«Cracher du sang, c’était ma hantise»: Cette Romande a la tuberculose
Nous nous rendons dans un bar de la ville de Lausanne, pour y rencontrer une jeune femme: Tessa*. Elle fait partie de ces personnes, en Suisse, qui ont vu la tuberculose chambouler leur vie.
Armée de sa bonne humeur, une bouteille d'eau à la main, elle nous ferait presque oublier qu'elle est souffrante. La maladie n'a de loin pas entamé sa positivité, même lorsqu'on lui a annoncé le diagnostic, bluffant le personnel hospitalier qui prenait soin d'elle. C'est peut-être même l'un des remèdes les plus efficaces pour combattre la maladie.
Mais Tessa en bave et nous explique son quotidien qui a radicalement changé, des premiers symptômes au jour où sa vie a changé radicalement.
Mais Tessa n'est pas du genre à s'alarmer. Elle décide seulement aux alentours de mi-mai d'aller se faire ausculter.
Cette visite a donné lieu à un premier diagnostic: de l'asthme, selon la spécialiste. Tessa se retrouve avec un Ventolin en main. Mais la douleur se propage dans son organisme. «Fin juillet, j’avais mal à la hanche. Je pensais que c’était une sciatique.»
Le temps passe et cette «mère en solo», comme elle aime se qualifier, se plaint d'un état de santé qui se détériore. Elle retourne voir son pneumologue toutes les six semaines, mais elle morfle et avoue «être triste pour sa fille qui voit sa mère fatiguée, qui ne va pas bien». Elle enchaîne et explique:
«Avant d'avoir le diagnostic, la prise en charge n'était pas adéquate, mais vraiment pas.» Elle n'a jamais eu de réponse concernant cette lenteur de diagnostic. Selon Tessa, le problème venait de son profil. «Je n'ai pas le profil type: j'étais jeune et je n'étais pas en situation d'immigration. Et même si je n'étais pas bien, je ne montrais pas que j'étais très mal, surtout quand on est une maman solo avec trois boulots. Je fais semblant que tout allait bien.»
Selon les informations sur le site de l'OFSP, les cas entre 2023 et 2024 restent plus ou moins stables.
Et le 6 novembre, elle passe par la case scanner, et attend les résultats fébrilement: «Le 15 novembre, le pneumologue m’a dit: "j’ai une mauvaise nouvelle".»
Une autre interrogation demeure: comment a-t-elle pu contracter la tuberculose ici en Suisse? «Ils pensent que j’ai attrapé la maladie lors de mon séjour en Afrique de l’Ouest, en 2014. La maladie était latente. Aussi, elle se réveille que chez 5 à 10% chez les gens. Mais ils ne comprennent pas pourquoi maintenant. Habituellement, elle se manifeste chez des personnes en déficience immunitaire, d'un âge avancé ou de jeunes enfants. A mon âge, c’est étonnant.»
Et le traitement commence pour Tessa: deux semaines à se faire prélever du sang tous les jours, à être surveillée et auscultée. En rigolant, elle nous confie: «Dieu merci, je ne crachais pas du sang. C’était ma hantise.»
A ce jour, la cadence des contrôles s'est légèrement calmée. Mais jusqu’à la semaine passée, Tessa passait toutes le deux semaines au Chuv pour faire des check-up. Car l'ardoise (de médicaments) était assez longue. «Le traitement normal, c'est quatre antibiotiques sur deux mois et ensuite deux sur quatre mois. Pour moi, comme j'ai une forme grave, mon traitement est différent. Au bout des deux mois, j'ai dû continuer avec les quatre antibiotiques. Je serai encore à quatre pendant longtemps. D'ici à plusieurs mois, peut-être, je pourrais peut-être passer à trois. Mais ce n'est vraiment pas sûr, peut-être que je finirai à quatre antibiotiques», détaille-t-elle.
C'est surtout physiquement que l'addition était – et est encore aujourd'hui – salée: «Je toussais comme jamais et je ne parle pas de ma respiration. Je transpirais beaucoup durant la nuit: j’essorais mon t-shirt à peu près quatre fois dans la nuit. C’était un enfer, je parcourais tout mon lit, tous les angles pour éviter les zones où j'avais transpiré. Pour l'anecdote: je plaçais quatre t-shirt sur les bords de mon lit, pour pouvoir me changer sans devoir me lever.»
Depuis qu'elle est malade, elle s'est délestée de cinq kilos et elle peine à retrouver sa respiration d'antan. La jeune femme avoue «avoir peur d'être mise à l'arrêt et de retourner à l'hôpital».
Surtout, une telle maladie entraîne une foule d'effets secondaires.
Tessa avoue sa tristesse de ne plus pouvoir s'adonner son activité sportive et à pouvoir travailler comme elle le souhaite.
Une maladie qui peut renvoyer à des réflexions plus sombres, comme penser à la mort sur son lit d'hôpital et à revoir sa vie en pointillé.
Même si parfois, il est difficile de garder le moral, surtout quand elle se trouve loin de sa fille âgée de 6 ans. C'est une douleur supplémentaire. «C’était difficile à l'instant où j'ai été hospitalisée. Ça m’a fait mal. Mais j'ai eu la chance de pouvoir compter sur ma mère, qui s'est occupée d'elle. Et elle a pu venir me rendre visite.»
Tessa voit gentiment le bout du tunnel. Au moment de remonter le temps et de nous décrire ses déboires, elle ne perd pas le sourire. Surtout, elle est contente de pouvoir revenir gentiment sur son lieu de travail.
Elle croise les doigts pour un rétablissement rapide, attendu en janvier si tout se passe bien - tout en sachant qu'après sa guérison, elle sera encore surveillée sur une période de 5 ans. En attendant, Tessa est reconnaissante pour la prise en charge au Chuv. «Au service DAT (réd: le service de consultation de tuberculose) du Chuv, ils sont incroyables. Je ne les remercierai jamais assez», conclut-elle, bien sûr, avec un large sourire.
*Nom connu de la rédaction