce liquide ressemblant à du miel dans l'un des petits pots fabriqués à la main pour accompagner une pomme de terre volante (papa voladora). Nous nous trouvons maintenant à 1350 mètres d'altitude, dans une forêt tropicale de haute altitude.

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Est-ce encore de la cuisine ou déjà de l'alchimie, voire de l'art? Le restaurant comprend un centre de recherche appelé Mater Iniciativa. Son équipe explore le pays à la recherche de nouveaux aliments potentiels pour découvrir leur comestibilité et leurs potentiels. Les chercheurs travaillent en étroite collaboration avec la population locale, généralement indigène. Virgilio Martínez et sa sœur Malena, la scientifique à la tête de ce centre, ont parcouru le Pérou pendant plusieurs années, vivant, cuisinant et travaillant avec des populations locales.

Assaut permanent sur toutes les papilles gustatives

Avant de pouvoir redécouvrir ainsi son pays, Martínez a dû le quitter. Le Pérou dans lequel il a grandi n'était pas un endroit sûr. Les attentats du groupe d'extrême gauche «Sentier Lumineux» étaient combattus par une armée à peine moins impitoyable. Virgilio voulait partir. Il a trouvé du travail à l'étranger comme aide-cuisinier, puis comme cuisinier. Il voyagea ainsi à travers le monde, surtout au Japon. Et la cuisine de ce pays l'a profondément marqué.

Dix ans plus tard, il est revenu, prêt à s'établir comme cuisinier dans son propre pays, désormais quelque peu apaisé. Il a commencé de manière traditionnelle, mais n'a pas tardé à expérimenter. C'en était trop pour son chef, et Martínez a ouvert son premier établissement.

Lorsque des clients lui ont dit qu'ils se sentaient comme dans un grand restaurant de New York ou de Tokyo, il ne l'a pas pris comme un compliment, bien au contraire. Il voulait qu'ils se sentent comme au Pérou. Il a pris un congé sabbatique pour voyager pendant un an, cette fois à travers son propre pays. Il s'est alors engagé dans une voie nouvelle et audacieuse. Aujourd'hui âgé de 46 ans, il possède plusieurs restaurants. Sa femme, Pía León, a également été élue meilleure femme cheffe en 2021 avec son propre établissement.

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Image: instagram virgiliocentral

La moitié des ingrédients du menu du Central sont inconnus du commun des touristes – et même des Péruviens. Le menu de quatorze plats est une véritable explosion de saveurs, une attaque permanente sur toutes les papilles gustatives. Ils sont servis dans des bols et des assiettes faits à la main par des artistes locaux qui utilisent des techniques de poterie traditionnelles. Les couverts sont également sculptés ou moulés à la main, le menu est présenté sur du papier fait maison et la décoration est faite de plantes et de matériaux organiques.

Une Suissesse fait vivre une expérience spéciale au cacao

C'est le dessert qui nous a marqués le plus: du chocolat. Mais chez Virgilio Martínez, il ne s'agit pas d'une banale mousse au chocolat. Il utilise toute une palette de techniques, du fumage à la fermentation, en passant par de l'infusion. Des parties inhabituelles du fruit du cacaoyer, comme la coque et la pulpe, y sont aussi incorporées. Car les graines, qui sont grillées et transformées en chocolat, ne représentent que 15% du fruit. Martínez a même engagé sa propre équipe de recherche sur le cacao, avec à sa tête la Suissesse Mimi Hengelhaupt qui étudie tout ce qui concerne le cacao et les espèces similaires de Theobroma.

Le dessert au cacao réunit une bonne sélection de ces expériences chocolatées. C'est au plus tard à ce moment-là que chaque client atteint ce que Virgilio Martinez souhaite leur offrir lors d'une visite dans son établissement pour environ 400 francs: la transcendance. (aargauerzeitung.ch)

Traduit et adapté de l'allemand par Léa Krejci

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