Peu d’intensité sur la glace, un grand spectacle offert par les joueurs et la meilleure vitrine possible pour le hockey: voilà ce qu'est la Coupe Spengler depuis ses débuts, il y a exactement 100 ans. Ou plutôt ce qu'elle était.
Les plus conservateurs ont inventé l'expression péjorative «Grümpelturnier» pour parler de cet événement. L'ancien président de la fédération internationale (IIHF), le Dr Günther Sabetzki, l'a même qualifié de «Wischi-Waschi-Veranstaltung», qu'on peut traduire par «tournoi à l'eau de rose», pendant son mandat (1975-1994).
Les critiques à l'encontre de la Coupe Spengler n'ont jamais été totalement injustifiées. Mais, au final, c'est ce vieux et célèbre proverbe qui l'emporte:
Car en 2023, après 100 ans d'existence, la Coupe Spengler n'a jamais été aussi jeune, et peut-être même aussi spectaculaire. L'intensité des matchs est énorme et très clairement supérieure à celle des rencontres de saison régulière en National League.
Davos et Ambri ont joué dans ce tournoi à un niveau qu'ils n'ont que rarement atteint jusqu'ici en championnat. Jeudi soir, la victoire des Grisons contre le Team Canada (4-3) est peut-être le meilleur match du HCD depuis la fin de «l'ère Del Curto».
Pendant près de 100 ans, la Coupe Spengler a aussi été l'occasion pour les hockeyeurs de faire des extravagances en dehors de la glace. De nombreuses histoires folles sont ressorties ces derniers jours pour célébrer le jubilé. Et encore, on ne les connaît pas toutes...
Mais cette époque est révolue. Le tournoi davosien rayonne sur le plan sportif, à tel point que le remporter est plus prestigieux qu'un sacre en Ligue des champions. Une aura qui est notamment due aux images télévisées produites par notre service public, la SSR, dont la qualité dépasse même les réalisations de la NHL.
Un autre élément joue en faveur de la Coupe Spengler: les championnats étrangers continuent de se dérouler pendant la semaine entre Noël et Nouvel An. Autrement dit, l'équipe qui déserte son championnat national pour venir jouer le tournoi grison doit aujourd'hui plus que jamais justifier son voyage à Davos auprès des investisseurs et des fans. Et ça passe par de bonnes performances. Plus personne ne finance ou ne tolère un séjour de détente ou de plaisir dans les montagnes grisonnes.
Les grands noms qui ont honoré la compétition de leur présence par le passé sont aujourd'hui absents. Fini, les stars mondiales de l'ex-Tchécoslovaquie, suédoises, russes ou même celles de NHL (comme durant les lock-out en 2004 et 2012). D'ailleurs, elles ne reviendront sans doute pas à Davos. Durant les Fêtes, le hockey se mue là-bas en un véritable sport d'équipe, où le collectif l'emporte sur les vedettes.
Les romantiques peuvent regretter cette évolution vers un hockey rugueux et intense, dans lequel les stars ont moins d'espaces pour s'exprimer. Mais le spectacle est toujours possible. L'exploit individuel d'Andres Ambühl pour égaliser à 3-3 contre les Canadiens ou le but victorieux de Calle Andersson après une superbe combinaison en sont la preuve. C'est simple: ces deux buts sont de classe mondiale.
Cette élévation très nette du niveau a son charme, auquel même les plus romantiques ne peuvent résister. Pour son centenaire, la Coupe Spengler offre le meilleur hockey de club en dehors de l'Amérique du Nord. Point. Il faudra attendre les play-offs de National League pour revoir le même niveau de hockey que propose le tournoi grison cette année.
Adaptation en français: Yoann Graber.