Plus de la moitié des moins de 18 ans en Suisse ont déjà regardé un film porno sur Internet. C'est ce que montre la dernière étude James de la Haute école zurichoise des sciences appliquées (ZHAW). Le conseiller national zurichois du Parti Evangélique suisse Nik Gugger souhaite donc mieux protéger les enfants et les jeunes des contenus pornographiques.
Malgré une législation claire, la situation est insatisfaisante. Aujourd'hui, toute personne rendant la pornographie accessible aux moins de 16 ans sur Internet est punissable. Les fournisseurs doivent vérifier l'âge et interdire l'accès aux jeunes. Seulement, dans la réalité, la protection des mineurs est mal appliquée. Un clic de confirmation suffit pour faire croire à un âge légal.
Le Conseil national a, lui aussi, jugé cette situation choquante. En mai dernier, il a approuvé la motion à une majorité des deux tiers. Au Conseil des Etats également, le politicien du PEV était sur la bonne voie, jusqu'à ce que la commission juridique émette des réserves. La commission des télécommunications en charge du dossier a donc fait rédiger un rapport sur les aspects juridiques.
Du côté du Conseil fédéral, on estime que la Suisse fait déjà le maximum:
Pour faire respecter l'interdiction, le gouvernement estime qu'il faudrait un «blocage du réseau».
Mais celui-ci peut également être contourné, comme le montre la loi sur les jeux d'argent. Depuis 2019, seuls les casinos suisses peuvent proposer des jeux d'argent en ligne. Les joueurs peuvent toutefois dissimuler leur localisation suisse au moyen d'un service VPN. C'est ce que le Contrôle fédéral des finances a souligné au début de l'année dans un rapport de contrôle.
Pour les opposants, il est donc clair que seuls les Etats qui contrôlent l'ensemble du trafic Internet peuvent appliquer efficacement les blocages de réseaux. Le Parti pirate est encore plus critique. Les mesures demandées «encourageraient la collecte de vastes profils de personnalité et révéleraient notamment les tendances sexuelles et le comportement des utilisateurs», prévient-il.
La mise en oeuvre est-elle donc disproportionnée et trop difficile? Pour Nik Gugger, ce ne sont que des excuses.
Il envisage une identification de l'âge par carte de crédit, comme c'est déjà le cas en Allemagne. En Suisse, la volonté politique fait jusqu'à présent défaut, Nik Gugger en est convaincu.
Mais le temps joue en faveur de l'homme politique du PEV. Le gouvernement français a récemment présenté une loi visant à renforcer la protection des mineurs sur Internet. Les visiteurs des sites pornographiques devront présenter une autorisation numérique délivrée par un organisme administratif tiers. Celui-ci délivrera un renseignement automatisé sur l'âge, sans savoir lui-même pourquoi la demande est faite. Le système est testé depuis mars, avec des résultats encourageants. Le nouveau système devrait être introduit à la fin de l'année.
La Suisse n'en est pas encore là. Néanmoins, il y a de bonnes chances pour que la commission du Conseil des Etats donne son feu vert. Il s'agirait alors de la question cruciale, à savoir la mise en œuvre. Albert Rösti devrait faire preuve de plus de compréhension que Simonetta Sommaruga. Il a d'ailleurs cosigné l'intervention.
(Traduit et adapté par Chiara Lecca)