Urs Fischer, on nous a prévenus: vous aborder sur un sujet spécifique pourrait être très délicat...
URS FISCHER: J'ai hâte de voir ça.
Si Union Berlin se qualifie pour la Ligue des champions à la fin de la saison...
(Rire sonore)
... Christopher Trimmel, le capitaine, est tatoueur pendant son temps libre. Quel tatouage pourrait-il vous faire si Union jouait la Ligue des champions?
(rit encore) Croyez-moi sur une chose: un tatouage sur mon corps? Non, pas à cet âge-là! Non, non, non. Il ne serait plus mis en valeur. Et ça ne conviendrait pas non plus. Mais j'avoue que vous avez bien décrit la situation. Je maintiens que beaucoup de choses sont encore possibles. Voyons ce qu'il en ressort au final. Je crois déjà que l'objectif Europe est crédible pour nous...
Il ne faut pas oublier qui tu es et d'où tu viens. Nous nous qualifierions pour la troisième fois pour une compétition européenne lors de notre quatrième année en Bundesliga. C'est de la folie! De la folie pure et simple! Et ça n'a rien à voir avec un manque d'ambition. Au final, tout le monde veut un maximum de succès.
Récemment, un test de son a eu lieu au stade An der Alten Försterei, et c'est justement l'hymne de la Ligue des champions qui a été joué. Une coïncidence malheureuse?
C'était plus que malheureux. Ça m'a fâché, d'autant plus qu'il y avait environ 300 personnes à cet entraînement et qu'elles ont pu l'entendre. Les médias étaient aussi là. Et puis tout à coup, il y a cette chanson. Je ne l'ai pas choisie. Mais c'est arrivé. J'ai donc dû répondre à quelques questions à ce sujet.
Y a-t-il des moments où vous vous réveillez, regardez le classement de la Bundesliga et pensez: «Est-ce que ça peut vraiment être vrai? Ce doit être un conte de fées!»
Je ne suis pas un rêveur. Je suis bien trop prisonnier de la réalité. Bien sûr, nous nous sommes déjà demandé où tout ça pourrait nous mener. C'est déjà extraordinaire ce que tout le monde fait ici. Mais nous sommes tellement occupés par la prochaine tâche qu'il ne reste plus de temps pour autre chose, et c'est bien comme ça.
Vraiment?
Oui! Quand on a tout à coup trop de temps pour réfléchir à l'ampleur extraordinaire de ces succès, les plus grandes erreurs peuvent se produire!
Quelle est la base de votre succès?
Phuuuu... difficile! Laissez-moi réfléchir.
En d'autres termes, la formule du succès d'Urs Fischer existe-t-elle ?
Non, je ne pense pas. Pour moi, l'une des choses les plus importantes est de rester authentique. Si ce n'est pas le cas, tu te restreins toi-même.
Mais vous posez quand même quelques garde-fous aux joueurs, non?
Bien sûr, quand nous avons une réunion ou un lieu de rendez-vous, l'heure compte aussi. Pour moi, la ponctualité est quelque chose d'extrêmement important. L'équipe le sait.
Avez-vous des moments de solitude?
Moi et mon canapé?! (rires) Non, non, pas ce genre de choses. C'est important de toujours sortir. Il n'y a pas toujours la famille, alors parfois des collègues viennent me rendre visite. Une certaine distraction fait du bien, si le temps le permet. J'aime bien organiser ma vie de manière active en dehors du travail. Après cette interview, nous allons par exemple jouer au padel avec mon staff.
Vous avez un hobby important: la pêche à la mouche. Vous passez parfois des heures dans l'eau, à vous imprégner de la nature. Que vous apportent ces moments?
De l'énergie! C'est très simple. Ne pas penser aux affaires courantes. Ne pas penser à ce à quoi tu penses le plus.
Quel est le plus beau compliment que quelqu'un puisse vous faire en tant qu'entraîneur?
(longue réflexion) Que je suis toujours le même qu'avant... Le même que quand j'ai commencé à jouer dans les juniors du FC Zurich. (rires)
Et lorsque quelqu'un comme Edin Terzic, l'entraîneur de Dortmund, déclare après une défaite contre vous: «Tout le monde sait ce qu'ils font et personne ne peut rien y faire!» C'est une sorte d'adoubement?
Alors je veux faire en sorte que ça reste comme ça! C'est ce que j'ai dit précédemment: quand on a l'impression que le succès est acquis, c'est le plus grand danger. Il faut rester en éveil quand ça marche. Ensuite, il faut provoquer des changements, sans exagérer bien sûr. Et il faut peut-être être un peu plus pragmatique quand ça ne va pas. Ne pas tomber dans l'action à tout prix et tout chambouler tous les quinze jours ou essayer tout le temps quelque chose de nouveau.
L'idée de vous voir sur le banc d'un club plus important... Vous commencez déjà à rire!
Que puis-je dire à ce sujet? Déjà quand j'étais à Zurich, on disait: «Il ne sait entraîner qu'au FC Zurich! Rien d'autre n'est possible.»
C'était plutôt pour dire que l'on vous ferait confiance depuis longtemps pour coacher un club encore plus grand qu'Union Berlin!
Au final, ça n'a pas d'importance. Ma place est ici. Je suis bien ici. Je m'amuse tous les jours.
Adaptation en français: Yoann Graber