«Tout va très vite dans le football». Tous ceux qui suivent un peu ce sport ont forcément entendu cette maxime. Guglielmo Arena, «Guli» pour les intimes, l'a expérimentée.
Flashback en mars dernier. Cet habitant du Bouveret (VS), qui a grandi à Montreux (VD), se trouve au Cambodge. «Presque en vacances», sourit-il au bout du fil. Le «presque» a son importance: en fait, Guglielmo Arena assiste, comme spectateur, au tournoi de football des Jeux d'Asie du Sud-Est. Il y a rejoint des amis. Parmi eux, Philippe Troussier, ex-entraîneur de l'Olympique de Marseille, du Nigeria et de la Côte d'Ivoire, entre autres. Le Valaisan et le Français se sont connus en Chine en 2015, quand le premier était l'assistant du second à Hangzhou (première division).
«J'étais au stade avec Philippe et quelques potes quand un homme s'est approché de moi après avoir entendu que je parlais français», rembobine Guglielmo Arena. L'homme en question? Un dirigeant de la fédération laotienne de football.
Une perspective qui aurait de quoi en effrayer plus d'un mais pas «Guli», véritable bourlingueur du football. Dès le début des années 2000, le technicien (49 ans) a entamé un tour du monde pendant lequel il s'est assis sur des bancs au Burkina Faso, Bénin, Maroc, Algérie, Singapour ou encore Emirats arabes unis, avec deux passages entre-deux dans le foot amateur valaisan, à Collombey-Muraz (2007) et Conthey (2018-2019). Alors, trois jours seulement après cette première discussion officieuse, il prend un avion pour le Laos, où il est attendu pour présenter son projet.
Par chance, il connaît le football de ce pays d'Asie du Sud-Est, coincé entre la Thaïlande et le Vietnam. Là-encore, à la base, une rencontre fortuite: «J'ai fait la connaissance d'un collègue laotien dans l'entreprise où je travaillais en 2007, sur la Riviera vaudoise», se souvient Guglielmo Arena.
A Vientiane, la capitale, lors de son audition devant les dirigeants de la fédé, il met en avant son envie de professionnaliser le football local et la sélection, «en amenant notamment de la rigueur tactique, de la discipline sur et en dehors du terrain ainsi qu'un travail de condition physique spécifique à ce sport.»
Il faudra encore un entretien par zoom quelques jours plus tard pour que Guglielmo Arena, rentré en Suisse entre-temps, et la fédération laotienne de football tombent d'accord. Le résident du Bouveret a paraphé un contrat jusqu'à fin octobre, qui couvre des mandats à la tête de l'équipe A et des U23. «Les dirigeants voulaient que je signe pour deux ans, mais j'ai préféré voir ce que ça donne d'ici octobre, parce que je ne sais pas vraiment où je mets les pieds», précise le coach suisse.
Malgré ce court laps de temps, le travail et les grosses échéances ne manqueront pas. A commencer par la construction du contingent des équipes, tant chez les U23 que chez les grands. Pour l'aider dans sa tâche, «Guli» peut notamment compter sur son petit staff qui comprend deux personnes: un entraîneur des gardiens et un assistant. Tous deux sont Marocains et ont déjà collaboré avec le Valaisan quand il entraînait le Rapide Oued Zem, un club de première division marocaine, entre avril et juillet 2022.
«Depuis que je suis arrivé au Laos, début juin, on va regarder des matchs de première et deuxième divisions pour pré-sélectionner des joueurs», détaille le natif de Montreux, qui est au bénéfice d'une licence de coach pro officielle passée en Asie en 2014, lui permettant d'entraîner au plus haut niveau sur ce continent ainsi qu'en Afrique (mais pas en Europe).
En ligne de mire, la Coupe d'Asie du Sud-Est chez les U23 en Thaïlande en août puis, toujours avec cette équipe, le tournoi préliminaire de la Coupe d'Asie (l'équivalent de l'Euro M21) au Tadjikistan en septembre. Et la sélection A? «Elle aura la même ossature que les M23, renforcée par quelques joueurs d'expérience évoluant à l'étranger», anticipe «Guli». Certains d'entre eux évoluent par exemple en Thaïlande ou aux Etats-Unis.
Prochain objectif? Passer le match de barrage en octobre pour figurer dans les qualifications asiatiques pour la Coupe du monde 2026. Les Laotiens en découdront avec une formation de seconde zone du continent, comme eux, dans une double confrontation aller-retour. «Si on passe cet obstacle, on pourrait affronter dans la phase de groupes des grandes nations du football en Asie, comme le Japon ou l'Iran», se réjouit déjà Guglielmo Arena.
D'ici là, il restera au Laos, où la fédération lui a trouvé un appartement meublé, «la tête dans le guidon, plein gaz, à ne penser qu'au foot!». Pour cet Etat, atteindre les poules relèverait déjà de l'exploit: «Le niveau de la première division laotienne correspond à celui de la 2ème ligue en Suisse», observe le technicien valaisan. Mais il en est convaincu: la sélection laotienne a une grosse marge de progression.
Si, dans ces dernières, les footballeurs sont remplacés le temps d'une soirée d'octobre prochain par des feux d'artifice fêtant une qualification, c'est que «Guli» aura atteint un nouveau joli objectif dans sa folle odyssée à travers le globe.