Pour prendre leur pied sur le terrain, les footballeurs doivent en avoir de beaux. Non, n'y voyez aucun fétichisme, la raison n'est que pratique: les panards sont les outils de travail principaux des footeux. Alors si ces derniers sont victimes de la moindre gêne aux petons, leurs prestations peuvent vite devenir médiocres et les résultats de leurs clubs en pâtir.
C'est pourquoi ceux-ci travaillent de plus en plus étroitement avec des podologues. Les grands clubs européens en comptent tous dans leur staff. C'est le cas du Paris Saint-Germain, par exemple. Mais le PSG n'a pas attendu l'arrivée de stars comme Neymar, Mbappé ou Messi pour s'inquiéter de la santé podale de ses protégés. La preuve avec l'avis mortuaire publié le 31 décembre sur les réseaux sociaux du club. Le PSG y rend hommage à Gilles Watelle, «ancien podologue au centre de formation puis de l'équipe première de 1978 à 2007». Autrement dit, les Parisiens bénéficient depuis déjà 45 ans des soins d'un spécialiste des pieds.
Le Paris Saint-Germain a appris avec une profonde tristesse le décès de Gilles Watelle, ancien podologue au centre de formation puis de l’équipe première de 1978 à 2007.
— Paris Saint-Germain (@PSG_inside) December 31, 2022
Toute la famille Rouge et Bleu adresse ses condoléances à ses proches. ❤️💙 pic.twitter.com/trruEuQ1IQ
Dans ce domaine, le PSG est un précurseur. «Quand j'ai commencé dans le sport de haut niveau en 1992, ce n'était pas très développé», rembobinait dans Le journal du dimanche le successeur de Gilles Watelle au Paris Saint-Germain, Fabrice Letang-Delys.
Au point qu'aujourd'hui, les podologues ont mis le pied dans de nombreux clubs de football, organisent des formations et participent à des congrès internationaux chapeautés par les fédérations elles-mêmes (l'Espagne en 2018, par exemple).
Ce développement s'insère plus largement dans la professionnalisation du football ces 20 dernières années, qui a vu des analystes vidéo, des nutritionnistes ou des préparateurs physiques devenir indispensables dans les staffs. Mais il faut aussi y voir une tendance sociale. «Les gens en général prennent aujourd'hui plus soin d'eux», constate Arsène Ayébi, podologue spécialisé en sport à Lausanne.
Cette observation, Arsène Ayébi l'a aussi faite avec les footballeurs pros qui franchissent la porte de son cabinet. Parmi eux, il y a quelques joueurs du Lausanne-Sport. «Je ne fais pas partie du staff du club, mais les joueurs sont envoyés chez moi par leur médecin», précise celui qui a exercé à l'Olympique Lyonnais (OL) en 2000.
Le podologue explique que l'essentiel de son travail avec cette patientèle spécifique reste, malgré tout, les soins cutanés comme les ampoules, cloques ou cors. «Et il y a aussi les ongles incarnés», rappelle-t-il. «Les footballeurs en ont énormément, c'est dû aux chaussures de foot trop petites.» Et quand on sait que l'épaisseur de celles-ci est très fine, les bobos à soigner causés par des contacts avec les crampons des adversaires sont légion.
L'autre grande partie du travail des podologues avec les footballeurs consiste à prévenir et surtout guérir les blessures liées à la posture – statique et en mouvement – et à la voûte plantaire. Et pour cause: de mauvais appuis peuvent entraîner des douleurs et des dysfonctionnements dans le reste du corps, notamment les genoux. Il s'agit, dès lors, de fabriquer des orthèses et des semelles sur mesure. Histoire, donc, que les footeux se sentent bien dans leurs chaussures, au propre comme au figuré.
«En général, les footballeurs viennent chez nous en dernier recours, on est leur ultime espoir», observe Sacha Bernardi, technicien orthopédiste chez Giglio Orthopédie à Genève. Lui-même joueur amateur, il a déjà conseillé quelques pros du ballon rond. «Sur ordonnance de leur médecin, ils viennent pour un premier rendez-vous où on analyse leur posture et leur foulée, avec et sans chaussures, ainsi que la forme de leur pied», décrit-il.
Sacha Bernardi regrette qu'il n'y ait pas davantage de sensibilisation dans le foot sur l'importance de la podologie, surtout auprès des parents de juniors. «Souvent, quand un enfant souffre de douleurs aux genoux, ses proches pensent qu'elles sont dues à la croissance et n'investiguent pas plus loin», déplore le Genevois. De son côté, Arsène Ayébi n'exclut pas de faire du pied à des clubs pros en Suisse pour obtenir des mandats et, ainsi, renforcer encore le lien entre ce sport et la podologie.
Les fans ont de quoi se réjouir: les joueurs avec les pieds carrés, c'est peut-être bientôt fini...