Tiger Woods, 47 ans, est un golfeur comme le monde n'en a jamais connu. Mais en ce moment, lorsqu'il donne une conférence de presse, il ne s'agit plus seulement de savoir s'il frappe bien la balle. Ce n'est plus tellement la question.
Il s'agit par exemple de savoir tout ce que contient sa jambe, combien de «hardware», comme Woods le dit lui-même, c'est-à-dire de tiges, de plaques et de vis. La réponse est brève, elle tient souvent en un mot: «Beaucoup».
Cette quincaillerie a sauvé la jambe de l'Américain. Après son grave accident de voiture en 2021, Woods ne savait pas s'il pourrait remarcher normalement. Au début, les médecins ont même envisagé une amputation. Mais ils ont ensuite trouvé une autre solution.
Woods a toujours sa jambe et il en est reconnaissant. Mais elle ne fonctionne plus comme avant. Sa blessure l'a transformé en golfeur à temps partiel. Il ne peut plus jouer que quelques tournois par an. Notamment le Masters cette semaine à Augusta, dans l'État de Géorgie.
Il s'agit du premier des quatre tournois majeurs, celui auquel Woods tient le plus. Rien n'a changé sur ce plan. Seulement, ce ne sont plus ses coups qui le préoccupent le plus à l'approche du premier temps fort de la saison.
Son seul souci, c'est de savoir si ses jambes peuvent encore le porter pendant 72 trous, d'autant plus sur un parcours aussi vallonné. «La difficulté pour moi, c'est la marche», reconnaît Woods. Et d'ajouter que si son endurance est meilleure que l'an dernier, sa jambe est également plus douloureuse. «Je ne peux plus me préparer et jouer autant de tournois que je le voudrais. C'est mon avenir et je m'en accommode», dit-il.
Lorsque Woods s'est présenté à Augusta cette semaine, la nouvelle a fait le tour du monde du golf à une vitesse fulgurante. Il est là! Il s'entraîne! Woods n'avait jamais confirmé sa participation. Il n'est plus que 1001e au classement mondial, mais tout tourne à nouveau autour de lui. Cela montre à quel point il est encore important pour le golf.
Lorsque Woods est de la partie, les audiences grimpent en flèche. Dans le milieu du golf, on appelle cela «l'effet Tigre». Le quintuple vainqueur de tournois majeurs est aujourd'hui une sorte d'éminence grise. En tant que tel, il prend clairement position dans la guerre des roses qui fait rage dans le monde du golf depuis que de nombreuses stars ont cédé aux millions du nouveau LIV Tour saoudien et tourné le dos au vieux PGA Tour. Woods fait partie du camp des traditionalistes qui n'aiment pas le LIV Tour, et qui le font savoir clairement.
Ce sport n'a pas d'autre figure comme lui à offrir, et aucun lieu n'a plus d'importance pour cette figure qu'Augusta. C'est là que Woods a remporté son premier tournoi majeur en 1997 et son dernier en 2019, après onze longues années d'attente. En 2022, il a osé y faire son retour, 14 mois après son accident de voiture.
Augusta, encore et toujours Augusta. Et entre les deux, une vie de drames. Woods, l'athlète d'exception. Woods, l'adultère et l'obsédé sexuel. Woods, le blessé permanent. Woods, le dérangé, retrouvé endormi dans sa voiture, confus et défoncé. Ce sont des scènes de la vie d'un homme qui a toujours tout fait pour devenir le plus grand de tous - et qui ne parvient pas à assumer cette grandeur.
On lui demande cette semaine comment il a pu surmonter tous ces revers. Il pense qu'il y est parvenu grâce à son obstination. Woods ressent toujours cette flamme pour le golf, il ne peut pas s'en passer, jusqu'à aujourd'hui - même s'il ne peut plus faire autant de choses qu'il le souhaiterait.
On demande encore à Woods s'il représente un danger pour les joueurs de haut niveau à Augusta. «Qui sait», répond-il. Mais pour son premier jour, sur un parcours où il a semblé traîner la jambe, l'Américain a terminé dans la douleur, sur le score de 74 (+2).